À la fin du mois, des élèves genevois de 10 à 12 ans découvriront No Place on Earth, un film sur la Shoah pourtant réservé aux plus de 16 ans à l’entrée de la salle.
C’est la lettre d’information « Correspondances » de l’enseignement primaire genevois qui l’annonce. Jeudi 27 mars, les élèves de 7P et 8P (10 à 12 ans) auront droit à une projection gratuite de No Place on Earth, sur demande de leurs professeurs auprès de Donna Adiri, coordinatrice du Festival international du film juif de Genève, qui programme ce long-métrage. « Aucune connaissance préalable de la Shoah n’est nécessaire », précise « Correspondances ». Racontant comment cinq familles juives ont survécu à la Shoah en se terrant dans une grotte en Ukraine, le film est décrit comme un document poignant sur les heures sombres du siècle dernier. « Une contribution substantielle au cinéma sur l’Holocauste », témoigne le magazine américain Variety .
« Courtes scènes de violence »
Seulement voilà, quelques parents ont dû grincer des dents en découvrant sur le site Internet des Cinémas du Grütli, où il sera projeté, que ce docu-fiction est interdit aux moins de 16 ans ! Comment un tel écart entre l’âge d’admission légal et celui des élèves est-il possible ?
Il s’agit en réalité d’une classification d’office qui ne tient pas compte du contenu du film, explique le Département de l’instruction genevois (DIP). En clair, le cinéma ne s’est pas offert les services de la commission ad hoc qui aurait pu abaisser l’âge d’admission. Reste qu’à cause de la dureté du sujet et de « courtes scènes violentes », le film est tout de même jugé inapproprié pour les moins de 13 ans (PG-13) par la Motion Picture Association of America. Par comparaison, un film d’action comme Taken, multipliant bastons et scènes de torture, avait la même classification. Quant à l’Allemagne, qui fait souvent office de référence pour la classification suisse, elle réserve ce film aux plus de 12 ans.
« Le sujet est difficile, mais les images ne sont pas choquantes », estime pourtant Donna Adiri. Quant au DIP, il précise bien que la projection sera « encadrée » pour ne pas laisser les petits digérer seuls un contenu potentiellement choquant. Contactées, des membres d’associations de parents d’élèves locales jugent un peu précoce d’envoyer un enfant de 10 ans voir un film sur le sujet, même s’ils affirment se réjouir de la sensibilisation des enfants à l’histoire de la Shoah. « Ma fille est en 8P, et va sur ses 12 ans. Elle a la maturité nécessaire. Mais des petits tout frais de 10 ans ? Pas sûr… » confie une maman.