Alors que bon nombre d’armes destinées aux rebelles soi-disant « modérés » atterrissent dans les mains d’organisations terroristes comme Daech, un groupe syrien lié à al-Qaïda s’est vanté d’avoir acquis quantité de missiles antiaériens.
Dans une vidéo publiée le 20 novembre sur le Net, des membres du groupe rebelle Ansar al-Islam, considéré par l’ONU comme proche d’al-Qaïda, sont filmés en train de s’entraîner avec des missiles antiaériens à basse altitude 9K32 Strela-2, dans les provinces syriennes de Deraa et de Kuneitra.
« Nous, [membres] du front Ansar-al-Islam, avons établi plusieurs points de défense aérienne pour contrer toute tentative des avions de combat ou des hélicoptères syriens, qui bombardent des parties de la province de Kuneitra. Nous avons un bon nombre de ces missiles », indique un membre de l’organisation djihadiste, alors qu’un de ses acolytes annonce la mise en œuvre, avec l’Armée syrienne libre, d’un assaut imminent contre les forces du gouvernement de Bachar el-Assad.
Si jusque récemment, la distribution de telles armes à des groupes syriens était en théorie proscrite par les États-Unis, une source rebelle haut-placée avait déclaré en septembre au portail d’information indépendant Middle East Eye que Washington avait finalement donné son « feu vert » à l’envoi d’équipement militaire « aux rebelles à travers des routes d’approvisionnement toujours ouvertes [qui passent] par la Jordanie et la Turquie », alors que les forces syriennes et russes intensifiaient leurs offensives sur les zones tenues par des groupes terroristes au nord d’Alep.
Le 23 octobre, le célèbre journal américain The Washington Post évoquait même un projet confidentiel de livraison de nouvelles armes aux rebelles syriens discuté par l’administration Obama.
Mais comment ces armes atterrissent-elles entre les mains de djihadistes ?
Alors que l’origine des missiles obtenus par Ansar-al-Islam pose question, l’organisation spécialisée dans la filature de l’armement Conflict Armament Research (CAR), basée à Londres, a récemment mené une enquête rapportée par le média britannique BBC pour déterminer comment l’organisation terroriste Daech parvenait à rassembler son arsenal.
Pour ce faire, les chercheurs se sont rendus dans la ville irakienne de Qaraqosh, fraîchement libérée du groupe djihadiste, où ils ont découvert une ancienne usine de fabrication artisanale d’armements. Ils y ont trouvé une large quantité d’un produit chimique industriel, exclusivement vendu sur le marché turc, entrant dans la composition d’explosifs, dont ils ont également retrouvé la recette.
« Lorsque nous regardons les armes improvisées et les explosifs faits maison, nous savons qu’ils [les membres de Daech] l’achètent [le produit] par cargos entiers et ils l’achètent principalement sur le marché turc », explique le président du CAR James Bevan à la BBC, ajoutant : « Leurs réseaux de procuration s’étendent jusqu’au sud de la Turquie et ils ont visiblement plusieurs relations très fortes avec de très gros distributeurs ».
Mais ce n’est pas la seule source d’armements pour les membres de l’organisation terroriste. Outre les armes prises aux forces syriennes et irakiennes sur le champ de bataille, Daech bénéficie également de munitions fabriquées dans des usines d’Europe de l’Est, ont découvert les spécialistes en se basant notamment sur leur numéro de série. En interrogeant les pays producteurs, les chercheurs ont établi que le matériel avait été vendu légalement aux gouvernements des États-Unis et d’Arabie saoudite.
Il a ensuite été expédié via la Turquie, dans le nord de la Syrie, à destination de groupes rebelles qualifiés de « modérés », soutenus par les deux pays, combattant le président Bachar el-Assad… avant de finalement tomber entre les mains de Daech.