Les journaux reviennent à la charge ce mercredi. Michèle Alliot-Marie, la ministre des Affaires étrangères, subit toujours le feu roulant des critiques pour avoir proposé une aide policière à Ben Ali. Et ses explications le mardi 18 janvier devant les députés n’ont pas convaincu grand-monde, à commencer par Libération : « on entend bien qu’elle n’avait pas en tête de faire tirer les pandores tricolores sur la foule. Juste un maniement diplomatique du flash-ball et du Taser. (…) Il s’agissait bien, en tout cas, de voler au secours d’un tyran en perdition, affirme le journal, pour qu’il réprime mieux la juste colère du peuple et qu’il garde son poste pour continuer à se remplir les poches. Un tel aveuglement est hors du commun dans la série des bévues internationales, s’exclame Libération. (…) Il ne lui reste qu’une issue : quitter ce poste qu’elle occupe décidément avec trop de balourdise. »
La Dépêche du Midi ne mâche pas non plus ses mots : « Ce mardi, la ministre des Affaires étrangères, qui n’est pourtant pas l’oie blanche du gouvernement, a balbutié quelques explications si peu convaincantes qu’on est abasourdi devant un tel amateurisme. Ce qui ressemble à une bourde monumentale dans la bouche de n’importe quel apprenti diplomate constitue bel et bien une provocation aux yeux du peuple tunisien. »
Dépassée par les Américains…
Le Canard Enchaîné en remet une couche… Le Canard Enchaîné qui cite la ministre à propos de la Tunisie : « nous sommes restés tout le temps dans un brouillard total. (…) Ce sont les Américains qui ont pris les choses en main. Les militaires américains ont parlé avec leurs homologues tunisiens, et Ben Ali a été prié de quitter, sans plus attendre, le territoire. » C’est ce qu’aurait donc affirmé Michèle Alliot-Marie en début de semaine. Commentaire du Canard : la ministre « n’a pas cherché à cacher l’impéritie de la diplomatie française. Laquelle n’a rien vu venir quant à la révolution tunisienne et la fuite en catastrophe de Ben Ali. »
La diplomatie française sur la sellette donc… Et les commentaires dans la presse ne sont pas très glorieux. Pour La Montagne, « dans cette zone où la France a toujours imposé ses intérêts, le discrédit est total pour notre prétendue realpolitik. L’interpellation est brutale pour la politique étrangère de la France et ratifie notre perte d’influence en Afrique. » « Ainsi la démocratie de la rue va plus vite que la diplomatie de salon, soupire Le Midi Libre. En battant sa coulpe, le gouvernement français reconnaît implicitement que le sifflement des balles de la ’Révolution de jasmin’ n’était pas parvenu jusqu’aux oreilles de Paris. C’est un aveu de faiblesse de la part des autorités françaises. (…) Et cela pose la question de notre aptitude à anticiper les mouvements démocratiques du monde arabe. » En effet, complète Ouest France, « sous pression, la diplomatie française va devoir redoubler d’attention pour les prochaines étapes, car c’est une phase de fortes turbulences qui s’annonce. En Tunisie et dans toute la région, tant l’écho de la fuite de Ben Ali est grand dans le monde arabe. »