Les Américains sont surchargés de travail et préfèrent les solutions rapides et les médicaments au lieu d’identifier les raisons plus profondes de leurs problèmes, selon le docteur Lisa Palmer, psychothérapeute de Renew Center en Floride.
L’Organisation mondiale de la santé [OMS] a publié sa nouvelle liste des pays les plus déprimés du monde. Les États-Unis occupent la troisième place après l’Inde et la Chine. Selon un grand nombre d’experts cela est dû aux dépressions, à l’angoisse, à la toxicomanie et à l’alcoolisme.
RT : Comment les pays les plus puissants et les plus riches du monde peuvent connaitre des statistiques aussi sombres ?
Dr Lisa Palmer : Nous connaissons certainement une crise de la santé mentale en Amérique. En fait, 15 millions d’Américains sont touchés par la dépression ; 60 % d’entre eux prennent réellement des antidépresseurs, et croyez-le ou pas, le suicide est la dixième cause de décès en Amérique. C’est donc un problème très grave, je suis d’accord avec cela.
Selon l’OMS, l’Inde, la Chine et les États-Unis sont également les pays les plus touchés par l’angoisse, la schizophrénie et les troubles bipolaires. Il est difficile d’imaginer dans des endroits comme l’Iran, le Pakistan ou l’Indonésie beaucoup de gens se plaindre de problèmes de santé mentale, ou demander l’aide d’un thérapeute. Pensez-vous que ces chiffres soient biaisés ?
C’est certainement vrai. Il existe une stigmatisation de la santé mentale. Je pense que les Américains cherchent l’aide des spécialistes plus souvent, alors les chiffres ne sont certainement pas justes. Aux États-Unis il y a également cette pression pour réaliser le « rêve américain ». Les gens ont des difficultés avec ça : réconciliation de la vie privée et du travail, la paix, l’art de vivre, un sentiment de solitude et d’isolement, tout cela est extrêmement répandu, surtout en raison de la nature indépendante de notre culture, ce qui affecte les gens dans leur dépression.
Les États-Unis ont également une armée pléthorique, la plus grande du monde, depuis 15 ans de guerres au Moyen-Orient. Beaucoup de militaires sont déprimés quand ils reviennent chez eux : d’après les statistiques, 22 vétérans se suicident chaque jour. Pensez-vous que ces éléments soient les facteurs de la dépression ?
Absolument. Vous avez soulevé un point très important, car le TSPT [trouble de stress post-traumatique] est largement répandu et très souvent stigmatisé. Il faut changer cela, parce que les symptômes du stress post-traumatique sont en réalité des symptômes normaux, le résultat d’une expérience douloureuse, lorsque vous êtes dans la réponse combat-fuite. Dans le cadre d’un bon schéma thérapeutique il faut donc inverser cette réaction normale qui se produit pour aider les gens, en vu de leur permettre de fonctionner quotidiennement, sans avoir recours aux médicaments comme un moyen de tenir, parce que ceux-ci, souvent prescris aux personnes, donnent un soulagement temporaire, mais pas une solution à long terme.
Vous avez évoqué plus tôt le mode de vie américain, ce qui les pousse à faire mieux, à gagner plus d’argent, à travailler des heures supplémentaires. Comment cela fonctionne à long terme, si les gens ne changent pas ce mode de vie qui est la norme dans la société américaine ?
C’est une chose vraiment difficile à faire. Si on y pense, on comprend que nous sommes vraiment débordés. Les Américains travaillent 8 à 9 heures par jour en moyenne. Les Suédois, par exemple, travaillent environ 6 heures par jour, ils ont donc du temps pour se reposer. Ce sur quoi les Américains devraient travailler c’est lorsqu’ils disposent d’un temps de repos, l’utiliser de la meilleure manière possible ; prendre soin d’eux-mêmes et de leur santé ; établir des priorités et se concentrer, travailler sur leur système de croyances positives, au lieu d’opter pour des solutions rapides et des médicaments afin de s’endormir ou tenir le coup. Apprendre aux gens qu’il existe des moyens plus efficaces d’aller mieux, en soulageant des symptômes émotionnels qui sont toxiques pour eux et les tiennent paralysés. Je pense que l’éducation est la clé et j’espère que notre futur président va se concentrer sur cette question, en faisant de la santé mentale une priorité, car notre pays en a tellement besoin.
Quel est votre conseil pour rendre l’Amérique plus heureuse ? Comment chacun peut devenir un peu plus heureux ?
Le bonheur vient évidemment de l’intérieur. Il nous faut nous concentrer sur l’évaluation de nous-mêmes, ce qui veut dire qu’il faut parfois ralentir et se pencher d’un œil critique sur nous-mêmes et sur nos vies, pour voir ce qui doit être changé en premier. Une fois que cela est fait, on peut avancer, trouver probablement l’aide nécessaire pour soulager les symptômes, pour un gain à long terme, chercher la manière plus globale de le faire. Je vois souvent que les symptômes de mes patients diminuent, même sans médicaments, grâce à une thérapie appropriée. Je pense qu’il faut faire cela et prendre le temps de se réjouir de manière saine : ne pas se tourner vers l’alcool, les drogues ou les loisirs négatifs, mais essayer plutôt de se focaliser sur les choses positives qui vont nous apporter la santé et le bonheur.