Le rappeur Kimto Vasquez a récemment sorti un nouvel album, dans lequel une chanson intitulée Tonton du café du commerce sortait quelque peu de l’ordinaire du rap français. Dans ce texte, auquel nous avions consacré un article, l’auteur composait un éloge de quelques personnalités que la bien-pensance médiatique se plaît à diaboliser avec un certain acharnement. Interrogé par un web-magazine sur ses références politiques, Kimto Vasquez a mis un point d’honneur à ne pas fuir la question...
Extrait de l’interview :
« Question : Il y a un titre marquant, c’est Tonton du café du commerce, où tu as un regard radical sur le monde. Tu cites Dieudonné, Céline, Frêche, Faurisson, tu dénonces les francs-maçons, les sionistes, le complot du 11 Septembre. Tu n’avais pas de telles positions avant ?
Kimto Vasquez : J’ai toujours été prudent dans les sujets politiques. J’avais conscience que ça me dépassait et je n’avais pas assez de source pour développer une opinion et du coup je fermais ma gueule. Courant 2011, j’ai voulu comprendre le cas Dieudonné et j’ai pris le temps de faire mes recherches. J’ai commencé par Internet avec des vidéos de conférences. Puis j’ai élargi à la lecture d’auteurs de différentes époques. C’est ce qui justifie la teneur des propos de Tonton.
Q : Tu n’as pas peur d’être récupéré politiquement ? Alain Soral t’a cité récemment…
KV : Non, je suis un libre-penseur. On est à une période où la pensée unique se resserre, où il y a une répression qui ne transparaît pas beaucoup dans les médias de masse. Il y a de la censure, du boycott voire de la persécution. Il y a des artistes et des penseurs aujourd’hui en France qui sont persécutés et c’est aussi le cas dans d’autres pays d’Europe. Je me sens solidaire de ces gens-là, ils n’ont pas de plans particuliers, ils sont réalistes. Il faut voir aujourd’hui qui a les moyens et le pouvoir de foutre le monde dans l’état dans lequel il est. Aujourd’hui, savoir que mon gamin qui a dix jours est déjà endetté et va être racketté par une banque, ça me casse les couilles. J’ai envie que le pays appartienne aux gens de ce pays et non aux banques. »
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Bien entendu, il est à craindre que ce type d’entretien honnête donnant la parole à l’intéressé reste assez confidentiel. Ce qui le sera peut-être moins, c’est la réaction du milieu musical et culturel en général, peu réputé pour sa tolérance à l’égard des positionnements politiques sortant réellement des sentiers battus – à moins bien sûr qu’un silence médiatique total s’abatte mystérieusement sur l’artiste engagé...
Pour exemple, voici l’extrait d’un article paru sur un autre web-magazine, où l’auteur semble suggérer que Kimto Vasquez, loin de s’être « réveillé », est plutôt en proie à une sévère crise de fatigue !
« Mais ce qui frappe, étonne même, et se place d’ailleurs plutôt en décalage avec cette posture d’adulte et de personne mature que tient le rappeur durant une bonne partie de l’album, c’est quand il s’engage clairement, quand il dénonce en puissance. Car, comme il le dit dans le premier morceau, Kimto dispose d’un attachement à la dissidence. Dès que c’est le cas, il fait tout pour se placer en marge de la jeunesse éternelle, du quota institutionnel, de la France rebelle, donneuse de leçons, sans aucune force de proposition et du rap caviar et son p’tit esprit de contradiction. Le problème, c’est que c’est parfois très grossier, comme sur Tonton du café du commerce, la 3ème piste. Dans cette dernière, il se plaît à dénoncer d’une manière assez manichéenne les francs-maçons, le rapport qu’à entretenu la France avec la laïcité, les déficits de liberté d’expression qui ne proposent pas au professeur Faurisson des plateaux TV. Les anti racistes, qui sont cons et tristes, et tout un tas d’arguments directement issues de la galaxie Soral. On y apprend aussi que, aux vues d’la politique d’aujourd’hui, Jean Marie est juste un honnête homme, un patriote, bah oui. Les gauchistes sont des capitalistes qui ne le savent même pas, et, quand il cite Céline, c’est pour son Bagatelle pour un massacre. Tout ça dans une même chanson ne peut former qu’un mélange repoussant rouge-brun à mille lieux de ses opinions et ressentis du temps de Less du Neuf, sur l’immigration, la condition de vie des banlieusards, le questionnement identitaire, la Françafrique, etc. Ainsi, tout l’engagement pro-palestinien du monsieur prend une allure plus ou moins détestable quand il se voit superposé à ce genre de protestations là, et la peur d’y voir un amalgame rapprochant sioniste et juif se fait sentir. Ces thématiques ne sont pas sans rappeler les postures réactionnaires d’un Mysa ou les élucubrations toutes récentes d’un El Matador. Certes, Mysa sait être intéressant et, artistiquement parlant, a de grandes qualités. Certes, c’est quand même bien plus fin que le crachat verbal de Matador. Mais, en plus d’être bancal, ça laisse un mauvais arrière-goût. Bien entendu, cela ne tient qu’à de pures questions politiques, et, si vos convictions se trouvent du côté d’Egalité & Réconciliation, vous ne pourrez que vous montrer heureux. Mais, quand au contraire on rejette profondément ces idéaux-là, et que l’on retrouve un rappeur que l’on a apprécié durant plus de 10 ans avec Less du Neuf, que l’on apprécie d’ailleurs encore aujourd’hui, faire sa promo chez Soral, ça fout les glandes. Une évolution idéologique qui témoigne de sa situation fatiguée, lassée, mais qui pourra en déstabiliser plus d’un. »
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La chanson diabolique :
Les paroles :
Allons neveu anesthésié du divertissement.
Tonton vient t’parler du meilleur des investissements.
Une cervelle !
Clair, net, la dégénérescence qui guette.
Va falloir changer de disquette.
La mienne a mangé l’virus un soir de déprime.
J’ai creusé si profond pour m’évader du paradigme
Et depuis, mon p’tit, depuis…
Je crois plus ou moins l’ contraire de tout ce qu’y est dit…
I
Ton tonton vient de Meudon, repère devenu racine,
Vieux rappeurs des rues de Louis Ferdinand Céline.
« Bagatelles pour un massacre », qui dit mieux ?
Hauts-de-Seine… même les morts sont dangereux.
Neveux, tonton s’est réveillé tard et c’est maintenant ou jamais
Juste histoire de crever debout, digne et sans regrets.
Il n’est jamais trop tard pour celui qui a senti
Que le diviser pour régner profite à un seul ennemi.
Tonton n’est pas content, ses neveux sont des gauchistes.
Ils ne voient pas qu’ils sont déjà capitalistes.
Et cons et tristes comme une campagne antiraciste
Conçue et financée par des sionistes…
Tonton n’est pas content mon neveu mais il résiste
La maison fait pas trop dans le « moi je » matérialiste
Y en a qui rêve neveu, de Miami, des Bahamas
Y en a qui rêve de Jérusalem libre et d’Caracas.
Allons neveu, anesthésié du divertissement.
Tonton vient t’parler du meilleur des investissements.
Une cervelle !
Claire, nette, la dégénérescence qui guette.
Va falloir changer de disquette.
La mienne a mangé l’virus un soir de déprime.
J’ai creusé si profond pour m’évader du paradigme
Et depuis, mon p’tit, depuis…
Je crois plus ou moins l’contraire de tout ce qu’y est dit…
II
Ton arc républicain n’a plus ni flèche ni corde
Certifié Fouquet’s, fête de la Concorde
Encore plus de norme, encore plus de désordre
Un fait divers, une loi, vrai qu’un cabot pourrait mordre
Ta théorie du moins pire ? Fumisterie
Même les théories de complot jactent moins de conneries
Mon neveu, c’est feu m’sieur Georges Frêche qu’avait raison
Les campagnes électorales c’est fait pour faire voter les cons.
Mon neveu, en 2002 j’ai eu si peur du retour du führer,
Putain d’Alzheimer ! J’ai voté pour l’bruit et l’odeur !
Tonton s’est trahi,
Écœuré, ex-réfugié politique par dépit… dans l’écologie !
J’te l’dis bonhomme, en somme, aux vues d’la Politique aujourd’hui…
Jean-Marie est juste un patriote, un honnête homme, bah oui
Et on parlera des phoques, des dindes et des ours
Quand on aura plus à craindre les banksters et les bourses.
Allons neveu, anesthésié du divertissement.
Tonton vient t’parler du meilleur des investissements.
Une cervelle !
Claire, nette, la dégénérescence qui guette.
Va falloir changer de disquette.
La mienne a mangé l’virus un soir de déprime.
J’ai creusé si profond pour m’évader du paradigme
Et depuis, mon p’tit, depuis…
Je crois plus ou moins l’contraire de tout ce qu’y est dit…
III
Neveu tu te crois athée…
Mieux que croyant tu es crédule
Même chez tes parents les bisounours font des émules.
Tu m’expliqueras le danger des mollahs et des curetons
Quand tu sauras m’dire c’que glandent vraiment les francs-maçons…
Tu t’crois athée… désolé tu es croyant
Ma secte est millénaire, la tienne a 110 ans
Tu m’parleras de démocratie, de liberté d’expression
Quand j’verrai à la télé le professeur Faurisson.
Tonton n’est pas content mon neveu, il est lucide
De nos jours neveu être curieux c’est du suicide
Dieu ne m’a pas fait ambitieux, pas un cerveau liquide
J’sens l’grand tournant, j’vois du vent combler du vide…
Quand il y aura une sentence digne du pouvoir qu’ils exercent
Tonton niera l’bon sens du café du commerce…
Et… j’croirai leurs histoires du 11 septembre
À la prochaine canicule à Dunkerke au mois de décembre.
Allons neveu, anesthésiés du divertissement.
Tonton vient t’parler du meilleur des investissements.
Une cervelle !
Claire, nette, la dégénérescence qui guette.
Va falloir changer de disquette.
La mienne a mangé l’virus un soir de déprime.
J’ai creusé si profond pour m’évader du paradigme
Et depuis, mon p’tit, depuis…
Je crois plus ou moins l’contraire de tout ce qu’on m’dit…