Le journal Les Échos vient de publier avant sa publication officielle, les propositions chocs d’un rapport du MEDEF intitulé « Comment relancer la dynamique de création d’emplois en France ? ».
Dans ce document, l’organisation patronale remet sur le tapis, les propositions antisociales qu’elle appelle de ses vœux depuis des années, et les présente comme un outil pour créer 1 million d’emplois en France :
Suppression de deux jours fériés sur onze avec la promesse d’1% de croissance économique et 100 000 emplois.
Autorisation de l’ouverture des commerces le soir et le dimanche : entre 40 000 et 100 000 créations d’emploi dans le commerce et la distribution et entre 50 000 et 200 000 dans le tourisme verraient le jour.
La mise en place de différents niveaux de SMIC à destination des « populations les plus éloignées de l’emploi » assureraient la création de 50 000 à 100 000 emplois,
Un temps de travail négocié au niveau des entreprises (ainsi que le plafond qui déclenche l’apparition d’une majoration de salaires des heures supplémentaires) : 50 à 100 000 emplois supplémentaires.
La formation des salariés aux postes non pourvus des métiers en tension permettrait 100 000 et 200 000 emplois.
La généralisation des « contrats de projet », sur le modèle du « contrat de chantier » dans le bâtiment qui permet la création d’un CDI temporaire puisque celui-ci prendrait fin dès que le projet est terminé.
Réforme du CICE (crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi) qui passerait de crédit d’impôt en baisse de charges.
Suppression de la taxe sur les salaires pour les secteurs de la banque et de l’assurance, et de la taxe sur les transactions financières.
Relever les seuils sociaux (ceux-ci entraînent le prélèvement du 1 % logement, augmentation du taux de cotisation à la formation professionnelle ; le passage de 49 à 50 employés est celui qui crée le plus d’obligations pour l’entreprise et qui oblige à la création d’un comité d’entreprise (CE), d’un comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail (CHSCT) et la mise en place d’un plan de sauvegarde de l’emploi en cas de licenciement économique).
La divulgation de ce document est un ballon d’essai : le MEDEF en qualifiant ses propositions d’« éléments de travail ne correspondant pas exactement à celles qu’il fera dans les prochains jours ». Le MEDEF admet qu’« elles apparaîtront certainement agressives ou caricaturales à certains. Mais ils ont tort. Il s’agit avant tout d’animer un débat (...) Notre conviction est que nous n’avons pas tout essayé contre le chômage, nous avons juste essayé ce qui n’a marché nulle part et oublié ce qui a fonctionné partout. »
Les syndicats ont déjà réagi, pour Laurent Berger le dirigeant de la CFDT :
« C’est une provocation à double titre. D’abord sur le contenu des mesures : pour la CFDT il est hors de question d’aller sur ces terrains-là. Et puis c’est une provocation parce que la semaine dernière, nous nous sommes réunis avec les organisations patronales et les syndicats pour fixer un agenda social. Nous avons discuté modernisation du dialogue social, nous avons discuté emploi des jeunes, emploi des chômeurs de longue durée, et le MEDEF n’a pas parlé de ces propositions. On n’élève pas le débat public en balançant dans la presse des propositions qu’on n’a discutées nulle part ailleurs. »
Quant à Jean-Claude Mailly, le secrétaire général de Force ouvrière, il a commenté ce plan :
« Pierre Gattaz, le président du Medef, n’arrive pas à comprendre qu’on ne gère pas un pays comme une entreprise. On n’est pas le 1er avril, ce n’est pas une blague, donc c’est une provocation ou une outrance. On est dans un mouvement global de dérégulation. S’il continue comme ça il va nous dire d’étendre le travail de nuit et de faire travailler les enfants ! »
« Cogner très fort », puis reculer soit-disant sous « la pression » du gouvernement et des syndicats, puis faire passer ses propositions en plusieurs fois, dans les mois suivants et en profitant de résultats économiques affolants : tel est la stratégie du grand capital et de ses valets.
Ce matin, le MEDEF a annoncé que son projet ne serait pas publié mercredi comme prévu mais le 24 septembre prochain. Celui-ci avait déjà été repoussé afin de ne pas embarrasser Manuel Valls lors de sa visite à l’université d’été de l’organisation patronale en août dernier.