Les tensions entre l’Espagne et le Royaume-Uni au sujet de Gibraltar ne sont pas nouvelles mais ont connu un nouvel épisode récemment.
La cause ? L’édification, dans la baie d’Algésiras, d’un récif artificiel, formé de blocs de béton, ce qui constitue un obstacle à l’activité des pêcheurs espagnols. Madrid a riposté en renforçant ses contrôles douaniers à la frontière (fouilles de véhicules) et en instaurant un péage routier de 50 euros entre le territoire espagnol et britannique (Gibraltar ne se trouvant pas dans l’espace Schengen) entraînant de nombreux tracas pour la foule des touristes de sa Majesté.
La Royal Navy va déployer quatre navires de guerre dont un porte-hélicoptères, le HMS Illustrious et une frégate, le HMS Westminster qui feront escale dans la région et procéderont à "un exercice de routine et prévu de longue date", explique Londres. Moins diplomate, le ministère britannique de la Défense a affirmé [la volonté] de "démontrer la capacité à mener une force maritime extrêmement efficace n’importe où dans le monde pour protéger les intérêts britanniques ". La presse ibérique y voit une tentative d’intimidation de la part d’un de leur "partenaire européen" et allié de l’Otan.
Un allié argentin ?
L’Argentine, qui revendique comme l’Espagne la souveraineté sur un territoire occupé par le Royaume-Uni (l’archipel des Malouines, 3 000 habitants et plus de 500 000 moutons... mais aussi de potentiels gisements pétroliers en mer), a affiché un vif intérêt pour ce nouvel incident entre Madrid et Londres.
L’Argentine est actuellement membre non permanent du Conseil de sécurité, et pourrait faire cause-commune avec l’Espagne qui étudie l’éventualité de porter le conflit devant les Nations Unies, mais aussi devant la Cour internationale de justice de La Haye.
Une base de l’Otan
Gibraltar est la propriété du Royaume-Uni depuis les traités d’Utrecht de 1713. Cette relique de l’Empire britannique est une position stratégique qui permet de contrôler les flux maritimes entre l’Europe et l’Afrique et entre la Méditerranée et l’Atlantique.
L’essentiel de ce territoire de 7 km2, peuplé de 30 000 habitants, est occupé par des installations de l’Otan : une base aérienne, une base navale servant pour les escales et la réparation des sous-marins nucléaires (dont des bâtiments états-uniens), et des installations de collecte de renseignements et d’écoutes, (notamment des communications émanant de l’Afrique du Nord) pour le compte de la NSA (États-Unis) et du GCHQ - Government Communications Headquarters (Royaume-Uni), contributeurs du vaste réseau d’espionnage Échelon.
L’Union européenne sollicitée
Le gouvernement de Gibraltar a sollicité mardi dans un communiqué, une enquête de la Commission européenne sur [ces contrôles] "menés sans préavis [qui] montrent une nouvelle fois la nécessité d’ouvrir rapidement une enquête de la part de la Commission européenne sur la manière dont agit l’Espagne et la nécessité de prendre rapidement des mesures légales là où elles sont nécessaires".
Les indépendantistes catalans du parti ERC (Esquerra republicana de Catalunya) se sont empressés de soutenir Londres en affirmant "sincèrement regretter la persécution et le harcèlement que le gouvernement espagnol fait subir aux citoyens que vous représentez de manière démocratique (...) afin de faire oublier ses scandales internes politiques et financiers".
Cela n’est pas la première fois qu’Espagne et Royaume-Uni se querellent au sujet de Gibraltar, déjà en 2009 des bâtiments de la Royal Navy obligèrent des navires de la Armada Española à se retirer de zones maritimes revendiquées par les deux nations.