C’est la plus grande perte que l’armée britannique ait connue depuis des années. Le plan que concocte le gouvernement de coalition (libéral-conservateur) visant à redresser les comptes publics (155 milliards £ de déficit) va infliger aux forces armées britanniques plus qu’une sévère correction, une radicale cure d’amaigrissement. On n’est plus ici dans le domaine de petites mesures conjoncturelles. Il s’agit d’opérer un véritable changement de focus stratégique.
Douloureuse facture à éponger
C’était d’ailleurs une promesse de campagne. La facture laissée par les travaillistes avoisine les 72 milliards de £ (soit deux années budgétaires), explique-t-on du coté du gouvernement, et oblige à agir de façon décisive. Le principe défendu par le ministre de la Défense Liam Fox, est que l’armée britannique ne peut plus se permettre de faire demain tout ce qu’elle faisait hier.
La coupe est d’autant plus drastique que le chancelier de l’Echiquier (ministre des Finances) a obtenu lors d’un arbitrage du Premier ministre que si le programme du Trident se ferait, il serait supporté par le budget du ministère de la Défense (et non comme c’était la règle par le budget général).
Particulièrement ironique, le Daily Telegraph (proche des conservateurs) explique que l’armée va perdre ses "big boys toys - fast jets, tanks, all-singing and dancing warships". On ne saurait être plus illustratif. Et cela pourrait donner des idées ici ou là...
D’ici la fin août, un plan sera présenté au Conseil de sécurité nationale qui aura pour charge de le préciser. Et l’ampleur des coupes sera annoncée au Parlement dans le cadre de la révision stratégique enclenchée sous le précédent gouvernement.
La RAF trinque, le Tornado en retraite anticipée, le Typhoon raboté, l’Airbus A400M sauvé.
Première victime des coupes : la Royal Air Force, qui va revenir à un format qu’elle n’avait pas connue depuis le début de l’autre siècle, dit-on de l’autre coté de la Manche. Elle devrait perdre près de 300 avions revenant à une force d’environ 200 avions, selon nos confrères britanniques, et un sixième de ses hommes (7000). La flotte des 120 bombardiers Tornado va passer à la trappe. Ils devaient être révisés pour tenir jusqu’à 2025. Terminé ! = 7,5 milliards d’économisés £. Le nombre d’avions de chasse Eurofigther Typhoon diminue de 40% (il passera de 160 commandés à 107 = 1 milliard £. Le projet des avions de surveillance Nimrod MR4 - maintes fois retardé - est sur la sellette . En revanche, le programme Airbus A400M passe sans encombre le grill budgétaire puisque les Britanniques devraient confirmer les 22 avions actés à Palma de Majorque. Ils sont destinés à remplacer toute la flotte des 36 Hercules (épuisés par dix ans d’engagement intensif en Irak et en Afghanistan).
Les Royal Marines fusionnés avec les Paras
La Marine n’est pas en reste. Elle devrait contribuer avec 2 sous-marins, 3 navires amphibies, 100 officiers supérieurs et 2000 marins. Quant à l’armée de terre elle verra sa flotte de véhicules blindés (environ 10.000 aujourd’hui) diminuer de 40%. Et une brigade de 5.000 hommes va être supprimée, après 2015 (date programmée par le gouvernement Cameron pour le retrait définitif d’Afghanistan). Dans le collimateur, la 7e brigade blindée ou la 20e brigade blindée, stationnées en Allemagne. Les bataillons d’infanterie seront resserés, passant de 600 hommes à 750 (une des leçons de l’Afghanistan).
Last but not least, le corps d’élite des Royal Marine pourrait quitter la Navy pour rejoindre les terriens et être fusionnés avec les bataillons parachutistes pour former une seule unité... Shocking !
Les industriels priés de se serrer la ceinture
Les troupes ne sont pas seules à trinquer. Les industriels également. Le ministre, Liam Fox, a déjà annoncé la teneur aux industriels de la défense. Vous allez devoir vous serrer la ceinture. Quelques contrats, basés sur un partenariat public-privé, sont dans le collimateur (on parle d’une coupe d’au moins 20 milliards de £) : le remplacement des hélicoptères de "search and rescue", concédé à un opérateur privé par le précédent gouvernement travailliste (3), mais guère prisé par les conservateurs, est ainsi compromis, tout comme l’académie de défense ; le programme d’entretien des ravitailleurs en vol — 14 Airbus A330 — ne devrait, lui, la vie sauve que grâce à l’engagement en Afghanistan.