En politique, on peut être contre une mesure (et le dire haut et fort) puis y être finalement favorable quand on est au pouvoir. Et l’inverse est tout aussi vrai : la preuve avec le recours par le gouvernement à l’article 49.3 pour faire passer le projet de loi sur l’activité et la croissance à l’Assemblée nationale. C’est ce qui s’appelle « retourner sa veste » ou bien encore « manger son chapeau ».
À quelle sauce le gouvernement italien, conduit par Matteo Renzi, mangera le sien ? En février 2014, le Parti démocrate (PD), membre de la coalition au pouvoir après les élections générales ayant eu lieu un an plus tôt, recommandait de réduire la commande d’avions de combat F-35 Lightning II pour mieux se concentrer sur le programme Eurofighter.
« Chaque euro investi [ndlr, dans le F-35] finira dans les caisses de Lockheed-Martin (…) Soutenir un projet aérien européen [ndlr, Eurofighter] à la place nous aménera un avantage économique certain et de l’emploi. Chaque euro investi sera retourné à l’Italie par le consortium en termes de commandes », avait alors expliqué un député du PD.
Il était alors proposé de diminuer de moitié la commande d’avions F-35, laquelle avait déjà été réduite de 131 à 90 exemplaires lors de l’annonce de restrictions budgétaires faite en 2012 par gouvernement emmené par Mario Monti. Plus tard, le président du Conseil italien alla dans ce sens.
« Nous maintiendrons nos programmes internationaux et nous continuerons à avoir une force aérienne forte mais ce programme sera révisé », avait en effet indiqué Matteo Renzi, au sujet du F-35, dont les coûts de développement n’ont cessé de grimper depuis 2001.
Finalement, il ne devrait y avoir aucune révision… Selon des informations de l’agence Reuters, le gouvernement italien devrait en effet maintenir la commande de 90 avions F-35 et aura ainsi à « résister aux pressions politiques émanant de son propre camp ».
Pourquoi ? Parce que l’Italie fait partie des partenaires du 2e cercle du programme Joint Strike Fighter [ndlr, l’autre nom du F-35] et, qu’à ce titre, une usine où doivent être produits les appareils destinés à l’Aeronautica Militare a été inaugurée en 2013 à Cameri, près de Milan. Et il est prévu que ce site devienne un centre de maintenance pour l’ensemble des avions de ce type mis en oeuvre en Europe.
« Cette décision est motivée par deux facteurs : le gros contrat d’entretien obtenu par la compagnie publique de défense Finmeccanica pour ces F-35 et la nécessité de renouveler la flotte de chasseurs », explique Reuters.
« Le nombre approprié [d’avions] pour que l’Italie joue le rôle industriel auquel elle aspire est 90. (…) Respecter le programme est conforme aux différentes résolutions parlementaires et 90 est le nombre qui nous permet de couvrir les besoins du pays en terme de défense », a confié une source « proche du dossier ».
Reste à voir comment une telle décision pourra passer, alors que des élus du Parti démocrate ont demandé une réduction drastique des sommes allouées au programme F-35, lequel est évalué, pour l’Italie, à 12 milliards d’euros. Retourner sa veste tout en mangeant son chapeau n’est jamais une partie de plaisir…