« Mort l’enfant qui vivait en moi,
Qui voyait en ce monde-là
Un jardin, une rivière
Et des hommes plutôt frères
Le jardin est une jungle,
Les hommes sont devenus dingues
La rivière charrie les larmes,
Un jour l’enfant prend une arme
Balles sur l’ambassade,
Attentat grenade
Hécatombe au ministère
Sous les gravats, les grabataires. »
Renaud, Morts les enfants (1986)
Boycotter Israël est interdit
Le boycott d’Israël est interdit en France en vertu des diverses lois contre la discrimination.
Est jugé discriminatoire le fait d’entraver « l’exercice normal d’une activité économique quelconque » en opérant une distinction entre les personnes notamment « en raison de leur appartenance ou de leur non-appartenance à une nation déterminée » (Articles 225-2, 2° et 225-1 du Code pénal).
Boycotter Israël est donc passible « de trois ans d’emprisonnement et d’une amende de 45 000 € » (Articles 225-2 du Code pénal).
Dans les faits, on retrouve quelques condamnations légères de particuliers ou d’entreprises pour ce motif ; des organismes comme le BNVCA [1] ou l’association Avocats sans frontières [2] se sont portés parties civiles dans ces affaires et ont obtenu gain de cause.
Quelques exemples historiques du boycott
Le boycott économique par la Ligue arabe existe depuis 1945 [3] ; il faisait initialement suite au boycott de la main-d’œuvre arabe sur les terres conquises par le Fonds national Juif (FNJ, ou KKL).
Ce boycott de la Ligue arabe se renforce en 1948 après la création d’Israël ; est interdite toute relation commerciale ou financière entre les États arabes et Israël.
En 1951, le boycott s’officialise par la création du Bureau central du Boycott à Damas afin d’en coordonner les actions et d’en accentuer l’intensité. Jusqu’à la fin des années 70, l’intégralité des pays de la Ligue arabe appliquent et respectent le boycott.
L’Égypte est le premier pays à renoncer au boycott en 1980 suite à l’insistance de nombreux diplomates israéliens après la signature du traité de paix israélo-égyptien (1979).
Le processus de paix rendu officiel, le boycott par la Ligue arabe s’amoindrit : en 1994, il n’était plus que partiel ; en 1995, la Jordanie et l’Autorité palestinienne l’abandonnent. En 2005, l’Arabie Saoudite et le Bahreïn mettent également fin à leur participation au boycott pour se conformer aux lois des États-Unis et du libre-échange de l’Organisation mondiale du commerce.
On note qu’en 2008, seuls le Liban, la Syrie et l’Iran ont encore recours au boycott économique d’Israël [4].
Côté occidental, le Congrès américain adopte dès 1978 une loi permettant de poursuivre en justice toute société qui se conformerait à un « boycott non-décidé par les États-Unis à l’égard d’un pays ami » ; la France en 1981 puis l’Allemagne en 1990 adoptent des législations similaires.
Il est à noter que le boycott japonais a été longtemps maintenu, les relations commerciales du Japon avec les nations arabes et l’Iran ont d’ailleurs toujours la priorité sur celles avec Israël.
En 2009, en réaction à la guerre de Gaza, les gouvernements sud-américains appliquent un boycott diplomatique contre Israël : la Bolivie s’offusque d’« actes graves attentant à des vies humaines, à l’humanité » et le gouvernement vénézuélien d’Hugo Chávez qualifie les dirigeants israéliens de « génocidaires » et expulse leur ambassadeur.
Quels produits exportés israéliens retrouve-t-on en France ?
Des produits de l’agriculture d’abord depuis 1948, avec une grande prédominance d’agrumes (notamment oranges, pamplemousses et citrons), mais aussi d’autres fruits (avocats, tomates cerises, melons, fraises), légumes (pommes de terre, poivrons, patates douces) et fruits secs (dattes, cacahuètes).
Les marques de référence sont Mehadrin (et sa filiale Jaffa), Carmel, Kedem et Hasat.
Certains de ces produits agricoles peuvent provenir des colonies que l’État hébreu occupe depuis 1967 (plateau du Golan, Beqa’ot), c’est à dire au-delà des frontières d’Israël reconnues sur le plan international.
Des exportations du secteur secondaire ensuite, allant de produits ménagers (produit de beauté Ahava à la boue de la mer Morte ; lingettes nettoyantes imbibées) aux fabrications plastiques (Keter est le premier fournisseur mondial d’articles ménagers en plastique (articles de cuisine, jeux d’extérieurs, boîtes à outils, etc.) et possède les filiales Allibert, Hovac et Curver) en passant par des médicaments (Teva), des machines à gazéifier (Sodastream « les bulles qui ne manquent pas d’air »), des microprocesseurs (filiales israéliennes de Intel à Haïfa) ou des fameux diamants (les plus grandes usines mondiales de polissage sont concentrées autour du quartier de Ramat Gan, près de Tel Aviv).
Le début du code-barres EAN [5] pour les fabrications israéliennes est 729 ; il s’agit des trois premiers chiffres présents sur les étiquettes des produits.
Le « 729 » signifie que le produit a été fabriqué en Israël, mais plusieurs problèmes se posent :
le code-barres n’est pas obligatoire (pour des fruits en vrac par exemple, l’origine « Israël » sur l’étiquette en magasin remplace le code-barres) ;
un produit d’une entreprise israélienne dans les territoires palestiniens occupés n’est pas forcément étiqueté comme israélien (les chiffres du code pourraient être alors 621 ou 625, fabrications syriennes ou jordaniennes) ;
un produit d’une entreprise israélienne fabriqué loin d’Israël et même du Proche-Orient, dans une filiale européenne par exemple, serait étiqueté par un code-barres du pays de la filiale productrice ;
les produits d’une entreprise pro-israélienne mais dont le siège social est situé en Europe ou aux États-Unis ne font aucunement mention de code 729 sur leurs étiquettes : c’est le cas de Coca-Cola (entreprise soutien d’Israël depuis 1967 et interdite dans tous les pays arabes jusque dans les années 80), Nestlé (et sa filiale israélienne Osem), L’Oréal (le groupe industriel français possède trois sites en Israël), etc. La liste est loin d’être exhaustive.
Les derniers chiffres officiels des exportations israéliennes aux États-Unis datent de 2006 : elles étaient de 19 milliards de dollars, soit 44 % de l’ensemble des exportations. Elles avaient alors augmenté de plus de 800 % depuis 1985 [6].
Conclusion
En vertu de la loi française, nous n’avons pas le droit d’appeler nos lecteurs au boycott d’un pays dont nous vomissons la politique – boycott rendu d’ailleurs difficile par le commerce industriel mondialisé où tout est fabriqué par les mêmes et partout : pour exemple, Nestlé à lui seul possède une vingtaine de marque de café (Nescafé, Ricoré, Nespresso), une trentaine de marques d’eau (Perrier, Vittel, San Pellegrino, Quézac, Contrex), des marques de chocolats et biscuits (Crunch, Kit Kat, Lion, Nesquik), des aliments pour animaux (Friskies, Gourmet, Purina, Pro Plan), du surgelé, des laits infantiles, des produits pharmaceutiques et même des lentilles de contact !
Cet article est donc simplement pédagogique et se fixe comme but d’abord d’informer sur l’origine des achats mais également d’inciter le lecteur patriote à acheter des produits français, moins transformés, de provenance certaine et de circuits courts : en cette période estivale, préférons par exemple le délicieux pamplemousse corse aux pamplemousses israéliens ou de Floride ; la tomate cerise française plutôt que son ersatz israélien, italien ou espagnol ; le gant mouillé et le savon noir plutôt que des lingettes jetables imbibées de produits chimiques polluants.
Il va sans dire qu’aucun produit (les fruits secs par exemple) en vente sur Aubonsens ne provient d’Israël ou des États-Unis.