Le niveau d’endettement de la Chine a atteint le taux record de 237 pour cent du produit intérieur brut selon un article publié dans le Financial Times le week-end dernier. Des voix se sont élevées pour avertir que le pays pouvait se diriger vers une crise financière de type Lehman ou une période prolongée de faible croissance comme celle qui a frappé le Japon ces deux dernières décennies.
L’article dit que la dette totale de la Chine, qui comporte les emprunts étrangers et nationaux, avait grimpé à 25 billions de dollars suite à une extension rapide de l’emprunt depuis l’éruption de la crise financière mondiale en 2008-2009. En 2008, la dette chinoise se situait à 148 pour cent du PIB.
Lorsque la crise a éclaté, conduisant à une contraction du commerce mondial dans les premiers mois de 2009 plus rapide que celle de la période initiale de la Dépression des années 1930, le modèle chinois de croissance économique par l’exportation s’est effondré, entraînant la perte de 23 millions d’emplois. Le gouvernement a répondu par un plan de relance de 500 milliards de dollars et une expansion massive du crédit aux sociétés publiques et aux collectivités locales. On a estimé l’extension du crédit à l’équivalent de tout le système financier américain.
Les autorités chinoises s’attendaient à ce que l’économie mondiale connaisse une reprise après la crise et que les exportations reprennent leur trajectoire précédente. Mais près de huit ans après la crise financière, l’économie mondiale continue de stagner. Plus important encore, le commerce mondial qui avant la crise augmentait à un rythme plus rapide que le PIB mondial, évolue maintenant à un niveau inférieur à la croissance.
Depuis 2013, le gouvernement et les autorités financières chinoises reconnaissant que l’extension de l’investissement dans l’infrastructure — en particulier dans l’immobilier – ne peut être maintenue, tentent d’effectuer un « rééquilibrage » de l’économie en s’éloignant du développement à forte intensité de capital et en allant vers la consommation et l’expansion des services.
Le taux de croissance a chuté par rapport aux niveaux de croissance précédents de l’ordre de 10 pour cent, faisant baisser au gouvernent son objectif officiel d’expansion économique à 6,5 ou 7,0 pour cent. Mais même ce niveau inférieur s’avère difficile à maintenir.
Les turbulences économiques de la seconde moitié de 2015, découlant de la crise du marché boursier en août et du ralentissement de la croissance a soulevé la crainte d’un « atterrissage brutal » qui conduirait le gouvernement à rouvrir les robinets du crédit pour soutenir l’économie. L’estimation de la croissance du premier trimestre 2016 fut de 6,7 pour cent, en ligne avec les prévisions du gouvernement, mais tout de même le taux le plus bas depuis le plus fort de la crise financière. Ce résultat n’a été obtenu que grâce à une importante extension du crédit.
Le Financial Times a rapporté que selon des données de la banque centrale et ses propres calculs, les nouveaux emprunts ont augmenté de 6,2 billions de renminbi au premier trimestre de cette année, la plus grande augmentation sur une période de trois mois et plus de 50 pour cent supérieure à la même période l’an dernier. L’économiste en chef pour la Chine de BNP Paribas, Chen Xingdong, a déclaré que le premier résultat du PIB du trimestre, n’a été atteint que grâce à une extension de la production industrielle, à celle de l’investissement en capital fixe et à ce qu’il a appelé une augmentation « stupéfiante » des start-ups dans la construction. En même temps, la croissance du secteur des services, qui est censé fournir la base d’une économie chinoise « rééquilibrée », a ralenti.
Il y a une divergence d’opinions entre les économistes et les analystes financiers sur la façon dont les problèmes de la dette chinoise vont évoluer. Certains avertissent que cela aboutira à une crise à la « Lehman », avec des faillites bancaires et un effondrement du crédit. Selon Jonathan Anderson de l’Emergent Advisors Group, cité dans un autre article du Financial Times ce week-end, les banques comptent sur la vente de produits à haut rendement plutôt que sur les dépôts pour financer le crédit, une formule qui a conduit à l’effondrement en 2008 de la banque américaines Bear Stearns et, plus tard dans l’année, de la banque Lehman Brothers.
« Au rythme actuel d’expansion », a-t-il écrit récemment, « c’est seulement une question de temps avant que certaines banques se trouvent incapables de financer tous leurs avoirs en toute sécurité. Une crise financière est alors probable ».
L’investisseur mondial de fonds de couverture George Soros a comparé l’économie chinoise actuelle à la situation prévalant aux États-Unis avant l’effondrement de 2008. D’autres soutiennent que la banque centrale chinoise va continuer à injecter de l’argent dans le système financier pour parer à un effondrement, mais cela ne fera que conduire à une stagnation à la japonaise.
Quel que soit le résultat immédiat, la crise croissante de la dette a de vastes répercussions sur l’économie mondiale dans son ensemble, un grand nombre d’économies, de l’Australie et du Brésil aux économies d’Asie du Sud-Est, d’Afrique et d’Amérique latine étant fortement dépendantes de la poursuite de la croissance économique chinoise.