Barack Obama a demandé au Congrès américain d’avaliser la guerre contre le groupe État islamique en Irak et Syrie pour trois ans, tout en promettant que les États-Unis n’enverraient pas leurs soldats combattre dans une opération terrestre d’envergure.
Le président américain, dans une déclaration, a engagé une offensive politique pour convaincre des élus sceptiques de soutenir sa stratégie pour vaincre les djihadistes de l’EI.
« Se débarrasser de ces terroristes va prendre du temps, surtout dans les zones urbaines. Mais notre coalition est à l’offensive. L’EI est sur la défensive et l’EI va perdre », a-t-il lancé.
Barack Obama souhaite pouvoir engager les forces spéciales, mais il veut rassurer les Américains qu’aucune « nouvelle intervention terrestre d’envergure au Moyen-Orient » ne sera lancée, écartant ainsi le spectre d’une nouvelle guerre d’Irak après celle qui a coûté la vie à près de 4 500 soldats américains entre 2003 et 2011 [et plus de 500 000 morts parmi les civils irakiens, NDLR].
Il avait transmis peu avant une requête au Congrès, sous la forme d’une résolution « pour autoriser l’usage limité des forces armées américaines contre l’État islamique en Irak et au Levant », un document que le Congrès devra amender et, espère la Maison-Blanche, adopter à la plus grande majorité possible dans les prochains mois.
Barack Obama n’a évidemment pas attendu l’autorisation parlementaire pour commencer cette guerre contre les djihadistes. Les avions américains les bombardent depuis le 8 août en Irak, et depuis le 23 septembre en Syrie. Selon le président américain, plus de 2000 frappes aériennes ont été menées. Environ 1830 militaires assistent déjà les forces irakiennes sur le terrain.
Six mois d’opérations militaires conduites en vertu des pouvoirs de commandant en chef de Barack Obama, et fondées officiellement sur les autorisations votées par le Congrès contre l’Irak (2002) et Al-Qaïda (2001), un lien pour le moins ténu.
Depuis six mois, de nombreux élus, démocrates et républicains, dénonçaient une guerre illégale et exhortaient le Congrès à assumer son rôle constitutionnel de déclarer les guerres. La dernière déclaration de guerre formelle date de la Seconde Guerre mondiale, mais le Congrès a depuis autorisé l’usage de la force à plusieurs reprises, notamment au Liban (1983) et en Irak (1991).
Le nouveau document abrogerait l’autorisation de 2002 contre l’Irak, et donnerait une base juridique à la guerre contre l’EI, en fixant les paramètres suivants :
l’autorisation courrait trois ans ;
elle vise le groupe EI et « les forces et personnes associées » ;
elle ne comporte par de contraintes géographiques, reconnaissant le fait que l’EI « a annoncé son intention de saisir plus de territoires » que la Syrie et l’Irak ;
elle interdirait des « opérations durables de combats terrestres offensifs ».
Les forces spéciales pourraient ainsi être ponctuellement déployées, par exemple « si nos renseignements font état d’une rencontre entre des dirigeants de l’EI et nos partenaires n’ont pas la capacité de les viser », a expliqué Barack Obama.
C’est cette clause, trop vague pour les uns et trop restrictive pour les autres, qui devrait être la plus débattue au Congrès.
« Ne pas répéter les erreurs du passé »
Les républicains, traditionnellement attachés à l’idée d’un exécutif fort, sont majoritairement hostiles à toute restriction concernant le déploiement de troupes au sol, pour ne pas informer l’ennemi des plans militaires américains et afin de parer à toute éventualité dans un conflit qui s’annonce long.
« Toute autorisation d’usage de la force militaire doit donner à nos chefs militaires la flexibilité et le pouvoir nécessaires pour réussir et protéger notre peuple », a déclaré John Boehner, le président républicain de la Chambre des représentants. « Je suis inquiet que la demande du président ne remplisse pas cette condition. »
Barack Obama « doit expliquer pourquoi il cherche à lier ses propres mains en limitant des pouvoirs qu’il a déjà clamés », a dit Mac Thornberry, président de la commission de la Défense de la Chambre.
À l’inverse, de nombreux démocrates traumatisés par la guerre d’Irak, que beaucoup avaient approuvée avant de le regretter, souhaitent interdire strictement le déploiement de troupes de combat.
« Nous avons la responsabilité d’agir contre l’EI », a indiqué le sénateur démocrate Patrick Leahy, « mais nous devons le faire sans répéter les erreurs du passé, et sans voter d’autorisation illimitée, qui pourrait se transformer en justification légale pour de futures actions contre des ennemis inconnus, dans des endroits inconnus, à une date inconnue ».