Un faux wagon nazi destiné à "déporter les francophones" devant participer ce week-end au plus grand défilé du carnaval de Flandre a suscité l’indignation jeudi parmi les francophones et dans la communauté juive de Belgique.
Pour l’édition 2013, qui débute dimanche, du carnaval d’Alost, une ville située à 30 km de Bruxelles, une association folklorique a eu l’idée d’épingler le patron des indépendantistes flamands, Bart De Wever, et son parti, la Nouvelle alliance flamande (N-VA).
Défendre le "caractère flamand" de cette cité
Cette association a donc construit un faux wagon de marchandises semblable à ceux utilisés par les nazis pendant la Seconde guerre mondiale pour envoyer leurs victimes, surtout les juifs et les tziganes, dans les camps de la mort. Même les fils barbelés y sont, selon des images diffusées jeudi sur les télévisions flamandes. Comme il s’agit, a expliqué l’un des responsables de l’association, de se moquer de la politique "d’une autre époque" du nouveau maire N-VA d’Alost, qui entend défendre à tous crins le "caractère flamand" de cette cité, l’inscription "pour la déportation des francophones" a été apposée sur le wagon.
Le Premier ministre, Elio Di Rupo, revêtu d’un t-shirt aux couleurs de l’arc-en-ciel
A l’intérieur du véhicule d’allure sinistre, qui diffusera en principe de la "musique allemande" au cours des trois jours de festivités, devrait se trouver une marionnette à l’effigie du Premier ministre, le socialiste francophone Elio Di Rupo, revêtue d’un t-shirt aux couleurs de l’arc-en-ciel. Tous les Belges auront compris l’allusion à l’homosexualité du chef du gouvernement, un opposant à la N-VA, et la référence à l’actualité récente, puisque Bart De Wever vient d’interdire aux fonctionnaires d’Anvers, la ville qu’il dirige, de porter ce symbole de la culture gay, au nom de la "neutralité".
Le maire de la ville en officier nazi
Une dizaine de membres de la société carnavalesque défileront à côté du char, en uniforme de SS sur lequel on peut voir le sigle de la N-VA remplacé par "SS-VA", ont-ils expliqué tout sourire. L’affiche du groupe, un photo-montage, montre quant à elle Bart De Wever en officier nazi. Bien que directement visés, les dirigeants de la N-VA, qui récusent tout lien avec l’extrême droite, ne se sont pas offusqués outre mesure. "L’esprit du carnaval, c’est d’exagérer. Mais ici, c’est de mauvais goût", a simplement réagi Bart De Wever.
Un autre responsable flamand, non membre de la N-VA, le vice-Premier ministre libéral Alexander De Croo, a estimé qu’il fallait "aller au carnaval d’Alost" pour comprendre que, si "ce n’est pas toujours de bon goût", cela se passe "dans un contexte où on a l’habitude de se moquer de tout et de tout le monde". "On ne fait pas de la politique quand on qualifie les francophones de manière aussi méprisante, comme des déportés, et qu’on fait allusion de manière scandaleuse à un drame de notre histoire. Il y a des choses dont on ne rit pas", a pourtant affirmé le chef du gouvernement régional wallon, Rudy Demotte.
"Il ne faut jamais banaliser la Shoah et la déportation", a, quant à elle, estimé la ministre de l’Intérieur, la centriste francophone Joëlle Milquet.