Au matin du mercredi 06 février 2013, l’assassinat de M. Chokri Belaïd, 49 ans, leader de l’opposition tunisienne, déchaîne la colère des Tunisiens et pourrait bien bouleverser l’échiquier politique du pays [1]. M. Laurent Fabius, ministre français des Affaires étrangères condamne cet assassinat. Écoutons-le, avant d’écouter M. Chokri Belaïd (qu’il repose en paix) ou d’en lire la traduction juste après. Plus que jamais, le proverbe qui dit « Mon Dieu protégez-moi de mes amis, mes ennemis je m’en charge » est de circonstance, autant pour les Tunisiens que pour les Syriens ! [NdT]
Déclaration de M. Laurent Fabius :
« La Révolution au départ, c’était une lutte pour la dignité, pour la liberté. Et maintenant c’est la violence qui s’installe. Donc, moi je veux condamner de façon extraordinairement ferme ce qui s’est passé en Tunisie – qui est un assassinat politique – apporter mon soutien et le soutien de la France à ceux qui veulent faire arrêter la violence, et dire qu’on ne peut pas laisser se développer l’obscurantisme et la violence. Donc, les Tunisiens, ce sont nos amis, nos frères, nos cousins. Oui, en tout cas… oui, oui, oui, c’est l’obscurantisme qui a tué. Parce que Chokri Belaid était un opposant. C’était un laïc. C’était un avocat. Il avait été menacé, et je ne sais pas qui est à l’origine de cet assassinat. Mais la violence, il faut la rejeter. On ne peut l’accepter nulle part, notamment pas en Tunisie. On ne peut pas accepter ça. Donc, j’espère vraiment que les Tunisiens vont se ressaisir. Le pouvoir tunisien est divisé, il est divisé. Il est divisé parce que vous avez trois composantes. Et puis, il y a l’adoption d’une Constitution qui n’arrive pas à se faire. Alors, le Premier ministre a décidé de changer le gouvernement d’après ce que je comprends, d’aller aux élections ; s’il y a des élections. Il faut que les Tunisiens s’expriment. »
Laurent Fabius, 06/02/2013
Texte original : Vidéo transcrite / « Laurent Fabius condamne l’assassinat de Chokri Belaid »
C’est de nos enfants qu’il s’agit !
Intervention de M. Chokri Belaid :
« Ce sont nos enfants et ils devraient rappeler à M. Ghannouchi sa propre jeunesse. Quand on ouvre nos lieux de cultes, nos mosquées légitimement édifiées pour adorer le Dieu unique… Quand à Tunis on “autorise des agents”, à la solde de criminels US et de l’entité sioniste d’y pénétrer dans le but d’embrigader nos jeunes gens, avant de les “envoyer se faire tuer en Syrie” pour défendre un projet qui n’est pas le leur… Quand on laisse notre pays ouvert à ces voix venues de l’Orient ; ces voix prétendument pieuses, alors qu’elles n’appellent qu’à la “fitna” [sédition, révolte, émeute d’après Wikipédia] et aux illusions… Quand dans notre pays – le pays de Yadh Fadhel Ben Achour [2], le pays des réformes, du progrès, de la prestigieuse mosquée Zitouna [3] et de son université [4] – on laisse entrer ces tenants de la fitna et de l’ignorance… venus aussi des montagnes de Tora-Bora et d’ailleurs… Quand on les laisse prêcher la violence dans les mosquées et les universités de Tunis… s’adonner à la violence… s’accaparer les prières du Vendredi… prononcer leurs discours incendiaires pour inciter à la zizanie, aux assassinats, aux blasphèmes, à la discorde entre nous, et à la négation de notre identité tunisienne… on oublie qu’ils ne savent rien de la Tunisie !
Ils ne savent rien des valeurs de la Tunisie, vieille de 3 000 ans. Ils ne savent rien de Mohammed ben Arafa al-Werghemmi [1316-1401] qui fut le premier à interdire l’esclavage. Les Américains et les Britanniques n’en savent rien ! Ils ne savent pas que cette région du monde a donné la première Constitution et la première Démocratie du temps de “Carthage”. Ils ne savent pas que la première Constitution du monde musulman et de la patrie arabe date de « Ahd El-Aman » [Pacte de sécurité-1857] et que ce pays a fondé la première centrale syndicale sous la présidence de Mohamed Fadhel Ben Achour [1946]. Ils ne savent rien de rien !
Et les voici qui nous apportent les prêcheurs de la fitna et de l’ignorance, pour nous prendre nos enfants, leur laver le cerveau, les armer, les corrompre de leur argent ; jusqu’à ce que l’on découvre que c’est “une affaire montée par des Services du renseignement”, pour la mise à exécution d’un projet US-sioniste ! Oui… “Le projet qui consiste à partager la Syrie” en de multiples petits états divisés sur des bases ethniques : un État pour les Sunnites, un État pour les Alaouites, un État pour les Druzes, un État pour les Chrétiens… Idem pour le Liban, etc. Où est-ce que tout cela nous mène ?
Cela nous mène à offrir une légitimité à l’entité sioniste en tant qu’État juif. L’État n’est plus que religieux ! Nous ne pouvons plus parler ni de patrie, ni d’union ! Nous ne sommes plus affiliés ni à la patrie, ni à la citoyenneté, ni à l’équité ! Nous ne sommes plus fidèles à nos pays ! Nous ne pouvons plus penser “Al dine lil’Lah wal watan lil’jamih” [La religion pour Dieu et la patrie pour tous] !
Observez où tout cela nous a déjà mené aujourd’hui. Observez notre jeunesse délibérément égarée ; le responsable de cet égarement étant “un gouvernement mêlé à certaines transactions”, transactions qui sont la cause de la transformation des maisons de Dieu en lieux d’endoctrinement. Et, c’est notre peuple qui en paie les frais aujourd’hui ! De jeunes adolescents, sans éducation, sans savoir, et sans expérience. Il a suffi d’une “fatwa” lancée par un individu installé sous un “climatiseur” en Orient, en Arabie saoudite, ou au Qatar, capitale de la normalisation avec l’entité sioniste, pour que nos enfants, la chair de notre chair, aient à en payer les frais ! »
Chokri Belaid
Texte original : vidéo / Truth about Syria, publiée le 06/02/2013
شكري بلعيد و حديث غاية في الأهمية عن سورية
Vidéo transcrite et traduite de l’arabe par Mouna Alno-Nakhal pour Mondialisation.ca.