Nous mettons en ligne cette assez longue – car très « panoramique » – contribution de Fayez Nahabieh – Syrien établi en France, ingénieur agronome et membre des Amis du Monde diplomatique – sur la situation syrienne telle qu’elle se présentait vers le 10 juillet, jour de l’ouverture officielle du « dialogue national » proposé par le président Bachar al-Assad, au terme de quatre mois de troubles intérieurs. Ce texte, de tonalité assez optimiste en ce qui concerne la sortie de crise, est surtout intéressant par le rappel de certaines données historiques, démographiques et économiques naturellement peu connues de l’internaute français ; Fayez Nahabieh rappelle en effet qu’un des problèmes structurels de la société syrienne est l’explosion démographique de ces deux dernières décennies et le fragile équilibre alimentaire qui en résulte, sans parler des tensions consécutives sur le marché intérieur du travail. On apprend aussi des choses intéressantes sur la structure des forces soutenant le pouvoir, comme sur celle de – ou plutôt des – oppositions. A propos d’opposition, Fayez Nahabieh rappelle un certain nombre de vérités sur les Frères musulmans, seule force vraiment structurée de l’opposition radicale syrienne.
Plus de 100 jours se sont écoulés depuis le déclenchement des événements en Syrie. Personne ne s’y attendait. Les analystes de la radio BBC se posaient presque quotidiennement la question des raisons ayant permis à ce pays d’être épargné par la rébellion arabe.
La réponse est en fait à la fois simple et compliquée. Elle se résume en quelques mots : la Syrie, contrairement aux pays arabes touchés par le mouvement, ne tourne pas dans l’orbite étatsunien (Bahreïn, Egypte, Jordanie, Oman, Tunisie et Yémen), elle a vivement protesté contre la guerre de Bush en Irak, elle soutient la cause arabe, les résistances palestinienne et libanaise et dispose de relations extérieures indépendantes, d’où l’idée répandue qu’elle était immunisée. Sur le fond, ce raisonnement n’est pas faux. Mais en fin de compte, elle n’a pas été épargnée, bien que les circonstances soient différentes.
Ainsi, à partir du 15 mars, le pays est entré en ébullition suite à une erreur flagrante de la police dans une ville de taille moyenne dans le sud (Deraa, Ndlr). La réaction des gens dans la rue a été forte et inhabituelle. On a attaqué et brûlé les biens publics, le palais de Justice, des bureaux de poste, des voitures et bus de transport en commun…. bref, tout ce qui symbolise l’Etat.
Les gens criaient « Hourriyé … hourriyé … (liberté … liberté). » A côté de ce slogan légitime, on a vu des gens qui brandissaient du pain pour dire probablement qu’ils avaient faim. Cependant, ils utilisaient des mobiles satellitaires dont le prix n’est pas à la portée de tout le monde, ce qui contraste fortement avec le symbole du pain.
Les médias arabes et internationaux se sont soudainement et vivement intéressés à la Syrie. L’importance géopolitique du pays est sans doute le moteur principal de cet intérêt. Ensuite, il y a l’impact que pourrait avoir la chute du gouvernement de Damas sur l’ensemble des pays voisins.
Néanmoins, ces médias, qui ont concentré leur effort sur l’aspect immédiatement apparent de la crise (en filmant ou en achetant des reportages décrivant les événements de la rue), n’ont pas accordé assez d’attention aux aspects socio-économiques (démographiques aussi) ou politiques de la société syrienne d’une part, ni à l’ingérence et à la pression étrangère d’autre part (Turquie. Etats-Unis, Europe).
Les événements se sont déclenchés car tout était en « standing up » dans l’attente du bon moment. Les troubles ont évolué graduellement en employant la haute technicité (portable satellitaire de haut de gamme, camera avec zoom, montage, possession et utilisation judicieuse d’archives des guerres du Liban et de l’Irak), et infiltrant petit à petit des groupes armés au sein des manifestants. On a même réussi à induire en erreur l’agence Reuters qui a vendu certains reportages falsifiés à France 2 et à la télé australienne.
Dans cet aperçu panoramique nous tenterons un exercice difficile d’éclairage sur cette question délicate en essayant de traiter les points omis, volontairement ou non, par les uns ou les autres. Nous n’avons pas, bien entendu, la prétention de détenir la vérité.
Nous vivons dans un monde où l’information va plus vite que la lumière, l’instantanéité et la quantité des nouvelles que nous subissons chaque minute ne laissant plus le temps nécessaire à les décortiquer.
1. Les faces cachées
a. Evolution démographique galopante/ difficultés économiques
Malgré tout cela, le marché de l’emploi n’arrive pas à absorber les milliers des jeunes qui y arrivent. La société syrienne est majoritairement jeune. De ce point de vue, la jeunesse est une richesse, mais la croissance économique n’arrive pas à répondre à cette richesse humaine. Il n’est donc pas du tout surprenant de voir une partie de cette jeunesse exprimer sa colère.
Aucun pays au monde n’est en mesure de résoudre cette équation : Natalité accrue et travail. Des études récentes ont montré qu’un des éléments qui bride la croissance de l’économie étatsunienne est la hausse démographique depuis un certain temps.
D’ailleurs, toute initiative gouvernementale afin de remédier à cette inflation s’est heurtée à un mur et aussi à un refus ferme de la part des religieux qui voyaient d’un mauvais œil les incitations et les mesures encourageant la limitation des naissances.
De toute manière, tant que la question démographique n’est pas définitivement résolue, les difficultés persisteront quel que soit le modèle politico–économique choisi.
A titre d’exemple et sans vouloir blesser le sentiment de qui ce soit, est-il normal que l’Irak des années soixante-dix ait accueilli 4 millions d’Egyptiens demandeurs d’emploi. Aujourd’hui, on parle de 2 millions d’Egyptiens en Arabie Saoudite, un million et demi en Libye et nous ne savons combien au Liban ou au Koweït… La question qu’on pourrait poser aux religieux est la suivante : est-ce le rôle d’une nation de « produire » des êtres humains et de les envoyer ailleurs ?
Les pays arabes dits riches – Arabie Saoudite, Oman, Koweit Quatar, Emirats arabes unis – connaissent aussi un taux de chômage colossal. C’est seulement grâce à l’intervention de l’Etat et au soutien du pouvoir public y compris le Conseil coopératif des pays du Golfe, en matière de logement, de soins de santé, de scolarité – et même de frais de mariage – que l’explosion sociale a pu y être provisoirement différée. La manne pétrolière y est pour quelque chose, mais cela n’est pas à la portée de tout le monde. A titre d’exemple, Oman a reçu du jour au lendemain, à peine une semaine après le déclenchement des manifs, un don fraternel de 10 milliards de dollars du Conseil Coopératif. Le 18 mars dernier, par peur d’une contagion au Bahreïn, le roi Saoudien a injecté 70 milliards de dollars dans l’économie de cet émirat.
Quant à la Syrie, outre ses 23 millions d’habitants, elle a dû faire face à l’arrivée en 2003 sous forme des vagues d’UN MILLION ET DEMI d’ Irakiens fuyant "une guerre sans nom" dont le responsable n°1 est un champion tranquille de l’ "Arme du Mensonge Massif ", qui passe sa retraite tranquillement au Texas. Le gouvernement et le peuple syriens ont pris en charge cette population-soeur : logement, soins de santé, travail et scolarité…. Les irakiens se sont intégrés petit à petit et ils n’ont pas l’intention de retourner chez eux en raison des attentats qui n’en finissent plus.
Il y a également en Syrie 500.000 frères palestiniens qui ont été chassés de chez eux depuis 1948 et qui y ont trouvé une terre d’asile. Ils ont bénéficié des mêmes droits que les Syriens et certains parmi eux ont pu accéder aux postes importants au sein de l’état (PDG, directeurs…).
Selon la FAO, la Syrie, qui fait partie des pays en voie de développement, est le seul pays qui a réussi à atteindre l’autosuffisance alimentaire suite à une politique agricole encourageante avec une réforme agraire appliquée très tôt. Toutefois, le pays connait depuis quatre ans consécutifs la plus grave sécheresse depuis un siècle. Le gouvernement se trouve dans l’obligation d’assurer la nourriture de 3 à 4 millions de personnes dans l’Est du pays.
b. Status-quo sur les frontières : lourd et onéreux
A peine la première République arabe syrienne est-elle née, que le pays s’est vu impliqué dans un conflit fleuve (israélo-arabe)aujourd’hui vieux de 63 ans et la sortie du tunnel n’est pas pour demain. Cette implication a nécessité une mobilisation énorme de ses ressources humaines et financières.
En dépit d’une volonté avérée d’aboutir à la paix, toutes les tentatives engagées depuis la conférence de Madrid (1991) jusqu’à maintenant n’ont abouti à aucune solution tangible, ce en raison de difficultés politiques purement internes en Israël, liées au mode de scrutin qui empêche de dégager une vrai majorité d’une part, et à l’absence d’une volonté réelle de la part des Etats Unis et de l’Europe de convaincre l’Etat hébreu de respecter les résolutions de l’ONU, d’autre part.
Le président syrien, découragé par l’attitude euro-étatsunienne, a fini par donner sa confiance à son voisin turc, en raison de sa proximité et de ses relations privilégiées depuis plus de trente ans avec Israël, accordant à Ankara une sorte d’exclusivité afin de démarrer les négociations. Monsieur Rajab Tayyeb Erdogan, le Premier ministre turc, a fini à son tour, après plusieurs initiatives, par jeter l’éponge et reconnaître l’absence d’une volonté réelle de paix chez ses interlocuteurs israéliens.
Ce status-quo est onéreux et pèse lourdement sur un petit pays comme la Syrie, constituant un obstacle réel à son développement.
c. Caractéristiques spécifiques des événements
Si les qualificatifs « révolution », « rébellion », « insurrection » ont été employés a bon droit pour désigner les événements ayant eu lieu récemment dans quatre pays arabes – Egypte, Tunisie, Yemen, Bahrein – les événements de Syrie correspondent d’avantage, eux, à une sédition qu’à autre chose car les séditieux avaient une « feuille de route » : ils ont surfé sciemment sur les réclamations légitimes des citoyens (travail, logement, liberté et amélioration des services de l’Etat…) et ont tenté de récupérer ce mouvement pour des objectifs qui leur étaient propres.
Les préparatifs (notamment des stages d’entrainement militaire et en communication….) ont démarré lors du virage de la Syrie vers une coopération économique large avec l’Iran et la confirmation de son soutien à la résistance libano-palestinienne. La visite du Président russe Dimitri Medvedev en Syrie, en 2010, a été la goutte d’eau qui a débordé le vase car le rapprochement syrien avec son ancien allié est net . Une base militaire maritime russe opère d’ores et déjà sur le littoral méditerranéen syrien, offrant une place de choix aux forces maritimes russes, permettant ainsi à un rêve vieux de 300 ans de se réaliser. Or, ce rêve est en pleine contradiction avec la convention américano-saoudienne signée en 1945 : Pétrole contre Parachute de sécurité.
De quoi s’agit-il ? Les américains reconnaissent la légitimité de la famille royale saoudienne en tant que force dominante dans la région et assurent sa sécurité tandis que celle-ci est invitée à utiliser tous les moyens (carte blanche) afin d’empêcher « l’Ours blanc » de s’approcher des eaux chaudes. La réislamisation de la région a été l’une des armes employées pour réaliser cette politique. Les wahhabites saoudiens via leur nouvelle vitrine salafiste et les différentes branches de celle-ci (Frères Musulmans, djihadistes,…) ont, en effet, accompli impeccablement cette mission, à coup de milliards de dollars, à une exception près : la Syrie. Ce pays demeure le dernier bastion de la diversité et de la laïcité. Il faut donc la corriger, la mettre à genoux et dans cette perspective tous les coups sont permis.
Localisation des événements
Une autre spécificité de l’affaire syrienne est la proximité de la plupart des communes qui ont été le théâtre de troubles, avec les zones frontalières. Deraa (point de départ de la contestation) est à 10 km de la Jordanie, Tell Kalakh est à moins de 5 km du Liban, Banias est une vitrine maritime, Homs est à proximité du désert, Idlib est à 40 km de la Turquie….Douma est dans la campagne de Damas.
C’est à Jisr al-Choughour que l’événement le plus grave a eu lieu. Selon les médias gouvernementaux, plusieurs centaines de djihadistes ont investi la commune, brisant les bâtiments-symboles de l’Etat (la poste, le palais de Justice…) et ont coupé la route internationale reliant Alep à Lattaquié, faisant en outre 123 morts parmi la police et les autres membres des forces de l’ordre. L’entrée de l’armée trois jours plus tard a permis de mettre en évidence trois charniers, à la visite desquels les médias internationaux ont été invités, tout comme le corps diplomatique étranger à Damas. Selon des sites proches du gouvernement, Robert Ford, ambassadeur américain à Damas, a reconnu que ces charniers étaient l’œuvre de professionnels.
Quant aux grandes métropoles (Alep et Damas), qui englobent à elles seules plus de 40 % de la population, elles sont restées calmes, ce qui contraste avec la situation en Tunisie, l’Egypte, le Yémen ou le Bahreïn où l’essentiel des mouvements a eu lieu dans les capitales de ces pays.
d. Rôle des médias
Il est inutile de souligner l’importance primordiale des médias dans la perception de chaque événement dans le monde. A peine les séditieux ont-ils déclenché leur mouvement, profitant d’une erreur grave de la police locale dans le sud du pays, et en dépit des mesures disciplinaires fortes de la part des autorités(arrestation et emprisonnement) vis-à-vis des responsables du détachement de la sécurité coupable des bavures, les médias arabes, notamment les deux chaînes concurrentes , Al Jazeera (financée par l’émirat du Quatar, pays profondément démocratique comme chacun sait) et Al Arabiya (financée par le royaume saoudien, qu’on ne présente plus) se sont jetés sur l’affaire avec une partialité certaine. On a au ainsi droit à des faux reportages (venant, pour une part d’images d’archives du Liban ou de l’Irak), et à des « témoins oculaires » disposant parfois d’une vue excellente qui leur permettait de décrire des événements se déroulant à plus de 300 km d’eux !
Le seuil de rupture avec l’honnêteté journalistique de ces chaînes a été atteint lorsque ces mêmes médias ont fait le « black out » sur les informations provenant de Bahreïn où des lieux de prières ont été rasés et des livres saints ont été brulés (par les militaires saoudiens et bahreiniens).
Patrick Cockburn, correspondant de The Independant pour l’Irak et le Proche-Orient, a été l’un des premiers à souligner que beaucoup de reportages sur la Syrie ont été obtenus sans pouvoir vérifier les sources. (Lire : Don’t beleive anything….The INDEPENDENT, 26.06.2011).
Fabricants de zizanie, semeurs de haines
Le pire a été la retransmission en direct d’un prêche de la prière du vendredi 25 mars par son éminence le Président du rassemblement international des savants musulmans, l’Imam Youssef Quardawi, via la chaîne qatari al Jazeera. Un discours obscurantiste, un prêche indigne, un prêche de haine confessionnelle et sectaire appelant le peuple syrien à se soulever et ensuite à se débarrasser des athées et des laïques. Deux heures de haine, deux heures de non-sens. Dans les jours suivants, Quardawi n’a pas épargné des Imams syriens connus pour leur ouverture d’esprit.
Chez certains docteurs religieux, il y a une certaine confusion entretenue entre la laïcité et l’athéisme. En fait, eux même connaissent parfaitement la différence entre les deux termes, mais ils font l’amalgame exprès depuis 1945 a des fins de propagande. Ils sont à l’image de ceux qui font l’amalgame entre Islam et Islamisme afin de développer l’islamophobie. Il est vrai aussi que la traduction du mot laïcité en arabe est sujette à une certaine confusion pour les citoyens ordinaires, mais pas pour ces théologiens savants qui poussent à outrance, en toute connaissance de cause, cette confusion afin de la transformer en drame.
Les réseaux sociaux ont contribué aussi à cette sédition. Des fatwa de honte ont été décrétées et publiées sur le web. Nous nous limiterons à souligner les plus dangereuses et les plus réactionnaires :
Fatwa de son éminence Cheikh Saleh El Lahhidan, membre du Haut Comité des imams saoudiens. Son éminence a appelé le peuple au Djihad contre le gouvernement syrien quand bien même cela devrait couter à la Syrie le tiers de sa population, soit 8 millions de citoyens [interprétation de l’école Malikite]. Fatwa de son éminence Cheikh Adnan Ar’ar qui a appelé les habitants d’Alep (dans le Nord) à faire face au pouvoir même si cela devait coûter 100.000 morts.
Ces deux cheikhs, choisis parmi d’autres, utilisent You Tube à outrance ainsi que les chaînes satellitaires mises à leur disposition. Ils ne pensent qu’à semer la mort, on dirait que la vie et la joie n’ont plus de place dans leur cœur ou dans leur dictionnaire. Ils nous rappellent les déclarations fâcheuses de certains responsables arabes qui se trouvaient à plusieurs milliers de kilomètres d’Israël et qui étaient prêts à se battre contre cet Etat jusqu’aux derniers soldats égyptiens et syriens.
Pas moins de 125 chaînes satellitaires orientées vers la population arabe (certaines 24 heures sur 24) diffusent exclusivement des émissions religieuses. Est-ce que c’est normal au XXIe siècle ?
L’Islam en Syrie est un islam moderne et réformiste. Les Syriens vivent depuis des siècles dans une harmonie quasi-magique et une tolérance remarquable. Ils ont été élevés dans des écoles laïques. Ainsi, des millions des citoyens du monde viennent dans ce pays pour vivre et partager cette largeur d’esprit. Des millions de personnes viennent assister au « Baptême de tolérance » qui se déroule quotidiennement dans la salle de prière de la mosquée Omeyyade à Damas, où des chrétiens et des musulmans se retrouvent ensemble dans cette salle qui abrite aussi le tombeau de Saint-Jean Baptiste.
Ce n’est pas un hasard, non plus, si des aleppins (habitants d’Alep, Ndlr) musulmans ont exprimé leur chagrin et leur tristesse lorsque les autorités religieuses grecques catholiques ont décidé de déplacer l’icône de saint Georges qui se trouvait dans leur quartier vers la nouvelle église. Il est habituel aussi de voir des citoyens musulmans venir le vénérer dans la nouvelle église Saint-Georges, saint qui, pour eux, porte le nom d’Al Khoudere.
e. Evolution des événements
Si en Egypte, en Tunisie ou au Yémen, le slogan principal des manifestants a été dès le début : « Le peuple veut la chute du Président », en Syrie, le mot dominant a été « Hourriyé…hourriyé…(liberté) ». Les marches de protestation ont ainsi pu attirer l’attention et obtenir une certaine sympathie auprès de la population.
Un peu plus tard et avec l’irruption des hommes armés, bon gré mal gré, au sein des manifestations, le ton a changé et les slogans aussi. L’article du Sunday Times daté du 26 juin est éloquent à cet égard. Il décrit comment des hommes armés ont intégré le cortège d’une manifestation pacifique menée par des chefs de tribus dans la ville de Ma’ret al Nou’man (non loin de la Turquie), qui réclamait à l’Etat plus d’investissements et plus de projets économiques dans leur région.
Les premiers hommes armés intégrant la manifestation ne portaient que des pistolets ce qui est déjà une infraction à la loi. Les chefs de tribus ont pensé que ces armes devaient servir à assurer leur protection. Plus tard, des barbus sont arrivés à bord de pick-up et de voitures sans plaques d’immatriculation avec des fusils et des lances roquettes ; là, les meneurs pacifistes de la manifestation ont compris qu’ils avaient perdu le contrôle et qu’ils avaient été piégés.
Des vies humaines de policiers et de réservistes de l’armée ont été sacrifiées. Ils étaient dans leur caserne au centre-ville.
Et des martyres qui tombent !
Quant aux vies perdues, elles sont nombreuses, mais là aussi les chiffres diffèrent d’une source à l’autre. Les chaînes satellitaires ont pris la fâcheuse habitude de ne pas souligner le nombre de policiers et de soldats tombés lors des attaques des groupes armés. Il aura fallu attendre un reportage de CNN et du Sunday Times pour admettre que le nombre de morts parmi les services de l’ordre est impressionnant.
Selon une information diffusée par CNN le 27 juin, le nombre des vies perdues varie entre 630 et 1 100. Quant aux forces de l’ordre, 400 morts sont à déplorer aussi ainsi que plus de 1 100 blessés.
2. La crise syrienne et le monde
a. La Russie et la Chine : Niet c’est Niet !
En deux mots, la Chine et la Russie sont déterminées à faire barrage à toute résolution de l’ONU, en raison de leurs relations stratégiques anciennes avec la Syrie, et elles ont exprimé publiquement leur satisfaction vis-à-vis de l’ensemble des lois décrétées ou annoncées par Bachar al-Assad, lois qui devront aboutir à une ouverture plus large et une participation plus équitable des citoyens dans la société et la vie politique. A plusieurs reprises, de hauts responsables russes ont déclaré que la Russie soutenait le pays dans sa démarche. Et les responsables chinois sont en phase avec les positions russes. Les deux nations sont irritées par les pays de l’OTAN en raison notamment du dépassement du mandat de l’ONU en ce qui concerne la Lybie.
b. Les Etats-Unis : des positions ambigues
Le 24 avril, c’est-à-dire 40 jours après le démarrage de la sédition, les intentions étatsuniennes ont été cyniquement dévoilées par la conseillère au Pentagone, Mme Michèle Flournoy. Elle était tellement assurée de la réussite prochaine de la subversion menée contre la Syrie, qu’elle avait publiquement déclaré que « la Syrie retrouverait tout son calme, le jour où elle romprait avec l’Iran et le Hezbollah, et signerait un traité de paix avec Israël ! (Lire la lettre du Prêtre Elie ZAHLAOUI).
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Autrement dit, la rue est à la disposition de Washington, si la Syrie exécute ces consignes, TOUT ira bien pour le gouvernement, Sinon… On ne peut plus être plus clair ! Ce message a été formulé aussi directement, selon des médias proches du gouvernement, par le ministère des affaires étrangères émirati aux décideurs syriens.
D’ailleurs ce n’est plus un secret que Washington a financé une partie de l’opposition (CF la chaîne satellitaire Barada) ce dont témoignent des câbles diplomatiques analysés par le Washington Post de 18 Avril dernier.
c. L’administration OBAMA a tranché : Réforme et volontarisme dans la continuité.
Bien que les relations entre les Etats-Unis et la Syrie soient historiquement du genre » Je t’aime – moi non plus », l’administration de Barak Obama est plutôt conciliante, protocolaire et diplomatique dans ses réactions. Elle a apparemment, après avoir analysé la situation, opté pour « la réforme et le volontarisme dans la continuité ». Il n’est pas interdit de penser que la tension observée entre le Président Obama et son homologue français Sarkozy à propos de la Lybie a aussi contribué à cette prise de position.
Actuellement, Robert Ford, l’ambassadeur de Washington à Damas, selon plusieurs sources indépendantes, joue un rôle dans les contacts établis entre l’opposition à Damas et les conseillers du Président syrien. De multiples réunions, déclarées ou non, ont eu lieu entre le vice-président de la république et des membres de l’opposition.
Cependant, R. Ford a effectué, le 11 juillet, une visite sans l’autorisation du gouvernement syrien à Hama, une ville qui a connu des manifestations la semaine dernière et a rencontré des manifestants alors que ces mêmes manifestants interdisent aux fonctionnaires d’aller à leur bureau. Madame Cha’abban, conseillère auprès du Président syrien en matière de communication, a exprimé une vive protestation contre cette visite, car elle-même n’a pas pu entrer dans la ville en raison des barricades érigées, ce alors que Monsieur FORD y était déjà. De l’ingérence en flagrant délit. Imaginons la réaction américaine si l’ambassadeur syrien était présent, même par hasard, à New York, lors des troubles qui y ont eu lieu voici quelques années !
L’Europe, via la France et l’Angleterre, deux membres permanents du conseil de Sécurité de l’ONU, ont tenté l’obtention d’une résolution pour condamner le gouvernement syrien, mais sans succès. Toutefois, les déclarations d’Alain Juppé ont suscité certains remous au sein des populations libanaise, irakienne et syrienne, incitant notamment le prêtre arabe syrien Elie Zahlaoui à lui adresser une lettre ouverte.
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d. La Turquie : Inimitié dans l’adversité
Après des années de tension entre la Syrie et la Turquie, les deux pays ont fini par trouver un terrain d’entente qui a abouti à la signature d’un mémorandum de coopération stratégique dans tous les domaines. La suppression du visa pour les ressortissants des deux pays a été l’un des moteurs forts de cette ouverture et un symbole de confiance et de respect mutuel. Les échanges commerciaux ont atteint plusieurs milliards de dollars et afin de rendre fluide le mouvement des personnes et des marchandises le nombre de points de passage entre les deux pays a été multiplié par sept. Les sociétés turques ont trouvé un terrain vierge et à l’abri de la concurrence, et ont pullulé comme les champignons, tandis que les industriels syriens ont trouvé en Turquie une nouvelle vitrine sur le monde.
A l’époque, l’opposition syrienne, qui reçoit actuellement le soutien de Monsieur Erdogan, avait qualifié cette ouverture de dommageable pour la Syrie, favorable uniquement aux Turcs, et elle a soutenu que le gouvernement syrien avait vendu son pays.
Revirement surprise d’Ankara
De ce point de vue, l’attitude de la Turquie au moment de la crise syrienne a été la plus surprenante de toutes. Les déclarations quasi-quotidiennes et hostiles de Rajab Tayyeb Erdogan, Premier Ministre turc, ont agacé le gouvernement syrien. La tension a atteint un point culminant lors des réunions des opposants syriens dans la ville d’ Antalya à quelques kilomètres seulement de la frontière.
La présence du Secrétaire général des « Frères Musulmans » dans cette réunion, et les moyens de communication mis à sa disposition, ont provoqué l’indignation des partisans du gouvernement syrien.
Monsieur Erdogan a ouvertement souhaité l’arrivée des « Frères Musulmans » au pouvoir en Syrie et il a essayé à maintes fois d’arranger des rencontres entre ce « parti confessionnel » et des représentants de l’Etat à Damas dans l’espoir de le voir légalisé, mais sans succès. Ce qui échappe à Monsieur Erdogan, volontairement ou non, c’est que son arrivée au pouvoir a été rendue possible grâce à l’article 2 de la constitution où la laïcité est inscrite noir sur blanc : « La République de Turquie est un Etat de droit démocratique, laïque…. ». De ce fait, la laïcité est un espace de liberté pour tous les partis. Le parti de l’AKP a bien profité de cet espace. Et les Turcs se sont beaucoup battus pour obtenir cette liberté.
En Syrie, l’article 3 de la constitution détermine la religion du Président et l’Islam est la source de la législation. Des tentatives ont eu lieu pour changer ces dispositions, mais pour le moment les choses sont restées en l’état. L’arrivée éventuelle des Frères Musulmans au pouvoir ne ferait que renforcer cette tendance. C’est la raison pour laquelle des politiques syriens souhaitent supprimer, lors de la discussion nationale qui a démarré aujourd’hui, l’article 3 en même temps que le 8.
Il est vrai aussi que « Les Frères Musulmans » sont les mieux organisés au sein de l’opposition intérieure. A la fin des années 70 et au début des années 80, ils ont affronté le pouvoir militairement au prix de beaucoup de vies. Ils sont responsables de la mort des centaines des citoyens ordinaires ayant la même confession que la leur mais dont la seule erreur était d’appartenir à une autre branche de l’Islam. Alors que l’Islam interdit strictement de tuer une âme sans raison, les Frères Musulmans n’ont pas hésité à assassiner, et sans discernement, des travailleurs, des professeurs de faculté, des juges, des médecins et ils ont couronné leur barbarie par le massacre des cadets de l’Académie Militaire de l’Artillerie d’Alep, faisant plusieurs dizaines de morts et de blessés graves.
Monsieur Erdogan, en souhaitant le retour de ce parti au sein de la vie politique, non seulement s’immisce dans les affaires internes de son voisin, mais ignore ou fait semblant d’ignorer que la Syrie est une société multiconfessionnelle et multi-ethnique.
Il faut souligner que le parti des Frères Musulmans n’accepte dans ses rangs que des personnes appartenant à sa branche de l’Islam alors que la société comprend d’autres musulmans. Dans l’Islam il y a 73 familles ou branches différentes, ce qu’on doit considérer comme un signe d’ouverture, de tolérance et de richesse philosophique. L’idéologie de ce parti consiste à instaurer un « Califat Islamique » qui refuse la séparation de la religion et de l’Etat. Ce sont les quatrième et cinquième articles de leur dogme. Toute personne qui n’adhère pas à cette séparation est considérée comme athée, laïque ou appartenant à une association maçonnique.
Des tentatives ont eu lieu pour redorer et soigner l’image des Frères Musulmans afin de les faire accepter par les Américains – comme cela a été dévoilé par le câble diplomatique 06BEIRUT2735 de 24 Août 2006. Mais est-ce que l’arbre peut cacher la forêt ?
Maintenant, si le gouvernement syrien accorde un droit de retour aux Frères Musulmans pour fonder un parti et intégrer la vie politique, il sera contraint, au nom de l’égalité et de la démocratie, d’accorder la même chose aux autres composantes de la société.
Ainsi, on aura des partis pour les différentes branches de l’Islam : sunnite, alaouite, ismaélite, chiite, druze, mourchidite…… et sans oublier bien entendu les Kurdes. Et pendant qu’on y est, il faut penser aussi aux différentes branches des chrétiens : syriaque catholique et syriaque orthodoxe, grecque catholique et grecque orthodoxe, arménienne catholique et arméniènne orthodoxe, maronite, chaldanite, latin et protestant. C’est ni plus ni moins la libanisation ou l’irakisation de la société dont les deux peuplent souffrent suffisamment. Ce n’est pas sur cette base que l’on peut vivre la démocratie ou faire vivre la démocratie.
Faut-il rappeler que le Liban est entré dans le tourbillon sanglant des guerres confessionnelles à cause de sa constitution. Ces guerres ont absorbé le meilleur du pays : sa jeunesse. Quelle que soit la qualité architecturale d’un édifice, si les fondations ne sont pas solides le bâtiment est voué à l’effondrement tôt ou tard.
Fort heureusement, le législateur syrien de la nouvelle « loi autorisant la formation des partis politiques » a prévenu le danger, dans l’article 2 qui stipule :
« Les partis politiques se forment sur la base de la citoyenneté, il est strictement interdit de former un parti politique sur une base : religieuse, confessionnelle, sectaire, ethnique, linguistique, tribale, discriminatoire ou en contradiction avec les droits de l’Homme. »
Pour conclure sur l’attitude turque, on observe que depuis la fin des élections législatives le calme est revenu dans les déclarations des responsables politiques. Certains murmurent que ce calme est dû à la mise au point faite par de hauts responsables iraniens et irakiens à destination du chef du gouvernement turc. Une visite du ministre turc des Affaires étrangères est prévue du reste pour bientôt à Damas afin de dissiper les nuages ayant brouillé les relations entre les deux voisins.
Les intérêts communs sont trop nombreux entre Ankara et Damas et le pragmatisme finira par triompher. Les deux pays ont pris une initiative originale il y a deux ans qui mérite d’être soulignée et suivie : il s’agit de déminer les zones frontalières, libérant ainsi des terrains arables qui seront mise à la disposition des agriculteurs des deux pays.
3. Les moyens d’en sortir
Une République laïque et démocratique
Le paysage politique syrien se décompose ainsi :
La Majorité : Elle est composée de plusieurs partis politiques laïcs, le Baas, le Parti Communiste, l’Union Socialiste Arabe, les Unionistes Arabes, le Parti Nationaliste Syrien Socialiste. Cette majorité (mais pas les partis) disparaîtrait sous sa forme actuelle si l’article 8 de la constitution (proclamant la suprématie du Baas) était aboli et il y a une forte chance pour qu’il soit abrogé. En effet, on vient d’apprendre que cette majorité est dissoute puisque le Parti Nationaliste Syrien Socialiste, le Comité National pour l’unité des Communistes et plusieurs personnalités viennent de former le « Front Populaire pour le Changement et la libération ».
L’Opposition :
Elle est diverse et elle commence à se restructurer : on peut déjà distinguer
L’opposition électronique et le réseau Facebook qui ont déclenché le mouvement via les réseaux sociaux dont le responsable est un Wahhabite. Cette opposition fonctionne selon les slogans (ou mots-clés) : « Pas assez » et « Trop tard ». Au début, elle appelait seulement à manifester pour la liberté et la suppression de la loi martiale. A peine cette loi a-t-elle été abrogée qu’elle disait : « c’est trop tard ». Et ainsi de suite avec les autres lois. Aujourd’hui, elle dit qu’elle ne peut pas discuter avec le régime (car… c’est trop tard !).
L’opposition à l’étranger. Elle « rassemble » des personnes isolées et dispersées en Europe et aux Etats- Unis. Elle tente de se restructurer.
L’opposition intérieure : C’est un ensemble d’intellectuels, d’écrivains, d’artistes et d’indépendants. C’est avec cette branche que l’ambassadeur américain est entré en contact.
La première réunion – historique – de ces opposants, a eu lieu le 27 juin dernier dans un grand hôtel damascène et a rassemblé plus de 200 personnalités. Qui viennent d’établir leur groupe de travail (04.07.2011) tout comme ils ont annoncé leur feuille de route appelant de tous leurs vœux à une vie démocratique. Ce rassemblement regroupe 14 partis et des dizaines des personnalités indépendantes dont certaines très en vue : Michel Kilo, Fayez Sara et Arèfe Dalila. Parmi les partis ayant assisté à la réunion on citera le Parti Social Arabe, le Parti Travailliste Communiste, le Parti Travailliste Révolutionnaire Arabe, le Rassemblement de la Gauche Marxiste, le Courant Islamique Démocratique. Citons encore la présence d’un représentant de la Chambre de l’Industrie de Damas.
Le coordinateur général de ce regroupement est Hassan Abdel Azim ; son vice-coordinateur est Bourhan Ghalioun (Directeur de Centre des Etudes de l’Orient Moderne à l’Université de la Sorbonne à Paris).
Ce groupe répondra certainement à l’appel du gouvernement pour une réunion de travail le 10 juillet afin de discuter des lois citées ci-dessous et se mettre en accord pour un nouveau calendrier électoral, car l’ancien calendrier prévoyait des élections législatives début août.
Un autre groupe, de tendance « centriste » (fort de 200 personnes environ) vient d’être créé (le 03.07) et porte le nom « L’initiative nationale pour l’avenir de la Syrie ». Ce groupe comprend beaucoup de personnalités indépendantes dont la plus médiatisée est sans conteste le professeur à la faculté des études islamiques, et réformiste en matière de religion, Mohamed Habash. Ces centristes ont fait savoir qu’ils participeraient à l’appel gouvernemental du 10 Juillet.
Un troisième groupe est sur le point de se fonder, il regrouperait 90 députés indépendants du Parlement actuel qui a fini sa mandature le 5 mai dernier.
C’est à partir du 10 Juillet qu’un débat national sera ouvert afin de discuter de l’avenir de la nouvelle république. Des invitations ont été lancées à plus de 180 personnalités de l’opposition, et des indépendants, Pendant ce temps, plusieurs lois ont été décrétées et publiées sur le site du Conseil des Ministres (www.youropinion.gov.sy) :
L’abrogation de la Loi martiale. (Mis en œuvre) Loi autorisant les manifestations. (Mis en œuvre). Loi électorale. (législatif et régionale). Loi autorisant la formation des partis politiques. Loi autorisant la liberté de la presse. (En cours)
Un dernier mot
L’expérience humaine a montré que le couple qui réussit le mieux dans les sociétés modernes est indiscutablement le couple laïcité/démocratie. Car non seulement il assure l’égalité, la justice sociale, la dignité, la stabilité, et la paix aux citoyens, mais il met aussi l’homme au cœur du projet de la société. La laïcité et la démocratie sont les deux fondamentaux qui vont probablement constituer la nouvelle république.
Il faut insister sur un fait qui n’est pas aussi évident pour tous : la laïcité n’est pas en contradiction avec les religions. Il n’y a pas d’opposition irréductible entre la laïcité et l’islam, comme le démontre Ibn Khaldoun à travers l’histoire de l’islam. Selon l’islamologue français Maxime Rodinson, l’Islam est tout à fait « soluble dans la République ».
Faut-il rappeler aussi que la laïcité est une façon de concevoir et d’organiser la coexistence des libertés, plus particulièrement des libertés d’opinion, de conscience et de croyance. Donc, la laïcité n’a pas l’ambition d’annuler la croyance et la foi. Elle met à la disposition des sociétés un grand espace de liberté et de tolérance.
Si la Première République syrienne remonte à l’Indépendance, si la Deuxième République procède du référendum de 1971 qui a établi une constitution avec une option nette vers la laïcité, la Troisième République aura l’honneur d’être laïque et démocratique.
J’ai cherché et j’ai poussé trop loin mes recherches, mais je n’ai pas trouvé un seul peuple, « génétiquement » ou « phénotypiquement » anti-laïque ou anti-démocratique ! Et comme disait Pierre de Coubertin : « Il n’est pas nécessaire d’espérer pour entreprendre, ni de réussir pour persévérer. »