Toute l’information – et une information massive – post-Bataclan (nous n’oublions pas les victimes dites des terrasses) s’est réfugiée dans le registre émotionnel. On écrit réfugiée parce qu’il y a un autre registre qui ne semble intéresser personne : le registre politique, celui qui intéresse l’investigation. Par exemple, on parle des trois assaillants du Bataclan, qui étaient peut-être quatre. Ce qui change tout.
Azdyne est le père de Samy, l'un des trois terroristes du Bataclan. Georges est le père de Lola, tuée lors de l'attentat.
Ensemble, ils ont choisi d'écrire un livre. Ils racontent. pic.twitter.com/WbwM3HaShA
— Brut FR (@brutofficiel) September 6, 2021
Quand la psychologie remplace l’information
Le procès des 20 terroristes ou assimilés a commencé la première semaine de septembre 2021, dans des conditions exceptionnelles de sécurité, et on se dit que l’attentat ayant fait son œuvre, en réalité, les protagonistes, du côté des familles des victimes ou des accusés, ne risquent plus rien.
Le mal est fait, il a été exploité, mais une question demeure : cet attentat, qui n’avait aucun sens d’un point de vue militaire (assassiner des innocents), a-t-il servi à autre chose qu’à terroriser tous les Français et à déclencher – ou du moins autoriser – la montée de l’islamophobie, l’outil principal du national-sionisme ? Si vous avez une réponse cohérente, on sera ravis de l’écouter.
Nous avons visionné quasiment tous les témoignages, qui pullulent aujourd’hui, certains des témoins ou personnes blessées n’ayant pas voulu témoigner à chaud en 2015, témoignages qui restent, par définition, dans le registre émotionnel. Mais les journalistes français, au lieu de rester eux aussi dans l’émotionnel, par crainte ou par médiocrité, devraient poursuivre leurs recherches sur les zones d’ombre de l’attentat, le pire que la France ait connu sur son sol.
Les zones d’ombre
Certes, la presse fait (semblant de faire) son travail, six ans après les faits, en admettant que ces zones d’ombre demeurent, sans parler de l’éventuel quatrième tueur du Bataclan, celui qui aurait ouvert froidement le « bal ». Aujourd’hui, on parle du onzième assaillant du 13-Novembre : Mohamed Abrini, qui rappelle celui de Salah Abdeslam...
Il y a un million de pages au dossier. L’enquête est tentaculaire, et des zones d’ombre restent, notamment autour de Salah Abdeslam et de son étrange itinéraire. Quelques heures avant les attaques, sa voiture est filmée à l’aéroport de Roissy. S’agit-il d’un repérage, ou doit-il récupérer un complice ? Les juges d’instruction le reconnaissent eux-mêmes, les raisons de ce passage demeurent mystérieuses.
Après avoir déposé un kamikaze près du Stade de France, il abandonne son véhicule dans le XVIIIe arrondissement de Paris. Mais le lendemain, l’État Islamique revendique des attaques qui n’ont jamais eu lieu, justement à cet endroit. Son gilet était-il défectueux ? Là encore c’est un mystère.
Dans le box, un accusé intrigue. Mohamed Abrini devait-il être le onzième assaillant ? Avec les autres membres des commandos, il vient à Paris en voiture. La veille des attaques, il loge avec eux dans un appartement mais en pleine nuit, il prend un taxi et rendre précipitamment à Bruxelles (Belgique), il ne devait pas, dit-il, participer aux tueries. (France Info)
Les complotistes jugeront que les hommes qui ont participé à l’élaboration de ces actes de guerre et qui se sont retirés in extremis évoluaient peut-être dans la zone grise entre terrorisme et renseignement, parfois sans le savoir. Car nous savons depuis la guerre civile algérienne (celle de 1989-1999) que les groupes islamiques armés (GIA), dont les membres principaux étaient revenus d’Afghanistan où ils avaient combattu les Soviétiques, étaient infiltrés par le renseignement militaire algérien, qui a ensuite fourgué ses informations à la CIA.
Après 2001, pendant l’ère Bouteflika (1999-2019), l’époque était à l’entente et à l’échange d’informations entre les services américain et algérien. Après une première approche militaire commune en mai 2005, Rumsfeld a été reçu à Alger en février 2006. Selon le Canard enchaîné, repris par le site liberte-algerie.com, 400 hommes des forces spéciales US étaient basés près de Tamanrasset au milieu des années 2000.
Quelque 400 hommes des forces spéciales américaines se trouvent dans une base militaire US installée près de Tamanrasset, dans le Sud algérien, pour combattre le terrorisme, révèle dans sa dernière livraison l’hebdomadaire satirique français Le Canard enchaîné. Selon la même source, les militaires américains ont installé sur leur base en Algérie une station d’écoute qui leur permet de capter toutes les communications par téléphones fixe et portable, par satellite et par fax en Afrique subsaharienne. Des avions américains assurent l’approvisionnement des quelque 400 éléments de la base américaine dont la mission essentielle est de repérer et de surveiller les réseaux terroristes en Afrique.
Une station d’écoute qui permet de craquer les communications des djihadistes de la bande sahélienne au sud, mais aussi celles des opposants algériens au nord !
Utilité du terrorisme
Au fond, le terrorisme finit toujours par servir le pouvoir (profond) en place, qui peut augmenter la terreur sur la population, par le moyen des médias, de plus en plus affaiblis et donc soumis, augmenter la surveillance du citoyen – ce sont les résistants politiques et non de droit commun qui sont surveillés – et augmenter la répression sous couvert de sécurité nationale, le Patriot Act américain post-11/09 servant d’exemple à toutes les démocraties totalitaires, dont la France est aujourd’hui la figure de proue.
Si nous avons une pensée (ça ne mange pas de pain) pour les familles endeuillées, les personnes handicapées et blessées à vie de cette nuit de cauchemar, nous n’oublions pas les journalistes à la botte et les politiciens corrompus (suivez notre regard) qui ont changé un massacre politique en résilience nationale à la sauce Cyrulnik, afin de ne pas toucher au sujet central, le basculement politique profond du pays, le cui bono d’une opération qui sent les services de toutes parts.
Bonus : un reportage de la chaîne américaine ABC sur une équipe de
Bérets verts dans le Sahara algérien (sujet antérieur à 2012)
Déjà une polémique sur le livre des deux pères qui ont perdu un enfant
2/ On y apprend tout d'abord son fort antisémitisme même s'il affirme aujourd'hui s'en être détourné pic.twitter.com/qJ1KXXEiV1
— Gaston Crémieux (@GastonCremieux) September 8, 2021