Ainsi, aujourd’hui, nous apprenons que, en cachette, clandestinement, l’État d’Israël coopère avec les racistes les plus extrêmes pour les utiliser dans son combat contre le droit de tout juif à cesser d’être juif.
Le gouvernement finance une organisation ultra-raciste, qui mène campagne contre le « métissage » et l’assimilation.
L’organisation LHVH (Contre l’assimilation en Terre sainte) a fait beaucoup les gros titres ces derniers mois, et surtout en raison de la très active députée Tzippi Hotovely (Likoud). L’organisation est hyperactive pour s’opposer à tout « mariage mixte » et empêcher les filles pures d’Israël de se salir au contact des non-juifs. Elle est aussi plutôt prompte à soutenir le lynchage des non-juifs, même si ce lynchage n’a rien à voir avec l’assimilation/« métissage ».
Dans le supplément hebdo d’Ha’aretz, Uri Blau et Shay Greenberg montrent que la LHVH, qui est il est vrai une organisation kahaniste, reçoit un financement indirect du gouvernement. Elle est financée par l’association Khemla qui est elle-même financée par le ministère des Affaires sociales.
A l’origine, notent Blau et Greenberg, Khemla était en fait une association d’aide sociale, mais en 2002, elle a modifié ses objectifs et a ajouté deux nouveaux articles : « Aider les jeunes filles issues de familles désunies, confrontées au risque d’une conversion imposée (c’est-à-dire l’assimilation - Blau et Greenberg) et de sombrer dans une vie de crimes, en les réinsérant dans un appartement et en leur fournissant l’aide sociologique et psychologique pour réintégrer la société juive » ; l’autre article vise une « aide aux gens des collines (c’est-à-dire aux colons extrémistes - YG) en Judée, Samarie et à Gaza ».
Les dirigeants de Khemla sont d’éminents kahanistes. L’un d’entre eux, Levi Hazan, a passé six mois en prison - une condamnation plutôt sévère pour des terroristes juifs - pour sa participation à une agression sur un bus palestinien, où il y avait eu six blessés. D’autres dirigeants de Khemla ont été mis en détention administrative, ce qui est plutôt inhabituel pour des juifs. La gérante du refuge pour femmes de Khemla, Rakhel Baranes, est l’une des signataires de la « lettre des épouses de rabbins ». En dehors de ce refuge - que Blau et Greenberg disent avoir trouvé vide - LHVH opère aussi une « dératisation », en encourageant les gens à rapporter sur qui, dans leur voisinage, loue un appartement à des non-juifs, et en fournissant des « labels casher » spéciaux aux entreprises qui s’engagent à ne pas employer des non-juifs. Le gouvernement, à travers le ministère des Affaires sociales, assume pour environ la moitié du budget annuel de Khemla, soit 600 à 700 000 NIS (nouveau shekel israélien, environ 120 à 140 000 €).
Là, il s’agit d’un racisme flagrant, pour une raison simple. Selon la loi juive, qu’Israël reconnait et dans ce cas applique, le judaïsme a franchi la ligne matrilinéaire (ascendance par les femmes - ndt). Les enfants d’une femme juive qui se convertit, ou qui simplement choisit un compagnon non juif, sont juifs. Au mieux, ils sont « enfants captifs », c’est-à-dire, des juifs qui n’ont pas reçu une éducation juive. Par contre, un homme juif qui prend une épouse ou une compagne non juive sort du judaïsme - encore une fois, il est question ici de la loi halakhique, orthodoxe - et ses enfants ne seront pas considérés comme juifs. Il serait logique, alors, pour de telles campagnes antimétissage, de se concentrer sur les hommes juifs ; pourtant, pour des raisons faciles à deviner - le racisme va toujours de pair avec la misogynie -, ce n’est pas le cas, et nous sommes prévenus contre ces sorcières palestiniennes qui concoctent des potions pour séduire à partir de poumons de lapins.
La LHVH n’est pas la seule organisation israélienne active dans ce domaine. Elle a été devancée par la vieille association ultraorthodoxe Yad Le’Akhim, qui fait aussi dans l’activité « antimissionnaire », et en tant que telle, a encore plus la haine de l’égalité des chances. Yad Le’Akhim profite aussi d’un soutien officiel : la ville d’Ashkelon a mis à sa disposition un immeuble, et elle reçoit une aide systématique du ministère de l’Intérieur.
Tzippi Hotovely a affirmé que son soutien aux kahanistes émane d’un « concept du sionisme, selon lequel les juifs doivent épouser des juifs ». En cela, elle a certainement raison. Les grands ennemis du sionisme ne sont pas les antisémites - qui souvent sont des alliés enthousiastes, puisque eux aussi pensent que les juifs doivent émigrer hors d’Europe -, mais plutôt les assimilateurs et les membres du Bund (mouvement révolutionnaire juif créé en 1897 - ndt).
Le premier groupe nie le concept de destin juif, et le second refuse d’admettre celui de « peuple à part », et il relie leur sort à celui des autres peuples dans le chaudron bouillonnant de l’Europe orientale. A quelques exceptions près, et à l’instar des rabbins orthodoxes, les sionistes sont hostiles également à ce qu’un juif puisse choisir un partenaire non juif. Le Mapaï, précurseur du Parti travailliste, avec tous ses discours sur la fraternité, n’en a pas moins refusé d’ouvrir, dans les années trente, un jardin d’enfants mixte (c’est-à-dire avec des enfants juifs et arabes), à Haïfa, par crainte d’une assimilation.
Vous pourriez arguer que l’idéal serait que le sionisme puisse exister sans être raciste. En pratique, cependant, il est difficile d’imaginer une forme de sionisme - ultranationalisme juif - qui puisse défendre l’égalité. La loi israélienne ne reconnaît pas l’égalité en tant que droit juridique fondamental. Même ces sionistes qui s’en sont pris à la folie et à l’iniquité de la loi juive se sont arrêtés dès la première barrière : la peur de la souillure du sang.
Ainsi, aujourd’hui, nous apprenons que, en cachette, clandestinement, l’État d’Israël coopère avec les racistes les plus extrêmes pour les utiliser dans son combat contre le droit de tout juif à cesser d’être juif. Il est intéressant de noter que le ministère de l’Enseignement a déjà déclaré à la commission d’Hotovely qu’il aiderait le combat contre l’assimilation en « renforçant l’identité juive » et en « promouvant une vie familiale ».
Mais il y a des limites à ce que peut faire le ministère de l’Enseignement : même d’interdire aux élèves de lire la déclaration universelle des droits de l’homme, qui reconnait le droit à la liberté de religion, donc de se convertir (article 18). Les tribunaux feraient du bruit, et peut-être, agiraient ; il y aurait un tollé international ; l’effort de guerre de la Hasbara (propagande juive sur Internet - ndt) pourrait en souffrir. C’est là que vous avez des organisations comme LHVH et Yad Le’Akhim pour : être « l’œil de modestie » officieux de l’État sioniste, et agir là où le tabou social contre le métissage - beaucoup plus fort, par exemple, que celui de la société allemande d’avant le nazisme - n’est pas assez bon.
Et rappelez-vous : Israël est la seule démocratie au Moyen-Orient.