Lamartine, au temps oublié de l’islamophilie française
13 août 2023 20:04, par Montesquieueuh, c’est un peu poussé... d’une part, l’orientalisme romantique s’inscrit dans un contexte totalement différent. A cette époque l’islam est faible et en décadence, et la France romantique a entamé (avec Bonaparte en Egypte puis avec la conquête algérienne initiée par Charles X, et enfin avec la colonisation républicaine "les races inférieures" etc.), la soumission et la vassalisation des terres islamiques. A cette époque, la France est triomphante, et a répandu la révolution de Madrid à Moscou en 10 ans à peine à la marche de ses soldats. La classe dirigeante française, martiale, se détachant de la vieille tutelle cléricale, chante son indépendance à travers l’agnosticisme et l’attrait pour les autres religions. "Le Maure" devient une figure exotique archaïque qui fait rêver les "touristes" occidentaux en quête d’un arrière-monde. C’est un processus bien connu.
L’Orient devient un marché aux rêves, entre danseuses du ventre et éphèbes à la peau bise, marchands d’esclaves, chameliers et guerriers farouches. On aime d’autant mieux ce qu’on soumet. Et la "religion islamiste" avec sa dureté guerrière et patriarcale ne déplaît pas à la bourgeoisie montante, qui idolâtre aussi les chevaliers du moyen-âge, alors même qu’elle s’acharne a détruire les reliquats de l’Ancien-Régime. Lamartine est loin d’être le seul. Mais quand on les questionne un peu plus sérieusement, Hugo ou Heine -grands chantres de l’Andalousie- sont sans illusions sur le sectarisme islamique. De même que Voltaire en son temps ou Claude Levi-Strauss 200 ans plus tard.
Ce n’est qu’un épisode de plus des "Lettres persanes" de Montesquieu, où l’on découvre que "l’Autre" aussi peut avoir une civilisation complète. Cette considération est rendue possible par l’extrême domination dans laquelle l’Occident moderne se trouve placé. Dans la réalité, l’orientalisme de ces messieurs reste surtout esthétique. Aujourd’hui le contexte a bien changé, et les "razzias des Maures" et le "siège de Vienne" semblent exclure ce genre de détours poétiques.