Le cas de Catherine Péderzoli, ce professeur juif sanctionné par l’inspection pour manquement au devoir de réserve et dysfonctionnement dans l’organisation de sorties scolaires, notamment à Auswitch, ne manque pas d’être troublant.
Cette Jivaro (ces collègues notent ses excès caractériels) n’a fait, somme toute, qu’appliquer la ligne officielle de ce qui est devenu le prêt-à-penser occidental, à savoir que la shoah est l’épicentre de la mémoire historique, et que les événement liés à des réalités identitaires, de plus en plus fantomatiques, autres que celle du peuple élu, deviennent secondaires, voire quasiment inexistants.
La mise à l’index dans les classes de 5e des règnes de François 1er, Henri IV, Louis XIV et Napoléon a éclairé cette tendance au déracinement culturel et mémorial. Et ce n’est un secret pour personne que le système éducatif est devenu une terre de conquête des cœurs et des esprits pour les inquisiteurs de la bien-pensance, d’autant plus qu’ils sont soutenus par le régime, ses voix médiatiques et son bras séculier.
Pour que Mme Péderzoli ait suscité l’ire de l’institution et, subsidiairement de ses collègues, qui lui reprochent son zèle, assimilé à un "lavage de cerveaux", et l’accent mis sur le compassionnel, sans compter le temps consacré à ses sorties de « sensibilisation », qui accaparent une grande partie de l’année, au détriment du programme, il fallait qu’il y eût péril en la demeure.
Les arguments pour justifier la mise à pieds de Catherine Péderzoli ne manquent pas de piquant, surtout celui qui lui reproche d’employer le terme, connoté religieusement, de shoah, plutôt que celui, plus neutre, de génocide. A vrai dire, ce sophisme ne tient pas, le vocable « shoah » se trouvant en abondance dans les micros de la télévision et de la radio, sinon sous les plumes de la valetaille journalistique, à tel point qu’il aurait perdu pour beaucoup sa charge confessionnelle, si n’était l’entreprise de sacralisation sont il est un instrument privilégié.
En effet, dans une Europe qui perd ses repères, qui a abandonné toute foi, toute référence à ses racines, la judéomanie (de mania, folie en grec) est devenue un substitut religieux, et, subséquemment, un moyen s’asseoir une nouvelle Eglise, avec ses prêtres, ses fêtes annuelles, ses rites, ses dogmes, ses pèlerinages, et jusqu’au au ton pieux, vibrant de mystique un peu hystérique, plein de sainte terreur et de crainte, de suspicion et de d’hostilité, que l’on trouve généralement chez ce que l’on est convenu d’appeler des grenouilles de bénitiers.
Rappelons les saintes colères provoquées par l’utilisation sacrilèges des termes et expressions comme « four crématoire », « chambre à gaz », « 6 millions », etc. Ce sont des mots dont on ne peut user qu’avec componction, prudence et sourde crainte.
Bien entendu, la communauté israélite est montée aux créneaux, avec ses défenseurs, pour soutenir cette nouvelle héroïne de la cause, sous le prétexte convenu d’un antisémitisme dont se serait rendue coupable l’institution scolaire, ce qui est absurde et même surréaliste.
On se dit que Catherine Péderzoli a dû dépasser les bornes, s’il en est en la matière quand on connaît les énergumènes, et il est probable que la manifestation d’élèves à l’occasion de la venue de Chatel à Nancy n’y est pas pour rien. On accuse l’enseignante en effet de les avoir manipulés pour protester contre la réduction, par le proviseur, des effectifs programmés pour la sortie à Auswitch.
Il est à noter que l’ancienne direction du lycée n’avait pas constaté d’anomalie à ce qui paraît maintenant abusif, et que les élèves, à en juger par le soutien inconditionnel de ceux qui se sont exprimés, ont trouvé normal un état des choses éducatives pour le moins particulier. Mais il est vrai qu’en la matière l’anomalie est devenue la règle, et que la mise sous boisseau de la « shoah » est considérée comme atypique, et même impensable, comme a tenu à le souligner Chatel.
Non seulement parce que son étude est prévue par le programme, aux dépens d’ailleurs de celle consacrée aux méfaits du communisme, et à d’autres génocides, mais les enseignants, singulièrement ceux d’Histoire, ne manquent pas de manifester leur orthodoxie et leur enthousiasme. C’est souvent chez les demi savants, les ignorants enduits de vernis dogmatique, que l’on trouve les plus conformistes et les plus réceptifs à la propagande, surtout médiatique. Le cas est si universel qu’il doit relever d’une loi d’espèce.
Pourquoi donc cet acharnement contre une personne, certes très zélée, et sans doute insupportable, mais qui ne détone pas dans une France et un système éducatif imbibés de philojudaïsme repentant ?
Il ne faut pas rejeter l’hypothèse que l’institution, l’inspection, que le ministre ne tient pas à désavouer, dans la mesure où, par ailleurs, il a été l’objet d’une contestation organisée, d’une manipulation dont Catherine Péderzoli était l’instigatrice (on se croit tout permis parfois quand on est dans son bon … droit), se soit pris les pieds dans le tapis.
Tout va rentrer dans l’ordre, soyons-en sûrs. D’autant plus que la sanction qui vise notre Savonarole femelle n’a rien à voir avec ce qu’ont subi des récalcitrants, bien plus profonds, professeurs, préfet ou autres trouble-fêtes : Mme Péderzoli n’a été condamnée qu’à quatre mois de suspension, avec pleine rémunération. Aymeric Chauprade appréciera cette modération.