Ce mercredi 19 juin au matin, Bahar Kimyongür comparaissait devant l’Audience nationale, un haut tribunal madrilène réservé pour les cas d’importance nationale ou internationale et certains crimes graves (tels les délits de terrorisme).
Cette première audience devant la Audiencia Nacional devait permettre de préciser les conditions dans lesquelles B. Kimyongür (sous le coup d’un mandat d’arrêt lancé par la Turquie le 28 mai dernier) allait être obligé d’attendre les suites données par la justice espagnole à la demande d’extradition formulée par Ankara.
Dès l’entame de l’audience, l’avocat de Bahar (Gonzalo Boye) a donc expressément demandé la libération sous caution de son client. Le juge a accepté cette demande : contre une caution de 10 000 euros, B. Kimyongür sera autorisé à rejoindre la Belgique. Dans quel délai ? Aussitôt la somme réunie par la famille et versée sur un compte bloqué.
Bahar rendu à la liberté... Une liberté provisoire puisque, de retour à Bruxelles, il devra y attendre un éventuel procès devant la justice espagnole.
Nous devrons donc rester sur-le-qui-vive.
POURQUOI ? Nous savons tous pourquoi les faits se sont ainsi déroulés. Nous le savons pertinemment.
Bahar une nouvelle fois jeté en prison ?
Pour un crime ? Bahar n’a commis aucun crime. Pour un délit ? Bahar n’a commis aucun délit. Pour une infraction pénale ? Bahar n’a commis aucune infraction.
Sauf à considérer la vérité comme une infraction. Sauf à considérer que prononcer une vérité trop « vraie » est un délit. Sauf à considérer qu’énoncer une vérité dans sa radicalité est un crime.
C’est ce que considèrent, sans nul doute, les autorités d’Ankara.
Parce que Bahar n’a jamais cessé de dénoncer les conditions de détention effroyables dans les prisons turques, Kimyongür doit –pour Ankara– être bâillonné.
Parce que Bahar n’a jamais cessé de dénoncer les hauts responsables de l’armée et le régime de terreur qu’ils avaient imposé par le sang dès les années 80, Kimyongür doit - pour Ankara - être bâillonné.
Parce que Bahar n’a jamais cessé de dénoncer l’impunité dont les généraux turcs ont toujours bénéficié malgré leurs crimes de masse, Kimyongür doit - pour Ankara - être bâillonné.
Parce que Bahar n’a jamais cessé de dénoncer les protections entourant les groupes d’extrême droite responsables du massacre, sur la Place Taksim, de 36 militants de gauche le Premier mai 1977, Kimyongür doit - pour Ankara - être bâillonné.
Parce que Bahar n’a jamais cessé de dénoncer les assassinats de syndicalistes soucieux de défendre le peuple ouvrier, Kimyongür doit –pour Ankara– être bâillonné.
Parce que Bahar n’a jamais cessé de dénoncer les atteintes au droit de la presse et l’incarcération de centaines de journalistes décidément trop honnêtes, Kimyongür doit - pour Ankara - être bâillonné.
Parce que Bahar n’a jamais cessé de dénoncer l’intrication de la maffia et des plus hauts organes d’Etat, Kimyongür doit - pour Ankara - être bâillonné.
Parce que Bahar n’a jamais cessé de dénoncer les opérations-commando dévolues à des nervis fascistes en vue d’exécuter extraterritorialement des militants révolutionnaires exilés à l’étranger, Kimyongür doit - pour Ankara - être bâillonné.
Parce que Bahar n’a jamais cessé de dénoncer la sale guerre menée contre le peuple kurde, Kimyongür doit - pour Ankara - être bâillonné.
Parce que Bahar n’a jamais cessé de dénoncer la collusion entre les gouvernements turcs et les Etats-Unis, leur collaboration parfaite dans les nouvelles guerres impérialistes, Kimyongür doit - pour Ankara - être bâillonné.
Sans parler du courage dont Bahar aura fait preuve quand - à contre-courant des grands médias - , il persévérait à éclairer l’opinion progressiste sur la réalité du conflit en Syrie, un conflit largement instrumentalisé par le gouvernement Erdogan lequel apporte un appui politique, logistique et militaire aux forces combattantes islamistes les plus hystériques.
Chers amis,
Nous savons tous pourquoi les choses se sont ainsi passées.
Et pourquoi, dès demain et les jours d’après, nous allons continuer à nous mobiliser pour Bahar.
En nous battant pour sa liberté à lui, nous nous battons (en fait) pour nos libertés à tous.
Pour le Comité pour la Liberté d’Expression et d’Association Jean Flinker 19/06/2013