Les policiers de Montréal ont la solidarité sélective. Lors du « printemps érable » et des grèves étudiantes de 2012, les policiers ont déployé une force et une violence qu’on n’avait pas vue au Québec depuis les années 70. Pourtant les étudiants affrontaient alors le même gouvernement néolibéral et le même parti politique qu’affrontent aujourd’hui les syndicats d’employés municipaux. Il faut lire à cet effet une lettre ouverte d’un leader étudiant de l’époque à l’intention des policiers municipaux d’aujourd’hui.
Au Québec les flics sont excessivement bien payés et même le simple patrouilleur peut espérer toucher encore plus que deux fois le salaire moyen avant la trentaine. Ce surclassement soudain fait d’ailleurs apparaitre des comportements dangereux. Par exemple, on a vu apparaitre dans les dernières années la notion de profilage social et politique.
Il faut savoir que le but de l’exercice ici est de forcer les employés municipaux à contribuer plus équitablement à leurs fonds de retraite qui sont parmi les plus généreux au monde. Actuellement, les déficits des caisses de retraite sont comblés avec l’argent des contribuables et depuis la crise de 2008, la situation est critique. Il existe un consensus dans la population pour que les employés municipaux contribuent alors que plus de la moitié des salariés québécois n’ont pas eux de fonds de retraite. Cette situation est perçue comme une injustice, non pas sans raison.
Bien que je sois conscient que tout changement profond et radical d’un système ne peut se faire qu’avec l’appui de ce que vous appelez les corps constitués, il m’apparait difficile d’ouvrir le dialogue avec les flics en dehors des moments où leurs privilèges sont attaqués. Il y a des antagonistes de classes quasi insurmontables. Les flics considèrent les étudiants, intellectuels et syndicalistes comme des « gratteux de guitares », des parasites oisifs et rêveurs juste bons à matraquer entre une gorgée de bière et un match de hockey. En outre, ils ne sont pas très férus en politique et ils haïssent profondément tous ceux qui étudient ou enseignent les sciences dites molles. Très peu d’individus issus de leurs rangs ont la capacité intellectuelle d’analyser leurs actions dans un cadre sociologique plus large.
Ce ne serait pas simple de les sortir de la matrice qu’ils défendent de toutes leurs forces.