Normalement, quand on interroge un candidat à la présidentielle sur les sondages, il répond qu’il ne les regarde pas, que ça ne l’intéresse pas, qu’on fait dire aux chiffres n’importe quoi. Marine Le Pen, elle, parle méthodologie. "Je ne suis plus assez redressée", se plaignait-elle, en marge d’une rencontre avec la presse étrangère, le 13 janvier, pour expliquer qu’elle se rajouterait bien quelques points.
Mme Le Pen tape là où ça fait mal. Depuis le 21 avril 2002, le "vote Le Pen" cristallise toutes les interrogations. Et les instituts de sondage ne voudraient pas perdre une nouvelle fois la face.
"Nous avons fait une erreur en 2002", admet Jérôme Sainte-Marie à l’institut CSA. Quand les instituts disent "nous", ce n’est pas seulement pour noyer leur erreur dans celle de toute une profession, mais aussi parce que le "mercato" des instituts n’a rien à envier à celui des clubs professionnels de football : la plupart des sondeurs interrogés ont changé de boutique depuis la présidentielle précédente.
Parler d’erreur pourrait sembler un euphémisme. Mais tout le monde n’y arrive pas encore. Un sondeur assure que son institut avait vu assez juste en 2002 "pour 14 candidats sur 16". Dommage que les deux manquants aient décidé... du second tour. "Arithmétiquement, on avait été plus mauvais en 1995", insiste un autre (mais le duo de tête était le bon). "Aux législatives de 2002, le Front national était plus mal évalué" (mais ça n’avait pas fait bouger le nombre de députés). "Quand on surestime le FN, on est plus crédible", ironise M. Sainte-Marie chez CSA. Brice Teinturier, d’Ipsos, se souvient qu’en 2007 personne ne les a critiqués. "On nous a dit : "Ah, bravo le FN !", alors qu’on l’avait surestimé de 2,5 points."
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