La création du royaume de Belgique, et les liens de la famille royale belge avec la couronne anglaise.
Le Royaume de Belgique est né de la révolution de 1830, qui s’inscrit dans un climat de crise économique et de tensions sociales en Europe. Notamment encouragé par la révolution "des trois glorieuses" en France qui a vu se mettre en place la monarchie de Juillet et déjà embourbé dans la contestation sociale et l’opposition politique venant de nombreux bords, notamment de l’église catholique qui ne voyait pas d’un bon oeil le règne d’un roi protestant et des libéraux français, le Sud du Royaume-uni des Pays-Bas se rebelle contre le Roi Guillaume Ier et déclare son indépendance.
Les grandes puissances européennes vont alors se réunir à Londres afin de décider quoi faire du cas belge. Guillaume Ier compte pour sa part récupérer le Sud de son royaume et sauver les possessions qui lui ont été octroyées par le congrès de Vienne après la chute de l’Empire français. Il espère pour cela obtenir le soutien de l’Angleterre à sa laquelle sa famille est liée depuis déjà longtemps. Guillaume Ier des Pays-Bas fait en effet partie de la maison d’Orange-Nassau.
Son père était Guillaume V d’Orange-Nassau, fils d’Anne de Hanovre, princesse royale de Grande-Bretagne et d’Irlande. Guillaume V d’Orange-Nassau était arrivé au pouvoir après une longue période de régence exercée par sa mère anglaise. Régent médiocre et faible, il est accueilli en exil en Angleterre lors de l’invasion française des Pays-Bas en 1795. Il va jusqu’à céder les territoires d’outre-mer néerlandais à l’Angleterre, pour empêcher que ceux-ci ne tombent aux mains des Français.
Guillaume est donc un allié inconditionnel, pour ne pas dire presque un vassal de la couronne anglaise, et espère en cette qualité voir accéder ses revendications : récupérer le Sud des Pays-Bas. Cependant, la situation européenne de tension exclut un recours immédiat à la force risquant de déclencher un conflit international. D’autant qu’en Angleterre, la situation politique est instable. Les conservateurs (Tories) font face à une forte opposition libérale notamment à propos de réformes électorales. Ce n’est certainement pas le moment d’envoyer sur le continent des troupes destinées à mater une rébellion elle même d’inspiration libérale. En bref, la situation est des plus délicates, et ce climat va jouer en défaveur de Guillaume, qui sera finalement mis de côté par l’Angleterre, qui préférera jouer la coopération pacifique avec la France du Roi Louis-Philippe, qui quant à elle tient à se montrer comme un partenaire fiable de l’Europe post-napoléonienne.
Le gouvernement provisoire de Belgique va vite comprendre quant à lui que sa survie et dans un premier temps sa naissance en tant qu’état nation dépend du bon vouloir des puissances européennes, et qu’aucune erreur diplomatique ne lui est permise. Vu sa grande vulnérabilité, la Belgique ne peut déclarer l’indépendance unilatéralement. Elle ne peut devenir un état-nation que sous certaines conditions : inspirer la confiance, et adopter un profil bas. Voilà la stratégie que le gouvernement provisoire va adopter.
L’idée d’un rattachement, sera rapidement mise de côté, et on jouera plutôt la formule de l’indépendance et de l’adoption de structures politiques traditionnelles et modérées, c’est à dire une monarchie constitutionnelle plutôt qu’une république progressiste. C’est le Congrès national, élus par 45 000 votants au suffrage censitaire et capacitaire, qui formera la nouvelle constitution et choisira la monarchie constitutionnelle comme régime politique.
La question est dés lors de savoir qui ira sur le trône de Belgique. Le Prince d’Orange, fils de Guillaume Ier est immédiatement présenté par l’Angleterre pour monter sûr le trône de la jeune nation, ce à quoi Talleyrand et la France s’opposeront catégoriquement, d’autant que le fort ressentiment belge vis à vis de la dynastie d’Orange, rend la candidature du prince difficile, voir pratiquement impossible.
C’est le duc de Nemours, fils de Louis-Philippe d’Orléans roi des Français, qui va être présenté comme le candidat favori. Il est dans un premier temps élu de façon catégorique par le Congrès, qui valide la constitution. Mais, Louis-Philippe d’Orléans refuse l’élection de son fils. Si il peut surprendre, ce geste n’a en fait rien d’étonnant. Il faut savoir que le règne de Louis-Philippe est faible. En effet, sa situation comme monarque en France est délicate. Il est dans son propre pays considéré par les légitimistes comme un usurpateur du trône, et va petit à petit faire face à une opposition républicaniste grandissante.
Qui plus est il suscite la méfiance des cours européennes, notamment du fait de son arrivée au pouvoir lors d’un soulèvement populaire, qui lui vaut d’ailleurs le surnom de "roi des barricades". Louis-Philippe Ier n’a d’autre choix que de se plier aux décisions prises à Vienne par les ennemis de l’empire napoléonien, c’est à dire la mise en place d’un état tampon, empêchant toute velléité expansionniste de la France.
La candidature du duc de Nemours a comme effet immédiat de compromettre les relations franco-britannique et affaiblit la position de la Belgique dans les négociations. Les Anglais en profiteront d’ailleurs à nouveau pour proposer la candidature du prince d’Orange. Mais c’est Guillaume Ier lui même, non disposé à abandonné sa souveraineté sur le Sud, qui refuse la candidature de son propre fils. Cette position extrême aura pour résultat d’isoler définitivement la position du monarque néerlandais, mais ne fera que mieux ouvrir la voie au deuxième candidat anglais.
C’est ainsi que l’on propose la candidature de Léopold de Saxe-Cobourg-Gotha. Il est considéré par Talleyrand, non sans raison, comme un agent britannique. Membre par alliance de la famille royale du fait de son mariage avec la princesse Charlotte de Galles, qui mourra en accouchant d’un enfant mort-né en 1817. Notons que Charlotte de Galles était auparavant promise au fils de Guillaume Ier, Guillaume II, qui fût évincé par Léopold notamment grâce à ses relations bien placées. Léopold de Saxe-Cobourg-Gotha connait bien le modèle politique anglais ainsi que la pensée politique conservatrice européenne. Il est qui plus est acquis et partisan du modèle de développement britannique par l’industrialisation et est une figure bien connue de la « High society ». Léopold de Saxe-Cobourg-Gotha est qui plus est le frère de Victoria de Saxe-Cobourg-Saalfeld, elle même mère de la reine Victoria du Royaume-Uni.
Léopold Ier fut franc-maçon, reçu dans des circonstances floues à la loge "l’Espérance" de Berne. Son règne verra très tôt (1832-33) la création du Grand Orient de Belgique, se détachant de la maçonnerie Hollandaise, auparavant dépendante du Prince Frédéric, second fils de Guillaume Ier. Il se fit rapidement le « protecteur spéciale » de la maçonnerie belge. Selon toute évidence, il n’en devint cependant pas Grand Maître comme sa position le lui aurait permit.
Léopold Premier aurait été Chevalier kadosh (30° du rite écossais), bien qu’aucun document ne puisse le certifier. D’autres rumeurs disent encore qu’il aurait fait partie d’une loge anglaise, mais tout ceci ne tient que de la rumeur et ne peut être prouvé. Nombreux documents d’époques ayant disparus, notamment les registres de loges anglaises qui aurait pu infirmer ou affirmer l’appartenance du roi à une telle loge.
Léopold Ier, Roi des belges, se mariera avec Louise d’Orléans, fille de Louis-Philippe Ier, dont le règne s’achèvera en 1848. Le monarque s’exilera en Angleterre ou il vivra jusqu’à sa mort en 1850.
Les dynasties de Saxe-Cobourg-Gotha et Saxe-Cobourg-Saalfeld appartiennent toutes deux à la même maison dite de Wettin qui trouve son origine en Saxe. Pour l’anecdote, notons que durant la première guerre mondiale, la famille royale anglaise prit le nom de Windsor, afin de masquer cette origine germanique. On remarquera qu’ils conservaient ainsi leur initiale originelle, W. pour Wettin. Les Orange-Nassau quant à eux, en la personne de la reine Béatrix, règnent encore sur les Pays-Bas. Il est intéressant de noter que la reine Béatrix possède la double nationalité britannique. (La reine Béatrix est par ailleurs l’invitée régulière (?) du groupe de Bilderberg)
En observant les armoiries de Léopold Ier (en tête de l’article), vous pouvez constater l’appartenance à la maison de Wettin (noir barré de jaune, rappelant la saxe), ainsi que les armoiries de la couronne britannique (3 léopards et Lyre d’or). Le lion, emblème de la Belgique serait issus des armoiries des ducs de Brabants, mais il est aussi l’emblème des Wettins, maison qui régna sur de nombreux pays d’Europe, et dont les descendants règnent encore aujourd’hui sur l’Angleterre et la Belgique.
Sources :
- "Nouvelles Histoire de Belgique", 2005, Ed. Complexe.
- "Léopold Ier, le roi franc-maçon", Jean van Win