Évincés en mai d’On n’est pas couché, Eric Zemmour et Eric Naulleau ont fait leurs adieux le 25 juin aux téléspectateurs de France 2. Alors qu’il se prépare un beau retour sur Paris Première et en prime time, le duo a accepté une longue interview avec nos confrères de Technikart, qui se décrivent certes comme des "gauchistes bien pensants", mais avouent un petit faible pour les anciens trublions de Laurent Ruquier. L’animateur les remplacera à la rentrée par Audrey Pulvar et Natacha Polony.
"Je cherche encore la raison du renvoi. Cette affaire, c’est comme l’assassinat de Kennedy : tout le monde a son hypothèse", remarque Eric Naulleau. La théorie avancée par Technikart est assez intéressante : "Laurent Ruquier s’est rendu compte qu’il avait créé un monstre politisé à l’influence croissante, Eric Zemmour, allant à l’encontre de tout ce qu’il défend lui-même idéologiquement", quant à Eric Naulleau, écrit le magazine, il serait "une victime collatérale". Le critique littéraire confie d’ailleurs à Technikart être "à 99% en désaccord" avec Zemmour : "J’exagère un peu : allez, 66% en désaccord. Mais en posant la question, vous êtes sur un schéma devenu obsolète, celui du combat droite-gauche." D’autant plus que les deux Eric n’étaient pas là pour débattre entre eux, mais avec des invités.
Ruquier parle d’usure du duo, Naulleau n’y croit toujours pas : "Je persiste et signe : l’hypothèse que notre renvoi soit uniquement lié à un phénomène d’usure, je me la raconterai lors de ma prochaine nuit d’insomnie pour voir si les contes pour enfants me font le même effet que par le passé." Et les deux Eric s’en amusent : "Car personne d’autre ne s’use à la télévision", remarque Zemmour. "Il n’y a que nous. Au bout de quatre saisons", renchérit Naulleau.
Il y aussi l’hypothèse de la liste noire de Nicolas Sarkozy, à laquelle Zemmour ne croit pas une seconde. Naulleau regrette surtout ce qu’il a pu lire dans la presse : "D’après les informations du Figaro, Ruquier a annoncé la décision à la direction de France Télévisions en novembre dernier. Ce n’est pas très agréable d’avoir fait l’émission huit mois en étant dans la place du cocu." En tout cas Naulleau, quand il réagissait sur RTL à son éviction, semblait croire justement à ces pressions politiques, dans des propos un peu mélodramatiques. Il relativise dans cette nouvelle interview : "J’ai eu une conversation un rien surréaliste à ce sujet avec deux SDF qui me souhaitaient bon courage après mon renvoi... Oh, les gars, c’est vous qui êtes dans la mouise, pas moi !"
S’ensuit une réflexion sur la télévision - "le clash, c’est une masse d’air ’show’ qui rencontre une masse d’air froid, critique", remarque Naulleau - et l’idéologie. Celle d’Eric Zemmour bien sûr, qui lui a valu une condamnation pour provocation à la haine raciale, et celles des artistes, nouveaux maîtres à penser de notre société dont le niveau est souvent bas de plafond : "L’énorme majorité sont dans : ’La pauvreté, c’est mal’ ou : ’La paix c’est quand même vachement mieux que la guerre’, une doxa assez vague où tout le monde est d’accord avec tout le monde." Ce qui nous a offert de grands moments de solitude de Cali ou Francis Lalanne par exemple.
Malgré ses différences, le duo s’est bien trouvé : "Je ne pourrais pas passer autant de temps avec un type que je ne pourrais pas encadrer. Ça aurait été l’enfer. Avec Plenel [Edwy Plenel, ndr], c’était très dur", assure Eric Naulleau. Ils ont travaillé quatre saisons ensemble pour Ruquier et enregistré 172 émissions. Naulleau était rémunéré 1500 euros par émission et son compère 3000. Leur clash avec Michaël Youn a été visionné plus de 1,7 million de fois sur toutes plateformes confondues. Seul Jacques Attali quittera le plateau à cause d’eux, en décembre 2008.
Reste à savoir comment ils vont pouvoir se réinventer le samedi en prime time dans un nouveau magazine sur Paris Première. Naulleau : "On est parfaitement conscients que la chose à éviter à tout prix, c’est de refaire ce qu’on faisait. Ce serait terrible. Donc on cherche une formule décalée, qui nous plaise, et qui nous permettre d’atténuer un peu la frustration électorale." Réponse à la rentrée.