Un mythe a eu la vie dure ces derniers mois : Israël aurait systématiquement prévenu cet été, par téléphone, les habitants de Gaza que leur maison allait être bombardée. Ceux-ci n’auraient eu qu’à s’en aller à temps. Un nouveau rapport d’Amnesty International, publié le 5 novembre, vient aujourd’hui balayer ce qui reste de cette propagande.
Dans les huit cas de destruction de bâtiments par Israël que l’ONG de défense des droits humains a étudiés en détail, aucun avertissement n’avait été donné. Ces frappes aériennes ont pourtant causé la mort de 111 personnes, dont 104 au moins étaient des civils, 62 des enfants. Des familles entières ont été décimées, « ne leur donnant aucune chance de s’enfuir ». Au total, dans la bande de Gaza, ce sont plus de 1500 civils qui ont été tués en juillet et août, dont 519 enfants, selon le dernier décompte des Nations Unies.
Conclusion : « Ces attaques répétées et délibérées contre la population civile constituent des violations du droit humanitaire et des crimes de guerre. Elles témoignent du mépris des forces israéliennes pour la vie des civils palestiniens », affirme Manon Schick, directrice de la section suisse d’Amnesty International, qui enjoint au Conseil de sécurité des Nations unies de saisir la Cour pénale internationale. Pour toute réponse, les autorités israéliennes ont déclaré qu’aucune preuve n’avait été apportée et que ce rapport était « un outil de propagande pour le Hamas et les autres groupes terroristes ». Amnesty qualifie pourtant aussi de crimes de guerre les tirs de roquettes lancés par les groupes armés palestiniens qui ont tué six civils israéliens dont un enfant.
La prise de position d’Amnesty s’inscrit dans le contexte d’un isolement de plus en plus prononcé d’Israël sur la scène internationale. L’opinion publique ne pouvant continuer de fermer les yeux. Les élites européennes, qui persistent jusqu’ici à soutenir sans conditions l’État hébreu, politiquement, économiquement et militairement, commencent à se sentir gênées aux entournures. Et elles pourraient peu à peu fléchir. En témoignent le boycott européen des produits fabriqués dans les colonies, la récente reconnaissance officielle de l’État palestinien par la Suède et les parlements britanniques et irlandais, ainsi que l’intervention de députés français en ce sens. À moins qu’une recrudescence d’actes terroristes palestiniens, à l’instar de plusieurs meurtres à la voiture bélier commis en Israël ces derniers jours, ne serve de prétexte à l’Europe pour renvoyer dos à dos Israéliens et Palestiniens une nouvelle fois.
La radicalisation de nombre d’élus israéliens, assumant de plus en plus ouvertement la poursuite de la colonisation de la Cisjordanie et de Jérusalem-Est et affichant un racisme décomplexé, ne peut cependant que pousser l’Europe à remettre en question son appui indéfectible à Israël. Le jeu dangereux de Benjamin Netanyahu ces derniers jours, qui laisse le champ libre aux extrémistes religieux juifs d’accéder à l’esplanade des Mosquées à Jérusalem-Est alors que les fidèles musulmans s’en voient interdire l’accès, montre le peu de cas que le Premier ministre israélien fait des critiques européennes lorsqu’elles s’en tiennent à des mots. Des mesures coercitives s’avèrent aujourd’hui indispensables.