Le nationaliste populiste Tomislav Nikolic a remporté dimanche contre toute attente l’élection présidentielle en Serbie, le président sortant Boris Tadic admettant sa défaite avant même l’annonce des résultats officiels.
"Je le félicite pour sa victoire méritée. Je lui souhaite du succès", a déclaré M. Tadic à l’adresse de son adversaire.
M. Nikolic a obtenu 50,21% des voix contre 46,77% pour M. Tadic, selon des résultats partiels portant sur environ 41% des bulletins dépouillés, présentés par la Commission électorale centrale.
M. Nikolic a immédiatement tenu à rassurer quant à l’option européenne de son pays.
"La Serbie maintiendra sa voie européenne (...) Ce scrutin n’a pas porté sur qui conduira la Serbie vers l’UE mais sur qui résoudra les problèmes économiques créés par le Parti démocratique" (DS) de M. Tadic, a dit M. Nikolic, jadis allié à l’ex-homme fort de Serbie, Slobodan Milosevic.
Son alliance avant le deuxième tour avec un parti résolument hostile à l’UE avait été utilisée par ses opposants pour mettre en doute le sérieux de son engagement en faveur de l’adhésion au bloc des 27.
"Il s’agit d’un séisme électoral, de résultats totalement inattendus", a commenté l’analyste politique Slobodan Antonic, faisant allusion aux sondages qui prédisaient une large victoire de M. Tadic.
Pro-européen fervent, M. Tadic, 54 ans - qui a conduit la Serbie, isolée politiquement et économiquement dans les années 1990, au seuil de l’UE - a affirmé qu’un éventuel abandon de la voie européenne représenterait "une erreur tragique".
La Serbie s’est vu octroyer en mars le statut de candidat à l’intégration dans l’Union européenne et attend d’obtenir une date pour le début des négociations.
Pour ce faire, M. Tadic avait livré au Tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY) les anciens dirigeants politique et militaire des Serbes de Bosnie, Radovan Karadzic et Ratko Mladic, inculpés de génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre. Il avait également amélioré les relations de Belgrade avec le Kosovo, comme le réclame Bruxelles, sans toutefois reconnaître l’indépendance proclamée en 2008 par la majorité albanaise de ce territoire.
M. Nikolic, 60 ans, un populiste reconverti en pro-européen après avoir longtemps contesté une telle option pour son pays, avait misé notamment sur le mécontentement grandissant de la population en raison de la situation économique dégradée en Serbie, où le chômage touche 24% de la population.
Pour lui, la ligne rouge à ne pas franchir reste néanmoins l’indépendance du Kosovo, que la Serbie refuse de reconnaître. Après l’annonce des résultats, il a affirmé que ceux-ci montraient que la Serbie "allait protéger ses citoyens au Kosovo".
Tard dans la soirée, à Belgrade, des milliers de personnes ont célébré le succès de M. Nikolic - battu par M. Tadic à la présidentielle en 2004 et 2008 -, dans le centre-ville brandissant des drapeaux serbes et des portraits du vainqueur.
Sa victoire, représente aussi un test pour la coalition gouvernementale convenue avant ce scrutin entre le parti de M. Tadic et les socialistes, deuxième et troisième forces parlementaires, à l’issue des élections générales du 6 mai.
Disposant du plus grand nombre de députés, 73 sur les 250, M. Nikolic va certainement tenter de former une majorité avec les socialistes autour de son parti.
Sceptique, le sociologue Vladimir Vuletic voit venir une "sérieuse crise" politique avec un risque de "tensions et désaccords entre le président et le gouvernement".