Pierre de Brague sur Christchurch : "De quelle extrême droite parle-t-on ?"
20 mars 2019 19:21, par TrevLisant depuis longtemps en anglais la presse spécialisée en géopolitique, j’ai constaté depuis deux ans environ l’arrivée massive de commentaires d’extrême droite. Dans les sites peu modérés, les minorités raciales, religieuses ou sexuelles sont largement insultées. Un thèmequi revient régulièrement est la soi-disant intelligence supérieure de l’homme de souche européenne.
Cette émergence de la deep right est souvent présentée comme la raison de la victoire de Trump, mais la presse traditionnelle qui racialise les questions économiques oublie de signaler que les électeurs de Trump dans les états cruciaux de la Rust Belt sont les mêmes qui avait voté Obama.
Ainsi, cette émergence des droites alternatives n’est-elle pas surtout le résultat de la manipulation des élites ? Par une technique moderne, mais connue depuis Alexandre le Grand, on maîtrise le peuple en le divisant (Blancs contre Noirs, musulmans contre chrétiens, femmes contre hommes, Français de branches contre Français de souche, etc.). Ainsi, l’alt-right qui croit maîtriser enfin son destin n’est-elle en réalité menée par le bout du nez ? Un peu comme le FN dont on s’assure qu’il atteigne le second tour de la présidentielle ou les nationalistes ukrainiens qui servent au Maïdan pour virer Yanukovic avant d’être éliminés pour imposer une immigration extra-européenne ?
Les individus, cloisonnés dans un communautarisme artificiel qui entretient la haine de l’autre, sont idéalement influençables. Quelques images bien gérées par les médias et on mène ces personnes au front où elles serviront de chair à canon sans s’en rendre compte.
Etre manipulables à loisir est-ce un signe d’intelligence supérieure ? J’en doute. Comme le dit le nationaliste norvégien Varg Vikernes, l’éthno-nationalisme attire les Européens les moins intelligents. Par conséquent, des scénarii comme celui de Christchurch risquent de se multiplier et les communautés narcissisées vont se rentrer dans le lard à coup de kalachnikov ; un futur à la Yougoslavie qu’avait déjà entrevu Alain Soral.
Je pense qu’un travail d’éducation comme le fait ER est plus que nécessaire, car si les manipulateurs sont les mêmes, ceux qui acceptent de se faire manipuler sont les mêmes aussi. Et, comme le signalait un de mes profs : « Les gens sont manipulés parce qu’ils sont manipulables et sont manipulables parce qu’ils sont narcissiques et ne connaissent rien à l’histoire. »