La dictature des petites bites : la voici, nue, sans fard. Elle n’a ni l’élégance des tyrannies d’antan, ni la grandeur tragique des despotismes que l’Histoire, malgré l’horreur, savait graver dans le marbre. Non. Celle-ci est minuscule, plate, bavarde ; elle est l’érection maladive de ceux qui, faute de puissance, règnent par la paperasse, le formulaire, la notification, le décret à deux balles. Le monde s’est livré aux médiocres, et ces derniers ne savent qu’une chose : faire payer à la grandeur d’autrui la petitesse qu’ils traînent entre les jambes et dans l’âme.
C’est une dictature sans panache, où la peur a été remplacée par la honte, et le sang par la paperasse. On n’y tue plus : on y annule. On n’y brûle plus : on y « suspend ». Et dans ce royaume des invertébrés, la grandeur est un délit, la fierté une provocation, et la force une insulte faite au troupeau.
Oui, nous y sommes. Le monde appartient aux petites bites, et leur empire n’aura ni statues ni épopées. Seulement des QR codes, des règlements de copropriété et des injonctions minables, collées sur nos vies comme des contraventions. Et quiconque refuse de s’y plier sera jugé, non pour ses crimes, mais pour avoir rappelé, ne fût-ce qu’un instant, que la vraie puissance existe encore.