Bien que, comme tout le monde le sait, les promesses n’engagent que ceux qui les écoutent, il nous a semblé utile de revenir sur les programmes de M. Emmanuel Macron et de Mme Marine Le Pen dans le domaine de la protection sociale. Aujourd’hui, au tour de Marine Le Pen. Ses propositions visent à réconcilier le Travail et le Capital. A la condition qu’ils soient Français.
La retraite à 60 ans
Dans le programme de Mme Le Pen en matière de protection sociale, c’est sans doute la mesure qui a été la plus commentée : le retour de « l’âge légal de la retraite à 60 ans ». Régulièrement moquée par les détracteurs du FN comme étant une proposition irréaliste et coûteuse, elle mérite toutefois d’être précisée : la retraite à 60 ans à taux plein ne concernerait que les salariés ayant atteint « 40 annuités de cotisations ». Autrement dit, c’est surtout pour les ouvriers et les employés, voire certains ETAM, que Marine Le Pen défend la retraite à 60 ans. Les cadres, ayant eu l’opportunité de réaliser des études et dont l’espérance de vie à 60 ans est plus longue que celle des ouvriers et employés, en resteront sans doute au régime actuel.
Ceci étant dit, tous les salariés pourraient potentiellement tirer profit de la réforme du compte pénibilité que la présidente du FN entend mettre en œuvre. Elle revendique le « remplacement du compte pénibilité, inapplicable dans sa forme actuelle, par un nouveau dispositif reposant sur une évaluation personnalisée grâce à une médecine du travail qui sera reconstituée ». Dans un second temps, « la pénibilité constatée sera compensée par une majoration des annuités de retraite ». Champagne du côté de la CFDT ? À voir...
Notons finalement que le souci lepéniste de s’adresser aux salariés se retrouve dans la promesse de « retirer la loi Travail (dite loi El Khomri) ». De quoi convaincre la CGT ? Ses dirigeants : rien n’est moins sûr mais sa base : c’est moins improbable...
Le soutien aux familles françaises
Au-delà du retour, certes, conditionné, mais non moins emblématique, à la retraite à 60 ans, la présidente du FN propose plus fondamentalement d’asseoir, en partie, la protection sociale sur les solidarités familiales. Pour ce faire, elle entend d’abord « mettre en œuvre une vraie politique nataliste réservée aux familles françaises, en rétablissant l’universalité des allocations familiales et en maintenant leur indexation sur le coût de la vie », mais aussi en revenant à « la libre répartition du congé parental entre les deux parents ». Les « féministes » de tous bords apprécieront ces propositions portées par une femme !
S’appuyant sur cette consolidation des familles françaises, Marine Le Pen veut « réhausser progressivement le plafond du quotient familial, rétablir la demi-part des veuves et veufs et la défiscalisation de la majoration des pensions de retraite pour les parents de famille nombreuse ». Surtout, elle propose de « renforcer la solidarité intergénérationnelle en permettant à chaque parent de transmettre sans taxation 100000 euros à chaque enfant tous les cinq ans (au lieu de quinze ans actuellement) et en augmentant le plafond des donations sans taxation aux petits-enfants à 50000 euros, également tous les cinq ans ».
Autrement dit, Mme Le Pen s’engage à réorganiser la protection sociale des familles en recourant aussi bien à des revenus de transfert socialisés qu’à des solutions visant à faciliter les transferts patrimoniaux intra-familiaux. Cette conception est à contre-courant du contexte français actuel, où le terme de « famille » s’apparente bien souvent à un gros mot.
La santé, entre public et privé
De manière similaire, la présidente du Front national annonce des mesures visant à renforcer à la fois le pôle public et le pôle privé de la prise en charge du risque santé. Elle souhaite en premier lieu « garantir la Sécurité sociale pour tous les Français ainsi que le remboursement de l’ensemble des risques pris en charge par l’Assurance maladie ». Elle promet ensuite de « maintenir au maximum les hôpitaux de proximité et augmenter les effectifs de la fonction publique hospitalière ». Enfin, elle revendique l’institution d’une cinquième branche « de Sécurité sociale consacrée à la dépendance afin de permettre à chaque Français de se soigner et de vivre dans la dignité ». Marine Le Pen s’écarte ici de la voie très libérale choisie par François Fillon.