Caisses obligées de fermer pour écluser les dossiers en attente, téléphones sonnant dans le vide, allocataires au bord de la crise de nerfs... Les Caisses d’allocations familiales (CAF) , submergées de demandes du fait de la crise, craquent de tous côtés.
Dans une lettre confidentielle , que nous nous sommes procurée, envoyée le 26 février à Xavier Darcos, ministre du Travail, le président du conseil d’administration de la Caisse nationale des allocations familiales (Cnaf), Jean-Louis Deroussen, alerte sans détour le gouvernement sur le fait que, « depuis juillet 2009, la demande sociale explose ».
« En ce début d’année 2010, la situation des CAF semble s’aggraver dangereusement », à tel point « que l’ensemble de l’institution est proche de l’implosion », conclut-il. Pis, poursuit cette missive, même la mise en place de « dispositions à l’ampleur inédite », comme la « réduction de l’offre de service en accueil physique » ou la « multiplication des CDD » n’a « pas permis de rétablir durablement un équilibre qui demeure très fragile ». Ces derniers mois, plusieurs syndicats avaient déjà tiré la sonnette d’alarme, pointant la charge de travail accrue des 36 000 agents. Dans le Val-de-Marne, des centres ont dû fermer dix jours, fin 2009, afin de digérer les retards. En Seine-Saint-Denis, les retards de versement ont parfois atteint plusieurs mois.
Les versements de RSA menacés
Aujourd’hui, la crise s’est propagée à tout le réseau. Et pour cause… selon une note d’information interne, que notre journal a pu consulter, le nombre de visites dans l’une des 123 CAF a bondi de 14,8 % en 2009, le nombre de pièces à traiter a progressé de 10,9 %, tandis que le nombre d’appels téléphoniques, lui, grimpait de 36,6 % (lire ci-dessous) ! « A ce rythme, les retards de versement, notamment pour le RSA, vont se multiplier », s’alarme un directeur. Dans sa lettre, Jean-Louis Deroussen, lui, réclame « instamment » que le gouvernement revoie « les moyens alloués à la branche famille », d’autant qu’en 2010 les CAF se verront confiées de « nouvelles charges » comme les impayés de loyers, le RSA jeunes ou la CMU complémentaire. Contacté hier, l’entourage de Xavier Darcos attend d’avoir « des précisions supplémentaires sur ces surcharges avant de se décider » et rappelle que « les 1 200 créations de postes décidées lors de la création du RSA commencent à arriver sur le terrain ». Beaucoup ne seront là qu’en 2011 : chaque nouvelle recrue doit être formée pendant dix-huit mois avant d’être opérationnelle.