Bruce Toussaint à BHL : « Pardon de vous couper mais lorsqu’un parti est à 25% aux Régionales, parfois 40, 43% dans certaines régions, c’est encore l’extrême droite ? C’est pas autre chose ? »
On a connu Bruce Toussaint plus antifasciste. Mais les rapports de forces politiques étant en train de changer, l’ex-animateur de Canal+ et d’Europe 1 passé sur France 5 en est presque devenu journaliste. Dans son émission C Polémique du 26 février 2017, il invite un militant du Front national, chose rare en télévision. On a plutôt l’habitude de plateaux TV truffés de « spécialistes » de l’extrême droite et autres experts en « fascisme », qui délivrent toujours la même leçon sous une avalanche de points Godwin.
Cette fois-ci, le plateau est constitué d’une journaliste de CNN (anti-Trump), du grand reporter Georges Malbrunot (dont la spécialité est plutôt le Proche-Orient), du sondeur Brice Teinturier (en service commandé contre le FN, voir sa tirade idéologique finale contre le témoignage factuel du militant), et enfin de l’incontournable BHL en arbitre des moralités, dont on cherche encore la légitimité.
Pour une fois, donc, sans s’attirer les insultes ou les leçons de morale douteuse des autres invités, un militant FN peut s’exprimer, sur le service public. Ce qui aurait dû être le cas depuis longtemps, quand on connaît le cahier des charges du service public de l’audiovisuel. Laurent Bras dévoile son parcours de militant syndical à La Poste, de SOS Racisme en passant par la LCR, pour atterrir au FN de Marine Le Pen. Invité à réagir à ce témoignage, BHL rappelle que le passage d’une extrême à l’autre n’est pas une nouveauté en France, ce qui ne l’empêche pas de rappeler les Heures Sombres :
Bernard-Henri Lévy : « Au moment de l’affaire Dreyfus il y a déjà eu un mouvement massif de l’extrême gauche vers l’extrême droite, des amis de Georges Sorel vers les amis de Maurras… Les choses ne sont pas comparables, naturellement. Dans les années 30, les premiers nationaux-socialistes s’appelaient des nationaux bolcheviques, les frères Strasser, parmi les fondateurs du Parti nazi. »
Laurent Bras s’insurge : « Moi je n’ai aucun rapport avec le fascisme ! »
BHL tentera bien de contrer le discours très cohérent de Laurent Bras en invoquant les forces du Mal, la guerre civile, une inversion accusatoire classique du vrai fascisme « intellectuel » :
Laurent Bras des élections 2017 : « C’est l’occasion pour les Français je dirais de renverser la table, dans les urnes, et d’imposer un véritable changement. »
Bernard-Henri Lévy : « Renverser la table ça veut dire quoi ? Mettre à la place les instincts, les pulsions, la guerre de tous contre tous… ? »
Laurent Bras : « Y a pas cette volonté, justement Marine cherche à rassembler tous les Français… Quand vous voyez ce qui s’est passé récemment à Nantes, avec ces violences, je veux dire le fascisme à l’heure actuelle il a une couleur, il est vert, c’est l’islamo-racaille, ou alors c’est les gauchistes qui sont connus ! […] Moi j’ai participé au mouvement contre la loi El Khomri, et pendant les mouvements contre la loi El Khomri j’étais du côté des salariés et j’ai soutenu aussi les policiers – en tant que syndicaliste – qui étaient quand même confrontés à la violence des hordes gauchistes qui sont connues du gouvernement et qu’on a laissé faire ! »
Le débat en vidéo :