Une radio de droite qui invite un gauchiste, c’est possible. Du moment qu’ils ont le même adversaire. C’est cette rencontre incongrue à laquelle nous avons assisté, devant notre écran, entre Morillot, flanqué de ses deux journalistes chroniqueurs, et le chien fou Juan Branco, le jeune avocat post-mélenchonniste qui rue dans les brancards de l’oligarchie.
Juan prône une VIe République et une convergence des luttes entre la France des quartiers et la France périphérique (il peut rêver) mais son constat sur le système médiatico-politique est sans appel et conforme à la réalité. On dirait même qu’il sort de la lecture d’une pile de Faits & Documents ! Car nulle part ailleurs dans la presse française les liens entre les membres de l’oligarchie ne sont aussi explicitement mis sur la table.
Eh bien aujourd’hui, Gilets jaunes aidant, ces Français qui ont bousculé non pas la République mais la clique qui l’a privatisée, l’analyse politique profonde entre progressivement dans les mœurs. D’ailleurs, à voir la tête des journalistes classiques en face de lui, sans arguments solides, sans questions véritables, on comprend qu’on est passé dans une autre dimension explicative.
Oui, Juan a du talent, oui il peut en avoir la grosse tête, et alors ? Dali se prétendait génie, et il avait le niveau pour ça, rien de scandaleux. Le problème, c’est quand un Yann Moix se laisse appeler « génie » par une rédaction de Technikart, qui court après sa jeunesse et qui se trompe de talents...
En passant, tout le monde a entendu ce pauvre Yann qui débitait des sornettes sur Michael Jackson, le chanteur qui tirait des gosses dans son château de prince charmant, et qui a dilapidé sa fortune pour acheter le silence des parents plaignants... On parle de 60 à 120 millions de dollars. Il avait les moyens de son vice, le métis (par la science). Chez nous, par exemple, il vaut mieux être ministre quand on est pédophile, ça aide à bloquer les enquêtes et les curieux. Une tradition française, et le nuage tchernobylien du réseau Nihoul-Dutroux s’est arrêté à notre frontière, on sait tous cela.
Mais la pédocriminalité n’est pas l’affaire du jour, l’affaire, c’est la légitimité du président Macron, dont Juan a disséqué le parcours. Effectivement, si Macron est un génie ou un surdoué, ce qu’il croit fermement, alors il est un surdoué du piston dont il a bénéficié. Ce gendre idéal, qui envoie ses sbires dans tout Paris pour affirmer qu’il n’est pas homosexuel, a bénéficié de toutes les fées du Système pour réussir son braquage.
L’éclairage que Branco apporte est un éclairage de l’intérieur, car le jeune avocat de 29 ans, qui a un CV long comme le bras d’un lanceur de javelot, même s’il y a un peu de gonflette, fait partie des cercles parisiens de pouvoir. Pas au niveau d’un Macron ou d’un Niel mais il a côtoyé ou rencontré ces personnages, il est issu du même terreau. Et ce qu’il envoie sur eux est une information qu’on n’a pas l’habitude d’entendre sur nos ondes et encore moins dans nos télés. On est au-delà des petites révélations sans conséquences du Canard enchaîné, qui fait semblant de balancer mais qui ne touche jamais aux réseaux de pouvoir.
Des miettes, mais jamais la baguette !
Avec Branco, qui a l’avantage d’être invité dans les médias classiques, comme Bégaudeau, c’est une nouvelle possibilité qui s’ouvre pour le journalisme. ou du moins pour l’édification du grand public. Nous, on a l’habitude de ce tissu d’informations, mais pas le grand public. D’ailleurs, les deux comparses de Morillot, qui du coup fait bien son boulot parce qu’il laisse parler son invité, il ne le coupe pas comme un vulgaire Cohen ou un vulgaire Ruquier quand ça commence à chauffer, sont restés scotchés sur leur chaise.
Il y avait d’ailleurs un contentieux à régler entre L’Express et Branco, l’hebdo de Patrick Drahi ayant (logiquement) descendu l’anti-macroniste en flammes.
On a là une image très claire d’un saut de conscience informationnel. L’info à la papa, à la Express ou à la Incorrect, c’est fini. Ou alors il faut évoluer, et vite, parce que les Gilets jaunes courent devant, papa, et ils tirent tout le Système vers l’avant. Ils l’étirent aussi, le mettant en tension et révélant ses faiblesses. Ça peut donc craquer, et ça va craquer selon Branco. C’est aussi la conclusion de Youssef Hindi, dont on a mis la dernière analyse en ligne hier.
Big up à Morillot qui honore le journalisme – on est loin du trio dépassé Lemoine-Cohen-Lescure – et à Sud Radio qui permet d’entendre une nouvelle musique. Si Sud et Maïsto continuent sur cette lancée, c’est le RMC de Drahi qui va souffrir...