Ahmadinejad n’aurait-il pas prononcé un discours historique ? Ce discours que l’on trouve en ligne sur le site de l’agence iranienne, IRIB, nous pensons qu’il nous faut, ici, en donner quelques larges extraits :
"J’ai un amer constat à faire : malheureusement, nous, les Musulmans, nous sommes tombés dans le piège que nos ennemis nous ont tendus ! Nous entrons de plein pied dans une guerre totale, dévastatrice et vaine, une guerre à caractère fratricide, ethnique et tribale, qui pourrait durer des dizaines d’années. Malheureusement, certains pays jouent le jeu des ennemis ! (...) Ceux qui étaient arrivés au pouvoir, pour changer la politique hégémonique des Etats Unis envers notre région, ont tourné leur veste et ils veulent changer notre région, ils nous menacent de guerre (...), je vous renvoie à l’Afghanistan, à l’Irak, la Libye, la Syrie, à Bahreïn, au Yémen (...) dans ces pays qui tire sur qui ? (...) Si nous acceptons que la justice et l’égalité sont le droit de tout un chacun, alors, nous allons accepter que nous sommes tous dans le même bateau, nos destins sont liés. Nous devons nous serrer les coudes, nous entre-aider, pour faire face à l’ennemi commun ; nous devons faire front commun face à nos ennemis".
Cette allocution a été prononcée par Ahmadinejad devant la Conférence de l’OCI, à la Mecque et le président de la République Islamique d’Iran continuait : "L’OTAN rêve de s’emparer de notre région et nous, au lieu d’affronter ce danger, sur la foi de faux arguments, inventés ou imaginaires, ethniques ou tribaux, nous sommes devenus ennemis, sans savoir que ces hostilités gratuites offrent la meilleure occasion à nos vrais ennemis, pour nous envahir...."
Nous ne commenterons pas ce discours mais nous le mettrons en parallèle avec cette révélation du Canard Enchainé parue récemment. Le périodique satirique y révèle l’existence d’une base secrète en Turquie, où Américains et Français formeraient à la guerre civile des « insurgés » syriens. Or, subrepticement, nous apprenions aussi, par la CNN et la BBC, (rien sur les chaînes françaises qui insistent, elles, sur de supposées livraisons d’armes russes et chinoises) que le président américain, Barack Obama avait autorisé la livraison d’armements « lourds » aux rebelles anti-Bachar.
Il semble donc que les choses aillent très vite, puisque le Canard Enchainé révèle maintenant qu’une base de la CIA, qui se voulait être secrète, a été installée en Turquie, non loin de la ville d’Adana, à une centaine de kilomètre de la frontière syrienne. « Là, écrit le Canard, des officiers américains de la CIA, français de la DGSE, turcs et britanniques ont commencé à former des Syriens à l’utilisation d’appareils de communications cryptées ou au tir de missile antichars ».
La proximité de l’importante base d’Incirlik, concédée par la Turquie aux Etats-Unis et à l’OTAN, permet, en plus, l’atterrissage d’avions cargo transportant des armements fournis par le Qatar et l’Arabie saoudite. L’hebdomadaire français précise encore que, « dans le Kurdistan irakien, une unité rebelle est en voie de formation accélérée par des conseiller américains », et qu’une « autre mission » de formation aurait également été confiée à des officiers de la CIA au Kosovo (une République non reconnue internationalement mais qui, on le voit, est devenue une sorte de base américaine et musulmane !). Nous indiquions par ailleurs, dans un précédent article (« le clerc sans guerrier ») que la cellule d’espionnage franco-britannique est, depuis plus de six mois, opérationnelle vingt quatre heures sur vingt quatre.
Dans notre texte sur les élections américaines, nous terminions par douter de la réélection d’Obama, en raison des fonds de campagne déséquilibrés des deux candidats, du rejet chez les latinos et les évangélistes américains du mariage gay. Il va de soi que dans les dernières semaines de la campagne, si réellement Obama se retrouve en mauvaise position dans les sondages, un coup militaire au Moyen-Orient, bien orchestré, l’attaque d’un vieux croiseur américain dans le détroit d’Ormuz ou une accélération du processus de démantèlement de la Syrie ou des troubles au Liban, viendraient conforter le président sortant. Plus que jamais, il est fort probable que ce soient du coup les événements internationaux du Proche-Orient qui, au final, seront les arbitres de l’élection américaine 2012.
La France toujours à la remorque
Quant à la position de la France, le même abandon de la puissance et de la force caractérise, depuis trente ans, sa politique intérieure comme extérieure. Le consensus UMP/PS a toujours été total en politique internationale, depuis François Mitterrand. L’erreur commise pour une puissance moyenne est de placer ses œufs dans le même panier. En choisissant un atlantisme démesuré et donc son camp de manière ostentatoire, on se réserve dans le cas de renversements futurs, inéluctables en histoire, de sérieux revers.
Il ne faut pas être bien malin pour comprendre que les Etats-Unis sont en fait en plein chant du cygne. Il ne s’agit pas de les abandonner car on ne tire pas sur une ambulance mais il s’agit sans doute d’équilibrer les rapports de forces internationaux et diplomatiques, les alliances. Un axe Paris-Moscou nous manque et sérieusement, une instrumentalisation des arabes sunnites dans un conflit avec les chiites n’est sans doute pas une option « gauloise ».
Mais peut-être que, comprenant que de toute façon, on ne pourra plus gouverner un pays devenu anormal, la guerre paraît, pour certains, l’improbable sortie du tunnel ? Admettons mais de toutes manières se poserait alors la question des moyens militaires, de la suspension de la conscription et plus grave, de l’identité arabe et musulmane de multiples citoyens français sur notre sol même.