Invité par une université, l’ancien secrétaire d’État Henri Kissinger a été interrompu a plusieurs reprises par des étudiants qui ont dénoncé son rôle dans le coup d’État mené par Augusto Pinochet au Chili, et l’ont accusé de crime contre l’humanité.
Venu donner une conférence à la Stern School of Business de New York le 16 octobre, l’ancien diplomate et politologue américain Henry Kissinger a eu droit à un accueil pour le moins mouvementé.
À plusieurs reprises, des étudiants l’ont interrompu pour dénoncer la politique étrangère mise en place par les États-Unis alors qu’il officiait au sein des administrations Nixon puis Ford. « Henry Kissinger, au nom de la Cour pénale internationale, vous êtes un criminel de guerre, vous avez commis un génocide contre la population mondiale ! », s’est écrié un premier protestataire avant d’être escorté hors de la salle.
Comrades at NYU disrupting Henry Kissinger’s talk at the Stern School of Business. #NoWarCriminalsAtNYU pic.twitter.com/FbgkmXGbY3
— Esor(@EsorFas) 16 octobre 2018
Lorsque que le politologue de 95 ans a repris son intervention, un autre étudiant s’est levé pour lui lancer : « Vous avez du sang sur les mains. Qu’en est-il de la population du Chili ? Vous devez vivre avec les conséquences de ce que vous avez fait. » Une fois celui-ci évacué, c’est une troisième étudiante qui a pris la parole. « Vous méritez de répondre de vos crimes de guerre ! Vous méritez de pourrir en enfer ! », a-t-elle hurlé au milieu des signes manifestes de réprobation de l’auditoire.
A disrupter getting escorting as she tells Kissinger to rot in hell. pic.twitter.com/64T4ze1rp5
— Esor (@EsorFas) 16 octobre 2018
Dans le même temps, des manifestants – dont certains membres de l’Internationale socialiste – se sont rassemblés à l’extérieur du bâtiment pour dénoncer les prises de positions controversées de l’ancien secrétaire d’État, notamment son soutien dans les années 1970 au dictateur chilien Augusto Pinochet, qui a emprisonné quelque 80 000 opposants politiques et en a fait exécuter au moins 3 000.
Footage from the protest happening outside. Fuck off fascists. pic.twitter.com/Prm5L64iEU
— Esor(@EsorFas) 16 octobre 2018
La carrière diplomatique d’Henry Kissinger a été marquée par la politique de détente vis-à-vis de l’URSS, qu’il a soutenue dans les années 1970, ou encore par sa négociation de la fin de la guerre du Viêt Nam, ce qui lui a valu le prix Nobel de la paix en 1973. Mais certains hauts faits de l’ancien secrétaire d’État sont bien moins reluisants. Il a, par exemple, orchestré le coup d’État de 1973 contre Salvador Allende au Chili, qui a vu l’arrivée au pouvoir d’Augusto Pinochet. Il est également accusé d’avoir laissé la junte argentine commettre d’innombrables exactions après le coup d’État de 1976, ou encore d’avoir soutenu le génocide du Pakistan contre le Bangladesh en 1971.
Il est également à noter que si Henry Kissinger s’est vu décerner le prix Nobel de la paix pour avoir contribué à la résolution de la guerre du Viêt Nam il a surtout participé à l’escalade du conflit dans les pays voisins, au Laos et au Cambodge. Les États-Unis y ont mené durant quatre ans une des plus intenses campagnes de bombardement de l’histoire, qui a coûté la vie à 100 000 civils. Le vide politique que cette campagne a créé au Cambodge a permis à Pol Pot de prendre le pouvoir et aux Khmers rouges de commettre un génocide qui a fait 1,7 million de victimes, soit plus de 20 % de la population du pays.