Le député maire de Sarcelles, François Pupponi, successeur de Dominique Strauss-Kahn, porte-parole auto-proclamé de la banlieue, veut faire de sa ville un laboratoire vivant de la France de demain. Ils se garde pourtant bien de faire la promotion de certaines de ses recettes, des plus nauséeuses pour tout républicain qui se respecte. Dans une ville « communautarisée », selon ses propres termes, la réaffirmation des principes républicains devrait d’autant plus être de rigueur. C’est le contraire qui est pratiqué. L’exemple le plus édifiant et le plus scandaleux est celui de la « liste bleue », intégrée en grande pompe à la majorité municipale. Petit retour historique.
2001, dans une communauté juive inquiète de la recrudescence de l’antisémitisme, quelques personnalités locales ont la brillante idée de monter une liste communautaire aux élections municipales : la liste bleue. Ils tentent au préalable une négociation avec DSK et Pupponi selon les termes suivants. La communauté juive représente une partie importante de la classe moyenne d’une ville en voie de paupérisation, elle doit à ce titre contrôler les compétences municipales clés. Le bon sens l’emporte à l’époque, la demande est jugée irrecevable et la négociation échoue. La liste bleue se constitue donc et se présente devant les électeurs. 45 colistiers triés sur des critères religieux, sinistre première. Le but affiché : mettre la liste de gauche en ballottage et négocier entre les deux tours. DSK qualifiera pendant la campagne cette liste de « honte pour la république »*. Malgré un score plus qu’honorable : 13,54%, le « front communautaire juif » ne parvient pas à ses fins, la liste Pupponi-DSK est réélue au premier tour avec 58% des voix.
Les républicains et les laïcs sont soulagés… pas pour longtemps, car la partie n’est pas terminée, la liste bleue revient à la charge. Au lieu d’enterrer cet honteux épisode, Pupponi reprend le dialogue avec Gérard Uzan, chef de file de la liste bleue, qui siège en compagnie de deux colistiers au conseil municipal. La tactique de Pupponi, validée par DSK, est simple : cette alliance amène les voix d’une majorité de la communauté juive, de moins en moins encline à voter à gauche. En l’échange de son soutien aux candidats socialistes locaux, la liste bleue intègre la majorité municipale. Peu importe si cette tactique conduit à faire reconnaître et valider institutionnellement le communautarisme le plus intégral, seul le résultat compte. Devant les premiers signes d’alliance, certains communistes, partenaires des socialistes locaux, se rebiffent en distribuant un tract peu reluisant intitulé « le baiser de Judas »… Ils finiront pourtant par avaler la couleuvre, qui aura considérablement grossi entre les deux élections municipales.
2007, DSK est en difficulté aux législatives face à Sylvie Noachovitch. Entre les deux tours, on sollicite la liste bleue, qui signe un tract et le distribue à dessein, aux abords de la synagogue et dans les boîtes aux lettres sur lesquelles est inscrit un patronyme juif… DSK est réélu avant de s’envoler pour le FMI. 2008, élections municipales, la liste bleue réclame son dû. Pupponi paie rubis sur l’ongle en intégrant trois anciens de la liste bleue sur sa liste, délégations clés à l’appui. Gérard Uzan aura en charge l’action sociale, Fabienne Sroussi le logement, Charles Souffir le développement économique via la vice-présidence de la communauté d’agglomération. Voyant les portefeuilles principaux leur échapper, les partenaires de Pupponi, médusés, n’osent pas désavouer leur chef, tandis que l’opposition hésite à dénoncer cette alliance, les accusations d’antisémitismes peuvent fuser à tout moment.
Pourtant, il y en aurait à redire. La liste bleue a constitué son propre groupe au conseil municipal. Fabienne Sroussi, juive pratiquante, porte la perruque et ne serre pas la main des hommes, ce qui est son droit, du moins tant qu’elle n’est pas élue. Car la laïcité en France prohibe tout signe religieux ostentatoire chez les représentants de l’Etat et interdit que l’on traite différemment les citoyens. Mais à Sarcelles, en plus de ne pas pouvoir vous loger dignement, crise du logement oblige, si vous êtes un homme, vous n’aurez même pas droit à une poignée de main de la part de l’élue de référence.
De son côté, Charles Souffir, ancien Sarcellois habitant aujourd’hui Neuilly sur Seine, arbore la kippa en toutes circonstances. Riche entrepreneur, il possède à Sarcelles un immeuble, le Francilien, où il loge, contre loyers, des services municipaux. Un conseiller municipal qui fait des affaires avec sa propre municipalité, quoi de plus normal ? Après tout, l’emprunt pour financer la construction de son immeuble a été garanti par la communauté d’agglomération du Val de France, dont il est aujourd’hui le vice-président. En charge du développement économique, il peut peser dans les décisions d’implantations d’entreprises avec lesquelles, peut être, « travaillera-t-il ». Le communautarisme se double ici d’un mélange des genres sur lequel la justice ne saurait tarder à se pencher.
Enfin, à l’action sociale, Gérard Uzan, est un médecin respecté mais un politicien illuminé. Déjà colistier de DSK en 1990, il s’était alors rendu coupable de la plus odieuse des diffamations envers le maire RPR de l’époque en déclarant « en souvenir des six millions de nos frères morts dans les camps, nous n’avons pas le droit de voter pour Raymond Lamontagne ». Ce dernier, décoré comme résistant , portera plainte et la justice condamnera Gérard Uzan . Les associations de déportés auraient pu en faire autant : instrumentaliser la mémoire de la Shoah pour diffamer un adversaire politique, quelle horreur… !
Aujourd’hui Pupponi, réélu à 69%, peut être fier de lui. Il n’a jamais perdu une élection. Il a, de plus, fait d’une pierre trois coups, bafouant tout à la fois les règles élémentaires de la laïcité, de la probité et du respect de la dignité des personnes. Il a ouvert la boîte de pandore du communautarisme politique en montrant la voie aux intégristes de tous bords : « pesez électoralement et vous obtiendrez tout ce que vous voudrez ». Et dire que cet apprenti sorcier veut faire de Sarcelles un laboratoire de la France de demain. Au secours !
Bernard Lanra, citoyen sarcellois républicain.
Source : http://www.communautarisme.net
*Le Parisien, Edition Val d’Oise, 4 mars 2008.
2001, dans une communauté juive inquiète de la recrudescence de l’antisémitisme, quelques personnalités locales ont la brillante idée de monter une liste communautaire aux élections municipales : la liste bleue. Ils tentent au préalable une négociation avec DSK et Pupponi selon les termes suivants. La communauté juive représente une partie importante de la classe moyenne d’une ville en voie de paupérisation, elle doit à ce titre contrôler les compétences municipales clés. Le bon sens l’emporte à l’époque, la demande est jugée irrecevable et la négociation échoue. La liste bleue se constitue donc et se présente devant les électeurs. 45 colistiers triés sur des critères religieux, sinistre première. Le but affiché : mettre la liste de gauche en ballottage et négocier entre les deux tours. DSK qualifiera pendant la campagne cette liste de « honte pour la république »*. Malgré un score plus qu’honorable : 13,54%, le « front communautaire juif » ne parvient pas à ses fins, la liste Pupponi-DSK est réélue au premier tour avec 58% des voix.
Les républicains et les laïcs sont soulagés… pas pour longtemps, car la partie n’est pas terminée, la liste bleue revient à la charge. Au lieu d’enterrer cet honteux épisode, Pupponi reprend le dialogue avec Gérard Uzan, chef de file de la liste bleue, qui siège en compagnie de deux colistiers au conseil municipal. La tactique de Pupponi, validée par DSK, est simple : cette alliance amène les voix d’une majorité de la communauté juive, de moins en moins encline à voter à gauche. En l’échange de son soutien aux candidats socialistes locaux, la liste bleue intègre la majorité municipale. Peu importe si cette tactique conduit à faire reconnaître et valider institutionnellement le communautarisme le plus intégral, seul le résultat compte. Devant les premiers signes d’alliance, certains communistes, partenaires des socialistes locaux, se rebiffent en distribuant un tract peu reluisant intitulé « le baiser de Judas »… Ils finiront pourtant par avaler la couleuvre, qui aura considérablement grossi entre les deux élections municipales.
2007, DSK est en difficulté aux législatives face à Sylvie Noachovitch. Entre les deux tours, on sollicite la liste bleue, qui signe un tract et le distribue à dessein, aux abords de la synagogue et dans les boîtes aux lettres sur lesquelles est inscrit un patronyme juif… DSK est réélu avant de s’envoler pour le FMI. 2008, élections municipales, la liste bleue réclame son dû. Pupponi paie rubis sur l’ongle en intégrant trois anciens de la liste bleue sur sa liste, délégations clés à l’appui. Gérard Uzan aura en charge l’action sociale, Fabienne Sroussi le logement, Charles Souffir le développement économique via la vice-présidence de la communauté d’agglomération. Voyant les portefeuilles principaux leur échapper, les partenaires de Pupponi, médusés, n’osent pas désavouer leur chef, tandis que l’opposition hésite à dénoncer cette alliance, les accusations d’antisémitismes peuvent fuser à tout moment.
Pourtant, il y en aurait à redire. La liste bleue a constitué son propre groupe au conseil municipal. Fabienne Sroussi, juive pratiquante, porte la perruque et ne serre pas la main des hommes, ce qui est son droit, du moins tant qu’elle n’est pas élue. Car la laïcité en France prohibe tout signe religieux ostentatoire chez les représentants de l’Etat et interdit que l’on traite différemment les citoyens. Mais à Sarcelles, en plus de ne pas pouvoir vous loger dignement, crise du logement oblige, si vous êtes un homme, vous n’aurez même pas droit à une poignée de main de la part de l’élue de référence.
De son côté, Charles Souffir, ancien Sarcellois habitant aujourd’hui Neuilly sur Seine, arbore la kippa en toutes circonstances. Riche entrepreneur, il possède à Sarcelles un immeuble, le Francilien, où il loge, contre loyers, des services municipaux. Un conseiller municipal qui fait des affaires avec sa propre municipalité, quoi de plus normal ? Après tout, l’emprunt pour financer la construction de son immeuble a été garanti par la communauté d’agglomération du Val de France, dont il est aujourd’hui le vice-président. En charge du développement économique, il peut peser dans les décisions d’implantations d’entreprises avec lesquelles, peut être, « travaillera-t-il ». Le communautarisme se double ici d’un mélange des genres sur lequel la justice ne saurait tarder à se pencher.
Enfin, à l’action sociale, Gérard Uzan, est un médecin respecté mais un politicien illuminé. Déjà colistier de DSK en 1990, il s’était alors rendu coupable de la plus odieuse des diffamations envers le maire RPR de l’époque en déclarant « en souvenir des six millions de nos frères morts dans les camps, nous n’avons pas le droit de voter pour Raymond Lamontagne ». Ce dernier, décoré comme résistant , portera plainte et la justice condamnera Gérard Uzan . Les associations de déportés auraient pu en faire autant : instrumentaliser la mémoire de la Shoah pour diffamer un adversaire politique, quelle horreur… !
Aujourd’hui Pupponi, réélu à 69%, peut être fier de lui. Il n’a jamais perdu une élection. Il a, de plus, fait d’une pierre trois coups, bafouant tout à la fois les règles élémentaires de la laïcité, de la probité et du respect de la dignité des personnes. Il a ouvert la boîte de pandore du communautarisme politique en montrant la voie aux intégristes de tous bords : « pesez électoralement et vous obtiendrez tout ce que vous voudrez ». Et dire que cet apprenti sorcier veut faire de Sarcelles un laboratoire de la France de demain. Au secours !
Bernard Lanra, citoyen sarcellois républicain.
Source : http://www.communautarisme.net
*Le Parisien, Edition Val d’Oise, 4 mars 2008.