L’interview, donnée par le pape François dans plusieurs revues jésuites, a suscité un grand enthousiasme dans les médias et en même temps de nombreuses interrogations. Pour les lecteurs de Zenit, Mgr Tony Anatrella (photo ci-contre) met en perspective le discours du Saint-Père après avoir donné la semaine dernière quelques repères pour comprendre les propos de Mgr Parolin sur le célibat (cf. zenit du 16 septembre 2013).
Mgr Tony Anatrella est psychanalyste et spécialiste en psychiatrie sociale, consulteur des Conseils pontificaux pour la famille et pour la santé, membre de la Commission internationale d’enquête sur Medjugorje de la Congrégation pour la doctrine de la foi, il enseigne et consulte également à Paris.
Zenit : Quelles ont été vos premières réactions à l’interview du pape François ?
Mgr Tony Anatrella : Je ferai trois remarques.
1. Quelle est la nature de ce texte ? Il s’agit d’une interview et non pas d’une encyclique et encore moins d’une Instruction adressée à toute l’Église. Le Pape s’exprime librement sur divers sujets en soulignant l’importance de la miséricorde. Il se livre aussi personnellement comme pour mieux se faire connaître.
2. Les commentaires qui s’en sont suivis dans la presse viennent obscurcir et fausser le sens de sa parole. Le texte de 30 pages qu’il faut lire, est d’une grande richesse et aborde divers sujets concernant son histoire personnelle, son ministère ainsi que les écrits des théologiens, des philosophes et des romanciers, voire d’artistes qui l’ont intellectuellement nourri. Les médias n’ont retenu que quelques fragments de paragraphes qui vont dans le sens de l’air du temps. Ils recomposent ensuite un autre récit en oubliant l’essentiel du message. N’est-ce pas une manœuvre pour valider et justifier des situations qui ne devraient plus être considérées comme des problèmes dans la société actuelle ? Une fois encore on assiste à une manipulation du discours qui frôle la désinformation. Les propos du Pape ont subi le même sort que ceux de Mgr Parolin alors qu’ils sont des signes de contradiction.
3. François insiste sur le fait qu’il est nécessaire de s’occuper des « blessés » et d’être attentif à leur besoin spirituel là où des médias ont fait croire que le Pape invitait à délaisser les « dogmes » pour s’intéresser aux personnes. En réalité, c’est une invitation à être proche de ceux qui veulent mieux connaître, aimer et suivre le Christ. François nous dit que l’esprit de magnanimité (être clément) part toujours de ce qui est petit plutôt que d’être contenu par le plus grand. « Ne pas être enfermé par le plus grand, mais être contenu par le plus petit, c’est cela qui est divin. J’ai beaucoup réfléchi sur cette phrase pour l’exercice du gouvernement en tant que supérieur : ne pas être limité par l’espace le plus grand, mais être en mesure de demeurer dans l’espace le plus limité. Cette vertu du grand et du petit, c’est ce que j’appelle la magnanimité À partir de l’espace où nous sommes, elle nous fait toujours regarder l’horizon. C’est faire les petites choses de tous les jours avec un cœur grand ouvert à Dieu et aux autres. C’est valoriser les petites choses à l’intérieur de grands horizons, ceux du Royaume de Dieu. »
Après divers bouleversements culturels qui ont entraîné des crises et des drames humains, voire des choix de vie en forme d’impasse sous le couvert de la libération des mœurs et du libéralisme économique, le Pape François en appelle à « la révolution de la grâce » et souligne que l’Église doit se faire chaleureuse et proche des blessés de la vie, et trouver des voies par lesquelles des hommes et des femmes ne se sentent pas abandonnés et puissent se reconnaître en Dieu.
Une fois de plus, des médias imaginent l’Église à l’image du monde alors que l’Église cherche à ressembler au Christ et à transmettre son message de vie puisqu’il est « la vie éternelle ».
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