Elle est nécessaire voire stratégique, pour exister en tant que puissance au Proche et Moyen-Orient où il se trouve d’autres puissances. La politique arabe de la France est un des volets de la politique étrangère du général de GAULLE.
Quels sont les fondements de cette politique ?
C’est à la fin des années 1920, que le général de GAULLE fort de son expérience personnelle, tant pour l’avoir vu que pour l’avoir vécu, comme il disait dans « l’Orient compliqué », s’ouvre à lui une réalité à laquelle il était sensible par l’extrême fragilité de sa construction résultant d’un accord diplomatique heurtant de ce fait le sentiment national des peuples soumis à une domination étrangère. C’est en prenant contact avec le Liban, qu’il découvre toute la complexité de cette région, il s’exprime en ces termes : « Les liens entre la France et le Liban s’illustrent par leur solidité et leur sincérité. Si la France est investie d’une mission en Orient, le Liban est, de son côté, investi d’une mission en Europe. C’est pourquoi il importe à nos deux pays de demeurer en accord, solidaires, non seulement sur les questions d’ordre pratique, mais également sur les questions politiques. Cette coopération peut aider à restaurer la paix dans la région où se trouve le Liban, et contribuer ainsi à la paix dans le monde ».
Au regard de l’Histoire, telle l’alliance du roi François 1er avec Soliman le Magnifique dont l’Empire s’étendait sur la plupart des pays arabes, le général de GAULLE aura toujours à l’esprit les liens historiques entre la France et l’Orient, développés dans une relation particulière depuis le 15ème siècle jusqu’à aujourd’hui. Prenant en charge toute l’Histoire de son pays, le général de GAULLE ne pouvait qu’en assurer la continuité.
Son expérience politique commença avec l’analyse du rôle des pays du sud et de l’Est de la Méditerranée dans les grands conflits mondiaux. A partir de là, cette région du monde devenait incontournable et devait faire l’objet à l’avenir de projets et d’approches d’une politique étrangère française. Sa politique arabe va véritablement débuter à son retour au pouvoir en 1958.
Quel préalable à une politique arabe ?
A cette période, la politique française est dominée par la guerre d’Algérie qui n’en finit pas, provoquant ainsi la rupture des relations diplomatiques de la part de plusieurs Etats du Proche-Orient. Cela entravait naturellement tout développement des relations franco-arabes. Dans ce contexte difficile, la France prendra quelques initiatives vis-à-vis du Proche-Orient, notamment par la signature d’un texte le 22 août 1958 afin de régler le problème de l’indemnisation des actionnaires de la Compagnie du Canal de Suez.
Au Proche-Orient, l’application du principe d’autodétermination du peuple algérien prônée par le général de GAULLE dans son discours du 16 septembre 1959, fera son chemin dans les milieux politiques, économiques et intellectuels qui pensent réellement à son aboutissement. Cependant, sur les réalités nationales au Proche-Orient, le général de GAULLE n’a cessé de montrer la volonté de rétablir un équilibre rompu avant lui et nous livre un véritable plaidoyer à travers ses Mémoires d’espoir, il écrit : « Si l’existence d’Israël me paraît très justifiée, j’estime que beaucoup de prudence s’impose à lui à l’égard des Arabes. Ceux-ci sont ses voisins et le sont pour toujours… »
Le rééquilibrage de la position politique française au Proche-Orient.
La crainte que les tensions soient un terrain d’affrontements pour les grandes puissances, domine, à travers les rencontres avec de nombreux dirigeants arabes, le Général de GAULLE lance inlassablement un message de paix, d’équilibre et de justice comme le 19 février 1969 lors d’un déplacement en Arabie Saoudite, où il déclare « l’équilibre au Proche-Orient est nécessaire pour l’humanité ». En réalité, la politique arabe du général de GAULLE ne se sépare d’aucune manière de l’ensemble de la politique étrangère, telle la reconnaissance de la Chine ou le rapprochement avec la Russie. Son analyse repose sur plusieurs données essentielles, l’existence d’un nouvel ordre mondial à travers l’émergence du Tiers Monde, l’éclatement du camp communiste, la parité entre les puissances nucléaires. Dans cette perspective, la politique française d’indépendance prend tout son sens signifiant une contestation des blocs Est-Ouest, une résistance à l’hégémonie économique, stratégique et géographique, un dialogue permanent avec toutes les puissances se réclamant de la même volonté d’indépendance, autrement dit, du refus de l’alignement.
L’indépendance nationale ne se divise pas.
La France incarnait un interlocuteur privilégié, par son exemple, elle prouvait que l’on pouvait avoir avec un pays industriel développé, des rapports qui ne soient pas de subordination ou de nature hégémonique. Telle était la leçon que voulait donner au monde le général de GAULLE sur sa politique étrangère.
Le prestige du général de GAULLE dans le monde arabe était immense, les propos du Président égyptien NASSER très éloquents : « l’amitié du général de GAULLE sur laquelle on peut compter ». Il y avait une redistribution des cartes, des contacts étaient pris, notamment une première approche vers les pays du Golfe. Les pays arabes soutenaient la politique du Général de GAULLE, mais cette politique était sans doute plus ressentie par les peuples arabes eux-mêmes, les sociétés arabes et musulmanes se ressemblent entre elles, elles sont solidaires entre elles et ce qui les fascinait avant tout avec le Général de GAULLE, c’est l’image de libérateur de son pays.
En France, la politique arabe n’a pas eu le soutien d’une grande majorité qui ne comprenait pas les choix du général de GAULLE s’inscrivant dans une tradition d’indépendance, leçon capitale qui jalonnera toute la politique étrangère de la Vème république. Lors de son départ, il y aura une évolution significative concernant cette politique qui va renouer avec les traditions et les intérêts de la France. Cette continuité n’a de sens que si l’on admet que le général de GAULLE a puisé ses sources dans l’histoire ancienne des relations entre la France et l’Orient donnant à sa politique une dimension internationale.