Élie Semoun a beau donner des leçons d’antiracisme à Dieudonné, participer à Rire contre le Racisme (2004, 2007, 2009), certains de ses sketches tombent sous le coup du Manuel Act. Michaël Youn, lui, vient de sortir un film qui réduit les musulmans à l’état de Néandertaliens. Et il se demande en pleurnichant pourquoi il n’a fait que 1,1 million d’entrées. Jaku, notre ministre de la Justice, assisté de son porte-voix Manu le Valet, prompt à repérer tout débordement humoristique (c’est plus facile que d’embastiller les milliardaires qui truandent le fisc), a la répression très sélective.
Que fait la police de l’humour ?
La dernière œuvre d’art de Michaël Youn, Vive la France, est fortement inspirée du Borat de Sacha Baron Cohen, sioniste dont la fonction cinématographique consiste à salir l’image déjà désastreuse des musulmans dans le monde (11 Septembre, terrorisme, chômage, drogue, vol au Franprix, fautes de français, racket de pains au chocolat). Si personne ne lui conteste son droit à la création, ses films islamophobes sont loués par toute la presse occidentale.
« Borat, envoyé spécial du Kazakhstan pour apprendre les us et coutumes des cousins américains. Borat cumule les handicaps : phallocrate, antisémite, ordurier et surtout, bête à manger du foin. Dans cet extrait, il est invité dans une espèce de club de savoir-vivre et accumule les maladresses qui font rougir ses trois hôtes, coincés comme c’est pas permis. Un régal. » (Télérama, 20 juin 2012)
L’intelligentsia culturelle française se pâme devant ses clips politiques déguisés en comédies, dont l’intrigue se résume à flageller un imam ou à pisser contre une nonne, l’idéologie Femen appliquée au 7ème Art. On attend toujours le Baron Cohen sur les ultra-orthodoxes d’Israël, avec graffitis nazis dans Yad Vashem et main au derrière à la fille du rabbin (armé). Peut-être un problème de montage financier avec Dan Mazer ?
Michaël Youn invente le double plagiat perdant
« J’ai pensé que le film pourrait réconcilier les Français avec eux-mêmes, mais je crois que je suis plutôt passé pour un béni-ouioui à vouloir montrer ce qu’il y a de beau, de bon, de généreux dans ce pays. » (M. Youn, Première, 03 juillet 2013)
- Scène d’intro de La Rafle, de Roselyne Bosch, épouse d’Ilan Goldman
Michaël Youn a eu l’idée apparemment excellente de fondre deux succès du box-office, deux précautions valant mieux qu’une, Bienvenue chez les Chtis et Borat. Borat, c’est 18 millions de dollars de budget pour 125 millions de recettes. Les Chtis, 11 millions d’euros de budget pour 121 millions de recettes. Vive la France, c’est 16 millions d’euros de budget, pour… 7 millions de recettes en salles.
Au-delà du drame financier, cette comédie couve un second drame. Chez Cohen, un musulman demeuré découvre les États-Unis. Chez Boon, un cadre de La Poste arrive chez les demeurés du Nord. Chez Youn, ce sont deux musulmans demeurés qui débarquent chez nous. Une sorte de Bienvenue aux sous-hommes dans la civilisation.
Choc culturel à l’origine de scènes théoriquement décapantes, comme quand les deux zozos dorment sous le tapis du salon (tapis = Orient), croquent les escargots du Sud-Ouest avec leur coquille, ou trouvent que les Françaises ne sont pas assez giflées. Intitulé Vive la France, le film younien aurait pu s’appeler Aux chiottes les musulmans.
Pourtant, un simple calcul marketing aurait dû mettre la puce à l’oreille de Michaël : sachant que ce sont un les jeunes, deux ceux de banlieue, qui font les succès du cinéma, en remplissant les multiplexes le samedi soir en couple ou en bande, il aurait fallu raconter l’histoire de deux andouilles qui gagnent un voyage à Jérusalem, champ scénaristique relativement peu exploité chez nous. En faisant des gaffes avec la religion dominante, et les sensibilités locales déjà exacerbées, le film aurait fait un carton !
Ary Abittan, le Michel Leeb des Arabes
« Il fait ses premiers pas au cinéma dans Tu peux garder un secret ? d’Alexandre Arcady. Il est aussi, toujours la même année, à l’affiche de La Traque de Laurent Jaoui aux côtés d’Yvan Attal, ainsi que de Tellement proches d’Olivier Nakache et Éric Toledano. » (Ary Abittan, extrait, Wikipédia)
Cela fait des années que le multimillionnaire Arthur promeut, à travers ses talk-shows, pompés de A à Z sur le modèle américain (jusqu’à ce qu’il se fasse pincer), un humoriste de confession inconnue, nommé Ary Abittan, dont l’unique talent est d’imiter les Arabes complètement fous, ce qui semble être un pléonasme. Son sketch sur le présentateur de JT oriental, joué et rejoué jusqu’à l’overdose sur la chaîne Comédie !, est un modèle du genre… inattaqué. Pourquoi le CRAM (conseil représentatif des associations musulmanes), ou même le CRAT (conseil représentatif des associations terroristes) ne le dénonce-t-il pas au ministre de l’Intérieur, qui aime par-dessus tout interdire ? Serait-ce par tolérance ? Faiblesse médiatico-politique ? Maintenant que le ministre de la Censure est, grâce à nous, au courant, gageons que son bras armé retombera lourdement et sans tarder sur les fautifs.
Élie Semoun s’attaque avec courage au lobby portugais
« Comme j’ai pas envie de me faire égorger, je ne vais pas faire des sketchs sur les Arabes, les islamistes, etc. » (Élie Semoun, RTL, 13 novembre 2012)
Dans la galerie de portraits vendeurs de l’ancien petit comparse de Dieudonné, qu’il a d’ailleurs vendus à la publicité, il y a Toufik, l’Arabe crétin de la cité. Mais il y a surtout « les Portugais », biais habile pour s’en prendre en bloc aux Arabes. Semoun est trop malin pour surfer sur le racisme anti-maghrébin – il est quand même un des piliers de l’antiracisme – et s’attaque donc aux Portugais. Ça ne mange pas de pain, leur communauté est totalement, mais alors totalement absente de nos médias. Le CRAP (conseil représentatif des associations portugaises) n’existant pas non plus, Élie a un boulevard sans limitation de vitesse pour les vannes.
« Le Portugal se situe bien en Afrique du Nord ? » (Ramirez, sketch d’Élie Semoun)
À l’instar de ce triste Stéphane Guillon, qui cible le pape Benoît XVI (« Quatre ans aux Jeunesses hitlériennes, c’est ce qu’il faut pour apprendre à détester les juifs les Noirs les Tziganes et les homos hein, faut pas moins », France Inter, janvier 2009) pour faire croire que les tabous ne lui font pas peur, alors qu’il évite soigneusement de rentrer dans le lard de la Grande Famille qui lui ferme toujours les portes du cinéma, Élie a choisi de renommer son racisme personnel.
Ironiser lourdement sur les poils des Portugais, le degré zéro de l’inspiration, c’est comme ironiser sur le nez des juifs. Que tout le monde puisse le faire, ou personne !