Prophétie autoréalisatrice ?
Un vrai Trump français – c’est-à-dire un candidat populiste dans l’âme – ne doit pas parvenir aux commandes. Alors on fabrique de faux Trump, avec des discours adaptés.
On y arrive tranquillement, mais sûrement : les « mous » des deux camps de l’Alternance (Juppé et Hollande) sont éliminés, et remplacés par des « durs » (Fillon et Valls), qui sont plus susceptibles de prendre des points à Marine Le Pen, afin de l’éliminer dès le premier tour.
Ingénierie en marche, les médias commencent à prêter main forte à ce scénario qui permet au Système de se protéger de toute mauvaise surprise populaire... La preuve avec l’article du Point qui suit. Et cet extrait du Monde daté du 27 novembre 2016 :
Le Premier ministre observera de près la primaire qui se tient ce dimanche entre François Fillon et Alain Juppé. « Fillon, si c’est lui, sera un adversaire très sérieux pour la gauche. Je veux insister sur cela : nous vivons dans un nouveau paysage politique marqué par le tripartisme : la droite, l’extrême droite, et la gauche qui est fracturée. (...) Si nous ne mettons pas l’extrême droite sur la touche dès le premier tour, ce sera un big bang politique, aux conséquences lourdes pour la France ». Il dit « refuser que l’extrême droite » soit « la première force » à s’opposer au vainqueur de la primaire à droite et prévient que « la primaire du PS ne doit pas se résumer à de petits calculs d’appareils ».
L’annonce pure et simple de sa candidature par Manuel Valls, et de son lâchage du président, devenu un véritable boulet pour les élections.
Face au nouveau chef de la droite, largement vainqueur de la primaire, l’actuel Premier ministre paraît le mieux armé pour incarner la gauche.
- On attend la confirmation du CRIF pour le "choix" des deux "bons" finalistes en 2017
À gauche toute ! Maintenant que la droite a désigné haut la main François Fillon comme son champion, à la gauche de se prononcer – et de tenir la rampe et les « sunlights » avec le même succès. Qui face au nouveau chef de la droite ? On le saura définitivement le 29 janvier, à l’issue du second tour de la primaire de la gauche. Emmanuel Macron est sorti du bois, François Hollande s’apprête à le faire, et Manuel Valls se dévoile de plus en plus. On comprend pourquoi : sur le papier, il paraît le plus à même d’incarner la gauche face à la droite Fillon. Du moins, il semble le plus en situation pour réaliser le même coup électoral que Fillon à droite. Voici pourquoi, en cinq raisons.
1. La mémoire Clemenceau
Il est le « mentor » historique et idéologique de Manuel Valls. Et l’homme est né en Vendée, à Mouilleron-en-Pareds, il y trouva refuge à la fin de sa vie dans une maison de campagne à Saint-Vincent-sur-Jard (ornée d’un jardin dessiné par son ami Claude Monet) qui se visite aujourd’hui. Le « Tigre » était très vendéen et il reste une référence politique pour la gauche locale. Georges Clemenceau incarne parfaitement l’autre France de l’Ouest, celle des « bleus » républicains dont le choc idéologique se poursuit encore de nos jours avec la droite conservatrice, qui défend les valeurs traditionnelles, l’autorité, le travail, la hiérarchie sociale, soit ces valeurs qui ont sous-tendu la vague ayant porté François Fillon comme chef de son camp.
2. La matrice historique
Bien plus que ses rivaux à gauche, Manuel Valls est porteur lui aussi d’un « récit national » – comme dirait François Fillon. Il n’a eu de cesse depuis longtemps de souligner, dans des discours à l’éloquence très Troisième République, les marqueurs idéologiques traditionnels de la gauche républicaine, laïque et sociale – et que l’on retrouve à l’œuvre historiquement dans la France de l’Ouest. Entre les deux tours de la primaire de la droite, au cœur de la « vague Fillon », Manuel Valls consacrait un discours très « présidentialiste » – mais peu entendu alors – au musée de l’Immigration à Paris, dans lequel il célébrait le multiculturalisme.
Être français, lançait Manuel Valls, c’est « être fier devant Le Mont-Saint-Michel, les îles du Ponant ou la mosquée de Paris », aimer les vers de La Fontaine, le théâtre de Pagnol ou « aimer son pays natal comme Césaire », Albert Camus et Kamel Daoud, ou encore le musicien Bizet, mais aussi le rap, le raï et le slam... Et il faisait siens les mots de Romain Gary sur la France, ce pays « où tous les rêves se réalisent vraiment ». Un combat présidentiel entre Valls et Fillon, c’est l’affrontement entre deux traditions historiques françaises qui, depuis la création de la République (4 septembre 1870), ont forgé notre nation.
3. Le questionnement intime
C’est l’autre élément qui rapproche la psychologie de Manuel Valls de celle de François Fillon. Sur le plan spirituel, on ne peut pas dire que François Hollande et Nicolas Sarkozy aient témoigné de fortes interrogations intimes. On ne connaît à François Hollande aucune appétence pour ces sujets, et il témoigne même d’une certaine désinvolture qu’il partage avec Nicolas Sarkozy.