Depuis une semaine, les innombrables chapelles de l’antiracisme se déchirent autour d’un « installation-performance » du Sud-africain Brett Bailey, intitulée Exhibit B.
Présentée du 27 au 30 novembre au théâtre subventionné Gérard-Philippe de Saint–Denis, puis à partir du 7 décembre prochain au « 104 » à Paris, l’œuvre invite les spectateurs (généralement bobos de gauche blancs et antiracistes) à entrer, à raison d’un groupe toutes les 20 minutes, pour déambuler au milieu de cages avec des Noirs silencieux à l’intérieur. Le but ? « Faire exploser les stéréotypes raciaux ou culturels » (dixit l’artiste).
Mais le 27 novembre, après que les deux premiers groupes de spectateurs ont visité l’exposition, une centaine de manifestants empêchent le reste du public d’accéder au théâtre. Depuis, les représentations se sont déroulées sous protection policière. Dans le même temps, une pétition demandant l’annulation des représentations a été initiée par une chanteuse camerounaise, Bams, qui compare l’œuvre à un « zoo humain », « une atteinte à la dignité humaine ». Invitée sur le plateau de Frédéric Taddeï, Bams comparera Exhibit B à Mein Kampf. Un argument inédit…
« L’artiste fait-il lui-même acte de racisme en voulant dénoncer le racisme ? » : c’est donc cette question existentielle qui, depuis bientôt une semaine, taraude les milieux antiracistes, la presse et les hommes politiques de gauche. D’un côté la Brigade anti-négrophobie, les Indigènes de la République et le Collectif des associations unies et solidaires pour l’Afrique et sa renaissance (Ausar) se battent pour faire interdire le spectacle. De l’autre les historiques LICRA, LDH, MRAP, rejoints par Lilian Thuram, militent pour la poursuite des représentations. La ministre de la Culture Fleur Pellerin et le maire PS de Paris sont déjà montées au créneau en exprimant leur soutien à Brett Bailey, condamnant « fermement toutes tentatives d’intimidation et de censure ».