Des milliers de manifestants se sont rassemblés vendredi à travers l’Egypte pour une journée de mobilisation, point d’orgue d’une semaine de sit-in exigeant un changement politique alors que la frustration des Egyptiens va grandissante face à l’armée qui tarde à réformer.
Plus de 28 groupes avaient appelé à manifester pour pousser le Conseil suprême des forces armées (CSFA) -qui dirige le pays depuis la chute du président Hosni Moubarak- à des réformes.
Au Caire, des milliers de protestataires étaient rassemblés place Tahrir, épicentre du mouvement qui a renversé M. Moubarak en février, où ont lieu des sit-in depuis une semaine, a constaté l’AFP.
Les manifestants qui prenaient part à cette journée baptisée "vendredi du dernier avertissement" ont réclamé un plan clair et transparent pour la transition du pouvoir, accusant les militaires de se l’être accaparé.
Un imam a appelé durant son prêche lors de la prière hebdomadaire à juger les policiers responsables de la mort de manifestants au cours des 18 jours de révolte qui ont conduit à la chute de l’ancien raïs, et prononcé une prière en leur mémoire, a rapporté l’agence officielle Mena.
Sanctionner les policiers s’étant rendus coupables d’abus, juger rapidement les hommes forts de l’ancien régime, redistribuer les richesses et mettre fin aux procès militaires de civils figurent parmi les revendications prioritaires des manifestants.
Après être longtemps resté silencieux face à la colère de la rue, le CSFA avait assuré mercredi soutenir la révolution et ses idéaux.
Le pouvoir égyptien a en outre cherché à apaiser la contestation en annonçant un report d’un à deux mois des législatives de septembre. Le ministre de l’Intérieur Mansour Issaoui a quant à lui annoncé le renvoi de plus de 650 hauts gradés de la police, dont de nombreux généraux, parlant du "plus grand remaniement de l’histoire des forces de police" en Egypte.
Mais les assurances du gouvernement laissent nombre d’Egyptiens sceptiques : "Nous voulons que nos revendications soient prises en compte, c’est pour cela que nous restons sur Tahrir", a expliqué Ibrahim Aboul Kheir, 25 ans, membre du mouvement du 6-Avril, présent vendredi sur la place emblématique du Caire. A l’inverse, certains groupements comme les Frères musulmans ne s’étaient pas joints à l’appel à descendre dans la rue, en raison des concessions faites par les autorités : "Le gouvernement a le droit à une chance, pour deux semaines", a déclaré à l’AFP le leader Issam al-Aryan.
Mais, ce délai écoulé, les résultats "mériteront soit la gratitude, soit des manifestations", a-t-il dit.
Le gouvernement a par ailleurs annoncé dans un communiqué avoir envoyé des ambulances et des médicaments sur Tahrir pour venir en aide aux manifestants grévistes de la faim.
A Alexandrie, quelque 5.000 personnes ont quitté vendredi la place Qaed Ibrahim, lieu du principal rassemblement, pour aller protester devant le siège de la police, où ils ont appelé à la démission du ministre de l’Intérieur Mansour Issaoui.
A Suez, où l’affluence a été nettement plus réduite que la semaine précédente, des centaines de personnes ont manifesté sur la place Al-Arbaeen. L’armée protégeait l’entrée du canal du Suez.