Il y a 70 ans : l’enfer sur Dresde
15 février 2015 12:41, par Hervé89Mon grand-père en est revenu. Je ne peux que vous retranscrire ces quelques mots chargés d’émotions à l’ occasion de réunions de famille. En tant que petit fils, j’ai été le seul à oser devoir le faire "parler". C’était là un sujet dont il n’était convenu et je ressentais les non-dits de toute une famille avec une culpabilité à ramener cela sur la table. D’un tiroir scellé dont il ne pourra que livrer quelques brides à chaque tentative de reprise malgré mes interdits. De sa mobilisation, les combats, sa captivité, de sa vie de prisonnier, à la libération. Avec un mot sur la langue, tel un doigt sur un interrupteur, qui produit instantanément une paralysie, la mâchoire saisie, nouée, et des yeux à devoir se contenir des larmes de pudeur de tenue d’homme. Ce mot est Dresdes. Quelques minutes de ce mécanisme d’emprise comme à chaque reprise dans un silence d’un émoi familial pour lâcher quelques mots la voie cassée, et entrecoupée de respiration. "Un bombardement incessant, un anéantissement, un immense brasier, la terre tremblait » Je me souviens de son précieux carnet de note de son quotidien auquel il tenait beaucoup. De ce que j’ai compris, il ne pourra le récupérer malgré la toute proximité, sa porte avait « volé », et des murs étaient effondrés, la terre tremblait, et le répétait souvent. Il en était comme sourd, un brasier, un décor où il ne reconnaissait quasi rien, « Jamais, je n’aurai pensé qu’il soit possible de raser une ville comme cela ». « Le bombardement par les américains a anéanti la ville » « c’est dans un immense brasier que nous seront dirigés vers un autre camp. Libérés par les Russes et orientés vers l’Ouest pour rencontrer les américains. Poussés dans les avions, ils atterriront au Bourget. Ce retour sera un véritable choc psychologique. De Dresde, il nous disait aussi que c’était une ville moderne. Il a souffert de ne manger à sa faim et cela le diminuait dans les travaux qui lui nécessitaient de la force. Affecté au transport de charbon à un moment, il fera alors connaissance avec un chauffeur allemand avec qui il liera une amitié salvatrice, et arrivera à pouvoir obtenir qq rations de temps à autre. Jamais, il n’a parlé des allemands en « b…ch », malgré l’occupation par ces derniers de sa ferme. A la réquisition, ces chevaux lui avaient été pris. Je dirai pour ma part, qu’il nous a amené à devoir porter un regard le plus objectif avec en conscience d’hommes, de femmes, enfants de parts et d’autres qui ne voulaient que de paix.