Le moment est venu pour les résistants de ne plus se sentir choqués par les condamnations judiciaires, mais de les envisager une fois pour toutes comme la rançon à payer pour exprimer sa vérité et ses valeurs.
La France de 2015 n’interdit pas la libre expression, elle la taxe pour lui faire quitter le terrain idéologique et intégrer le circuit économique. L’amende judiciaire ne fait que tarifer la parole judiciaire dans l’espoir qu’elle s’autocensure, faute de pouvoir payer son droit à exister.
Toutefois, en décernant un prix-sanction, donc une valeur à la parole qu’elle condamne, la Justice admet implicitement la perte de signifiance symbolique de la condamnation en soi, puisqu’elle a besoin d’être renforcée par une sanction pécuniaire.
En d’autres termes, le prestige symbolique de la condamnation (opprobre social, déshonneur), incarné par le franc symbolique, est mort. La valeur symbolique de la condamnation de justice est remplacée par sa valeur transactionnelle : 10 000 euros pour ta gueule. La financiarisation de la sentence est donc symptomatique de l’entrée du judiciaire dans l’économie de marché : critiquez mais payez.