Le Premier ministre israélien Benjamin Netanyahou a limogé mardi deux ministres centristes jugés trop critiques et a appelé à des législatives anticipées qui pourraient lui permettre de former un gouvernement encore plus à droite.
La Knesset, le Parlement israélien, commencera mercredi à examiner un projet de loi de dissolution. La procédure pourrait s’achever le jour même ou lundi, selon la radio publique.
Dès mardi soir, M. Netanyahou a précipité la crise en limogeant les deux principaux frondeurs de son gouvernement de coalition, le ministre des Finances Yaïr Lapid, figure du centre-droit et champion de la classe moyenne, et la ministre de la Justice Tzipi Livni, qui incarne le centre-gauche.
"Dans l’état actuel des choses, je ne peux pas diriger le pays", a déclaré M. Netanyahou en conférence de presse. "Ce gouvernement, depuis sa prise de fonction, a été marqué par les confrontations", a-t-il dit, accusant M. Lapid et Mme Livni d’avoir "agi contre le gouvernement de l’intérieur". "En un mot, ça s’appelle un putsch".
Le parti de M. Lapid, Yesh Atid, a conspué un "acte peureux" et un porte-parole a affirmé à l’AFP que les quatre autres ministres de cette formation allaient démissionner dans la soirée.
Mme Livni a réagi en affirmant que les élections à venir offriraient aux électeurs le choix entre son "sionisme" et "l’extrémisme" du Premier ministre.
Si M. Netanyahou est décidé à aller vers de nouvelles élections, c’est que les sondages semblent assurer à celui qui a déjà été trois fois Premier ministre de se succéder à lui-même.
Il pourrait même, selon les experts, se ménager une coalition gouvernementale moins turbulente que l’actuelle, en s’élargissant à sa droite, du côté des ultra-nationalistes et des formations religieuses.
"Les partis de droite ont la majorité selon les sondages, ce qui signifie qu’il y a de grandes chances que M. Netanyahou conserve son poste", estime le politologue Abraham Diskin.
Une coalition gouvernementale plus à droite pourrait rendre encore plus vains les efforts pour une reprise des négociations sur le processus de paix israélo-palestinien. Ce dernier est au point mort depuis 2000, malgré des tentatives américaines de relance dont la dernière a échoué au printemps.
Si M. Netanyahou cherche à avoir les coudées franches, c’est parce que son gouvernement se déchire depuis plusieurs semaines, notamment sur son projet de loi controversé visant à renforcer le caractère "juif" de l’Etat.
Guerre des chefs
Une fois la dissolution votée, la composition du gouvernement ne peut plus être modifiée et M. Netanyahou se ménage ainsi un cabinet moins turbulent pour gérer les affaires courantes jusqu’aux élections anticipées qui pourraient avoir lieu en mars ou avril 2015.
Pour les médias, une véritable "guerre des chefs" se jouait au gouvernement entre MM. Netanyahou et Lapid, chef de la formation de centre-droit Yesh Atid devenue le premier parti avec 19 députés depuis que le Likoud (18 députés) s’est séparé du parti ultranationaliste Israël Beiteinou (13 députés).
M. Netanyahou avait présenté lundi à M. Lapid cinq exigences pour sauver le gouvernement, parmi lesquelles le retrait de son projet de suppression de la TVA sur les achats immobiliers, la fin des critiques sur la colonisation israélienne à Jérusalem-Est annexée, qui suscitent des levées de boucliers à l’étranger, et le soutien au projet de loi sur l’État "juif".
M. Lapid a rejeté cet ultimatum et accusé M. Netanyahou "d’irresponsabilité" en poussant "à des élections superflues".
Le Likoud est actuellement crédité de 23 sièges, moins qu’en juillet où, en pleine guerre dans la bande de Gaza, les sondages lui en allouaient 31.
Pour former une majorité, M. Netanyahou a d’ores et déjà contacté les partis ultra-orthodoxes, relégués dans l’opposition alors qu’il les considère comme des "alliés naturels du Likoud", selon les médias.
Le Foyer Juif du ministre de l’Economie Naftali Bennett, un parti nationaliste religieux et fervent partisan de la colonisation (12 députés), est présenté comme la formation qui devrait connaître la plus forte progression aux prochaines législatives.
De même, le très populaire Moshé Kahlon, un ancien ministre du Likoud, a créé un parti centriste qui concurrence Yesh Atid sur le créneau de la défense de la classe moyenne. Il pourrait remporter neuf sièges, au détriment du parti de M. Lapid.