C’est peut-être le moment de le citer :
"Je n’ai aucune doctrine de châtiment. J’ai une horreur profonde de toute idée de châtiment parce que j’y vois trop le plaisir pervers qu’y prennent les juges, les jurés, les bourreaux, sous la protection de la loi. Ces choses là sont du ressort de la psychanalyse. Je suis plutôt pour qu’on ouvre les prisons et qu’on les supprime. Mais le résultat risque ne n’être pas fameux. Bref, c’est un problème dont je ne sais pas par quel bout il faut le prendre. La seule ligne de conduite que je me trace est de faire la séparation entre ce qui est acceptable, humainement, et ce qui ne l’est pas, ce qui est écrasement intolérable de l’autre, de l’individu qui a autant que vous et moi le droit de vivre, et vivre ne signifie pas ne pas mourir, mais vivre dans une certaine dignité. Les gens qui bafouent cette dignité, je les appelle criminels. Parmi les gens qui exercent le pouvoir, il en est bien peu qui se mettent à l’abri des tentations. J’approuve totalement les Iraniens qui réclament que l’on juge le Shah, qui ont exécuté un ancien premier ministre. Je suis favorable au principe de l’exécution systématique des anciens premiers ministres, comme dans ces tribus nilotiques où les rois sont rituellement mis à mort. Cela moraliserait la profession. Mais je plaisante. Je suis sûr que vous me comprenez. Il y a deux poids et deux mesures, selon ce qu’on a fait, ou refusé de faire. Il y a des gens dont le sort ne m’empêchera pas de dormir, non pas que je me ferais leur bourreau, mais parce que je les ai rangés depuis longtemps dans la catégorie de ceux qui ont fait des choses intolérables, et que je ne tolérerais pas que l’on me fasse."
Lettre à un révisionniste du 17 novembre 1979 dans Une allumette sur la banquise, chapitre 2. Les curieux devineront à qui elle était adressée...