Il y a beaucoup de caricatures dans cette critique de Girard, comme dans celle de René Pommier.
Par exemple, les grands écrivains dont parle Girard (je pense en particulier à Shakespeare), insistent sur la suggestion de l’objet d’amour (et de jalousie) par un modèle.
Ils n’ont que faire de quelque chose d’aussi trivial et éphémère qu’une érection.
On reconnaît la mauvaise-foi romantique critiquée par Girard lorsque l’auteur allègue, sans argumenter, que "le grand amour, celui qui est de l’ordre de la révélation mystique, échappe aussi au mimétique, c’est-à-dire au poids du social". Bref, il reste encore à l’auteur à prouver que quoi que ce soit d’humain puisse échapper au social, qui se définit par l’imitation, la grégarité et se concrétise dans les conventions (langagière, monétaire, etc.) grâce aux bons soins de l’éducation et de la propagande médiatique...
Pour remettre les choses en perspective, revenons au récit de la mort de Romulus, par Tite-Live et surtout par Plutarque.
Si on adopte le point de vue réaliste (et non surnaturel), on peut y lire un complot des sénateurs contre Romulus, avec la présentation mensongère (par ces sénateurs) de la disparition de Romulus comme une divinisation surnaturelle (que l’on fait gober au peuple).
La mort de Romulus est d’une période historique relativement récente, et ne ressort plus ici de la divinisation spontanée que décrit Girard.
Un girardien conséquent (et donc ni lui ni les chrétiens intégristes qui l’entourent, surtout en Amérique du nord), devrait au moins reconnaître la possibiliité que les élites comploteuses désignent ici un bouc émissaire afin de manipuler et dominer leur peuple.
Comme cela a été le cas avec, par exemple, Oussama ben Laden et Al-Qaïda (ou les Tchétchènes en 1999 pour les explosions d’immeubles en Russie) afin de focaliser l’attention et l’antagonisme sur une cible externe à la société plutôt que contre l’élite interne, renforçant l’unanimité du peuple avec son élite qui peut accroître sa domination.
Sur l’inconséquence girardienne, lire sur Agoravox "Lettre à René Girard sur le 11 septembre 2001" par son élève Luc-Laurent Salvador.
Vu les judicieuses options de l’auteur par ailleurs, on pourrait donc s’attendre qu’ils soit plus girardien que Girard...