Les révélations sur les mauvaises habitudes fiscales des petits luxembourgeois donnent un air de Cahuzac à Jean-Claude Juncker et affaiblissent la Commission européenne tout entière.
Juncker et le Luxleaks : tel est pris qui croyait prendre
Jean-Claude J. avait pourtant démarré la semaine en fanfare, avec force bandaison de muscles et roulement de mécaniques. Après l’annonce de son voyage officiel en Ukraine, il n’avait pas hésité à lancer un défi public aux Britanniques et aux Italiens.
« Je ne suis pas un type qui tremble devant les Premiers ministres, fait valoir le président de la Commission. Ceci dit, il ne faut pas dramatiser, il n’y a pas un conflit, là, entre Renzi et Juncker. Nous ne sommes pas des petits enfants. Je n’ai pas de problème particulier avec Renzi, que j’apprécie pour le reste hautement. Je n’ai pas de problème avec Cameron ; M. Cameron a un problème avec les autres Premiers ministres. »
Chic ! Ça allait être la bagarre !
Pour mener à bien son entreprise de reconquête politique de l’opinion européenne, Juncker avait d’ailleurs décidé de sabrer dans les effectifs du porte-parolat de la Commission, pour obliger les commissaires à faire eux-mêmes le job et descendre dans l’arène.
Voilà qui partait donc sur les chapeaux de roue…
Patatras ! la presse américaine torpille la Commission européenne
Puis… le consortium américain de journalistes d’investigation (ICIJ), relayé en France par Le Monde, lâche sa bombe : par l’entremise du cabinet Pricewaterhouse Coopers (qui se fait ici une publicité en or pour tous les candidats à l’optimisation fiscale), 340 grandes entreprises multinationales auraient négocié depuis de nombreuses années des accords fiscaux secrets (système dit de tax ruling) avec le Luxembourg pour bénéficier d’une optimisation fiscale. Cette information, qui ne pose pas de problème juridique mais qui révèle une conception très… luxembourgeoise de la coopération économique et politique dans l’Union, percute de plein fouet Jean-Claude Juncker, ancien Premier ministre luxembourgeois pendant plus de quinze ans.
Voilà une révélation qui en dit long sur les fondamentaux européens du président de la Commission. Les lecteurs de ce blog n’en seront toutefois pas surpris.
On s’étonnera quand même un peu de deux points. Premier point : la dépendance de l’Union vis-à-vis du cabinet américain PWC. C’est un peu comme si Barack Obama demandait à la BNP de gérer les comptes de la Maison Blanche. Deuxième point : l’opportunité du moment où ces révélations tombent. Les Etats-Unis voudraient affaiblir (encore un peu plus) l’Europe à un moment critique, ils ne s’y prendraient pas autrement.