En Algérie, quand les élections approchent, la France redevient le temps d’une campagne le grand Satan du FLN et du pays. La presse s’en donne à cœur joie, c’est de bonne guerre électorale. Ce n’est pourtant pas la France qui a ruiné le pays depuis 50 ans, mais les politiques successives hasardeuses des dirigeants algériens.
Chez nous, c’est McDonald’s qui fait figure d’épouvantail pratique. Jean-Luc Mélenchon a l’habitude d’utiliser les symboles de la dominance pour médiatiser son combat. Ce samedi 25 mars 2017, il ne s’agissait pas d’un combat contre la malbouffe mais contre les procédés de défiscalisation de la multinationale américaine. Le candidat de la France insoumise, qui s’est mis au quinoa il y a peu, avait déjà fait le coup au Festival de Cannes, en rencontrant les employés des hôtels de luxe il y a tout juste un an. Mélenchon avait fait les JT, comme on dit, et les grévistes sont retournés bosser, sans avoir rien gagné dans l’histoire.
« Cannes c’est une chose merveilleuse on y voit des films fantastiques, bon vous connaissez tout ça. Et puis il y a tout un monde de gens qui font vivre tout ça aussi bien dans le cinéma, dans le spectacle mais aussi autour, vous comprenez. Cannes, sans les gens qui vous servent à table, qui refont votre lit à l’hôtel, qui vous donnent à manger, il y a pas de Cannes. Or, tout ce personnel qui est le cœur du Festival de Cannes, sans lequel il y a pas de festival possible, il est maltraité, mais maltraité comme moi-même je ne le savais pas. »
Mais le discours était joli, et tout le monde, même les stars et tout Canal, était d’accord avec Jean-Luc. Aujourd’hui, il nous refait le coup de José Bové, qui avait démonté un McDo le 12 août 1999 et avait pris 3 mois de prison ferme pour son action spectaculaire.
18 ans plus tard, McDonald’s France se porte très bien, les chiffres sont là : 1 380 restaurants (ou fast-foods), 70 000 salariés dont 80% en CDI, un CA de 4,19 milliards, 2 millions de repas servis par jour, 50 000 tonnes de steak haché achetées par an (dont 2 000 de Charolais) à 40 000 éleveurs... Dernière chose, 90% des managers et directeurs adjoints ont commencé comme équipiers. Voilà la brochure maison qui sert de bouclier social aux attaques extérieures.
Pourquoi cette soudaine « défense » de l’enseigne agro-industrielle ? Parce que le symbole est une chose, l’emploi en est une autre. Quand l’enseigne Buffalo Grill a été attaquée par des employés en interne (on a su plus tard qu’il y avait eu une certaine manipulation contre la direction), elle a mis des années à s’en remettre, et pourtant c’était une réussite commerciale française. Certes, dans les deux cas, il ne s’agit pas de Bocuse ou des Frères Troisgros, mais il n’y a pas que les riches qui mangent dehors. Pour info, lorsque McDonald’s a testé le marché français, réputé sensible, en 1971, personne n’aurait parié un kopeck sur son développement ultérieur. Il faut savoir que dans les années 70, des jeunes qui voulaient manger quelque chose de solide, dans la journée, en ville, avec 5 ou 10 francs, c’était tout bonnement impossible.
Il y avait bien le sandwich jambon-beurre des cafés, qu’on appelait avec ironie le « sandwich SNCF », mais il était véritablement dégueulasse : jambon de troisième catégorie, truffé de nerfs et de gras, mince comme un papier calque, beurre rance, baguette de la veille, tranche de gruyère durcie d’un jaune douteux... le tout retiré d’un placard même pas réfrigéré. C’est simple, un jeune ne pouvait pas bouffer dehors avec un maigre budget. Quand les fast-foods ont débarqué, ça a été la ruée, parce qu’on pouvait manger de la viande, même grasse, dans du pain rond, même sucré, avec des frites pour un budget ridicule. C’est le prix abordable en direction d’une clientèle négligée qui a fait le succès de l’entreprise américaine, qui a damé le pion aux professionnels français qui n’ont rien vu venir. La claque géante.
45 ans après, il est trop tard pour pleurer : les tentatives nationales pour reprendre de la part de marché à McDo se sont toutes soldées par des échecs. La seule concurrence « sandwich baguette » industrielle qui marche c’est Subway, mais c’est encore américain. Entre-temps, heureusement, la petite restauration a fait son aggiornamento : les sandwiches ont gagné en qualité, pas toujours pour des raisons de générosité ou de respect de la clientèle, uniquement sous pression de la nécessité. Heureusement, il reste des exceptions ! L’exception culturelle française...
Dans le domaine de l’édition, c’est en 1990 qu’une certaine J.K. Rowling imagine le personnage d’Harry Potter... pour un public qui était négligé par les maisons d’édition, les moins de 15 ans. D’ailleurs, les éditeurs étaient réticents au départ à la publier.
Ce n’est pas un plaidoyer pour le marketing de masse, ni pour les multinationales ; simplement, quand on s’attaque à une entreprise, il faut être sûr de son fait. Les salaires ne sont pas très élevés chez McDo, le stress y est permanent, comme dans tout établissement de restauration. Il faut y avoir bossé pour le savoir. C’est la loi du genre. L’action de blocage d’un fast-food parisien par Mélenchon et ses troupes portait il est vrai plus sur l’aspect multinational que national, fiscal que social.
« McDonald’s est le symbole d’un système général de rapacité, de cupidité des multinationales qui pratiquent toutes la fraude fiscale »
On le sait tous : le système d’une holding permet de défiscaliser ses bénéfices au profit de la maison-mère, faisant perdre aux pays d’accueil beaucoup d’argent en impôts société (75 millions de manque à gagner pour la France et un millliard pour l’Europe). Ce n’est pas pour rien que le siège européen du groupe est situé au Luxembourg. Le problème, c’est l’harmonisation fiscale européenne. L’Union européenne permettant à ses membres d’échapper aux règles communes... qui ne valent, comme toutes les règles, loi et morales, que pour les pauvres. Ainsi, la totalité de la dette grecque dort dans les banques européennes et suisses.
Rien n’est simple. Sauf la démagogie.