Point de ralliement pour qui veut contempler une carcasse de char Merkava, manipuler un lance-roquettes ou découvrir un véritable bunker creusé dans la roche : le « parc d’attractions » du Hezbollah, dans le village sudiste de Mlita, à une bonne heure de route au sud-est de Beyrouth, attire de nombreux visiteurs, a constaté Alistair Lyon pour Reuters.
Plus réputé jusque-là pour son sens du secret, le parti de Dieu, soucieux de glorifier ses prouesses guerrières, a décidé d’ouvrir au public l’une de ses redoutes inexpugnables du temps de l’occupation israélienne du Liban-Sud.
Perché sur une colline boisée de chênes, ce « Hezbollahland », tout à la gloire des « patriotes » et « martyrs », a attiré plus d’un million de visiteurs depuis son ouverture, en mai, se vantent les guides qui en commentent la visite.
« Si les Israéliens ne nous attaquent pas, nous ne les attaquerons pas. Nous ne sommes pas des terroristes. Nous sommes des gens très pacifiques et nous avons le droit de vivre comme n’importe quelle autre nation », assure d’une voix douce l’un d’entre eux, Ali.
Cumulant son job de guide à temps partiel avec un emploi dans une banque islamique de la localité proche de Nabatiyeh, Ali confie que le parc, qui a déjà coûté quatre millions de dollars, ambitionne de se doter d’un camping, de piscines, de clubs de sport, d’un téléphérique et d’un hôtel cinq étoiles.
Les guides zélés prêchent généralement des convaincus : la foule des visiteurs est essentiellement composée de chiites, même si le parc attire aussi des touristes étrangers, pour lesquels le Hezbollah dispose de guides polyglottes. « On croit au Hezbollah, on croit en son pays, on croit en sa force », s’extasie Sara Nasser, une habitante du village de Haris, en se déclarant remplie de fierté par sa visite.
La visite du parc de Mlita débute par un amphithéâtre où l’on projette une vidéo de sept minutes sur l’histoire du Hezbollah, ponctuée de musique martiale à percer les tympans. Suit la visite d’un musée couvert où sont exposés armes et uniformes capturés sur des soldats israéliens. Sur les murs, des panneaux expliquent l’organisation militaire israélienne, et des photos satellite désignent les cibles du Hezbollah, dont le réacteur nucléaire de Dimona, dans le désert du Néguev. Dehors, dans une cuvette circulaire, s’étale un « cimetière » de chars et pièces d’artillerie israéliens, leurs canons condamnés par scellement dans des murs de béton.
Au centre du cercle, à l’intention des drones, satellites et autres aéronefs-espions, sont dessinés avec des pierres les mots « abysse » et « bourbier » en caractères hébreux géants. Un sentier longe des lance-roquettes et des mannequins grandeur nature de combattants du Hezbollah dissimulés dans les arbres, pour conduire à une cavité creusée dans le calcaire.
À l’intérieur, on peut apercevoir une cuisine, une salle de prière, une salle d’opérations et un espace de vie prévu pour accueillir une trentaine de combattants.
À l’autre extrémité du refuge, qui a nécessité trois ans de forage, selon Abou Abdallah, un autre guide, on débouche sur un point de vue surplombant les villages environnants.
« Les combattants sont les fils de ces villages. Ils ne sont pas venus en parachute ou du ventre de la terre », plaisante le guide, signifiant la chaîne qui unit le Hezbollah et la population.
La visite du parc de Mlita s’achève par la « place de la Libération », un jardin entouré de canons et de lance-missiles, où des marches de pierre mènent à une esplanade dédiée aux « martyrs » du Hezbollah.
On peut imaginer que l’aviation israélienne rasera ces lieux dès les premiers coups de feu de la prochaine guerre, qui ne fait aucun doute pour les visiteurs. « Nous nous attendons à une nouvelle guerre, c’est sûr, même si ce n’est pas maintenant », confie Khadijah Chaar, une étudiante voilée de 19 ans. « Mais nous n’avons pas peur car la Résistance est avec nous, le sayyed est avec nous », assure-t-elle en se référant à Hassan Nasrallah, secrétaire général du Hezbollah.
« Le peuple est avec nous et, à coup sûr, Allah est avec nous ! » ajoute-t-elle.