Il est difficile de trouver un aspect positif à la débâcle de Syriza. Pourtant s’il y a un effet secondaire dans l’affaire Syriza/Troïka, c’est qu’elle a contraint certains de ses principaux acteurs à tomber le masque, permettant aux analystes politiques de faire moins de spéculations sur le point où se situe chacun d’eux par rapport à l’euro, et plus généralement par rapport à l’Union européenne et à l’OTAN.
D’une part, l’Union européenne, qui n’est plus en mesure de restaurer sa façade démocratique avec encore plus de propagande, est maintenant plus exposée que jamais auparavant dans son demi-siècle d’existence. Son vernis pro-paix, pro-social et pro-démocratie pâlit rapidement au soleil, révélant sa totale soumission à l’OTAN et aux politiques agressives de Washington, son programme réactionnaire néolibéral et antisyndical, ainsi que sa haine farouche de la démocratie, comme l’a montré son mépris total du référendum grec. Comme l’a écrit A.E. Pritchard du Daily Telegraph :
« Il est difficile de voir comment une union monétaire, maintenue ensemble de cette manière par le pouvoir juridique, la coercition et la peur, peut avoir un avenir quelconque dans tous les anciens États-nations d’Europe. »
D’autre part, l’ancien ministre des Finances grec Yanis Varoufakis fait l’objet d’une enquête pour haute-trahison après avoir admis dans une interview qu’il avait établi un plan d’urgence pour la mise en place d’un système bancaire parallèle – prétendument dans le dos de Tsipras. Ayant démissionné seulement quelques jours après le référendum, un grand succès pour Syriza sur le moment, Varoufakis a retiré son propre masque et révélé ce qui s’était réellement passé en coulisses : un groupe de travail s’était réuni pour préparer un Plan B, un système parallèle de liquidités et de règlements bancaires en euros, qui pourrait – et cela a été l’accusation principale – permettre un passage à la drachme.
Au tour de l’Espagne
Maintenant, dans ce qui ressemble à l’acte final d’une tragédie grecque, tous les yeux se tournent vers Podemos en Espagne et vers son dirigeant Pablo Iglesias. Le parallèle entre Syriza et Podemos est trop évident pour que personne ne l’ignore et la question est de savoir si un pays comme l’Espagne – quatre fois la population de la Grèce mais presque six fois son PIB – pourrait faire beaucoup plus que Syriza. Après 18 mois d’existence, le parti de Pablo Iglesias a pu seulement maintenir une position ambiguë sur les limites d’un programme progressiste au sein de l’Union européenne et l’euro, jusqu’ici…
Dans une interview récente suivant l’accord entre la Troïka et la Grèce, le dirigeant de Podemos a dit qu’il ne ferait pas beaucoup plus que ses partenaires grecs à Athènes :
« La seule chose que nous pouvons faire est de développer plus de puissance administrative » de manière à ce que l’Europe accueille avec bienveillance des gouvernements qui défendent « les droits sociaux, la redistribution de la richesse et du bien-être. »
Une déclaration qui livre plus de questions que de réponses. Qu’est-ce que c’est que la puissance administrative, exactement ? Comment cela fonctionnerait-il au sein des institutions de l’UE ? Des traités européens ?
Plus importante peut-être, la déclaration qui a suivi :
« Sinon, peut-être que la personne qui pourrait quelque chose sur ce plan est une dame qui vient du fascisme et de l’extrême-droite, Marine Le Pen. »
Il a dit ensuite que si Le Pen arrivait au pouvoir en France, « un pays doté de l’arme nucléaire », elle pourrait conclure une alliance avec une autre superpuissance nucléaire, la Russie, « mais plus avec l’UE ni avec l’OTAN ». Il ajoute :
« Nous pourrions très bien être à la veille de la Troisième Guerre mondiale. »